Chapitre 7 Chapitre 7

Finn s'appuya nonchalamment contre un arbre, un sourire narquois illuminant son visage. Ses cheveux bruns en bataille et ses yeux pétillants de malice lui donnaient l'air d'un garçon pris en faute plutôt que celui d'un guerrier.

- Je m'ennuyais tellement que je me suis dit : pourquoi ne pas venir t'embêter un peu ?

Sélène roula des yeux.

- Tu es aussi utile qu'une patte cassée.

- Ah ! Et toi, tu es aussi charmante qu'une ourse réveillée trop tôt, répliqua-t-il en riant, les mains sur les hanches.

Elle fit mine de l'ignorer, mais un sourire furtif joua sur ses lèvres.

- Si tu as fini de plaisanter, peut-être pourrais-tu me donner un coup de main.

Finn s'avança, ses pas légers malgré sa carrure.

- Toujours à traquer les secrets des autres, hein ? Ça finira par te retomber dessus un jour.

Elle haussa un sourcil.

- Et toi, tu finiras par tomber sur plus fort que toi si tu ne fais pas attention.

Il éclata de rire, d'un rire sincère qui réchauffa légèrement l'atmosphère froide.

- C'est ce que j'aime chez toi, Sélène. Tu ne perds jamais ta langue acérée.

***

Plus tard dans la nuit, après avoir laissé le prisonnier à la garde de Tarek, Sélène s'éloigna pour réfléchir. Chaque détail, chaque mot prononcé par cet homme résonnait encore dans sa tête. Le commerce des armes avec les chasseurs, l'implication possible de Lyra... Cela expliquait tellement de choses.

Le vent froid de la nuit soufflait dans ses cheveux noirs, mais elle n'y prêtait aucune attention. Des souvenirs se bousculaient, des images d'un passé où les promesses avaient été brisées, où le sang avait coulé pour des ambitions personnelles.

Lyra avait toujours été une maîtresse du jeu, manipulant les autres avec une habileté dangereuse. Mais cette fois, elle était allée trop loin.

Le froid mordant de la nuit enveloppait Sélène alors qu'elle franchissait la frontière des terres de la Lune Obscure. Le silence des bois autour d'elle n'était troublé que par le craquement des branches sous ses pas prudents. Chaque ombre semblait s'étirer pour devenir un ennemi potentiel. Elle n'avait pas foulé ce sol depuis ce qui lui paraissait une éternité, et pourtant, le parfum familier des pins et de la mousse lui pinça le cœur d'une douleur sourde.

Elle resserra sa cape autour d'elle, dissimulant ses traits. L'idée d'être reconnue avant d'avoir trouvé ce qu'elle cherchait la rendait fébrile. La lune, pleine et brillante, perçait la canopée et illuminait son chemin. Chaque pas la ramenait un peu plus près de souvenirs qu'elle aurait préféré laisser derrière.

- Toujours aussi discrète, hein ?

La voix jaillit de l'obscurité comme un éclat de tonnerre étouffé. Sélène pivota, les griffes prêtes à surgir, mais ce fut Kael qui émergea des buissons, un sourire en coin sur le visage. Ses cheveux noirs en bataille lui tombaient sur les yeux, et sa carrure imposante évoquait la puissance brute d'un loup prêt à bondir.

- Kael, souffla-t-elle, mi-soulagée, mi-irritée. Qu'est-ce que tu fais là ?

Il s'avança d'un pas nonchalant, comme s'ils étaient de simples promeneurs bavardant sous la lune. Ses yeux brillaient d'une malice tranquille.

- J'allais te poser la même question. Il paraît que tu as quitté le territoire pour de bon, murmura-t-il en la scrutant de la tête aux pieds. Mais te voilà, de retour comme un fantôme trop obstiné pour rester mort.

- Je ne suis pas revenue pour rester, déclara-t-elle sèchement.

Kael hocha lentement la tête, ses yeux ne quittant pas les siens.

- Tu cherches des réponses, c'est ça ? Lyra a toujours eu le don d'attirer les ennuis comme le miel attire les mouches.

Sélène crispa la mâchoire à la mention du nom honni. Son regard s'assombrit.

- Lyra est plus dangereuse que jamais. Je dois savoir ce qu'elle trame. Si elle est impliquée avec les chasseurs... tout le monde est en danger.

Kael resta silencieux un instant, pesant ses mots. Puis il haussa les épaules.

- Tu n'auras pas à chercher loin. Le vieux Feran a entendu des rumeurs. Il dit qu'il y a eu des échanges au sud, près des falaises d'ébène. Des livraisons clandestines d'armes, des transactions à l'abri des regards. Si tu veux des détails, c'est lui qu'il faut voir.

Un frisson glacé parcourut le dos de Sélène. Chaque mot confirmait ses pires craintes.

- Merci, Kael. Tu sais que je ne peux pas rester longtemps ici.

Il esquissa un sourire.

- Fais attention à toi. Les secrets ne restent jamais enfouis très longtemps. Pas même les tiens.

***

La forêt s'épaississait autour d'elle alors qu'elle continuait son chemin, le silence oppressant lui pesant de plus en plus. L'air semblait chargé d'électricité, chaque feuille bruissante éveillant en elle une alerte instinctive. Elle se savait surveillée, même si elle n'entendait ni ne voyait rien.

Et puis, il apparut.

Ronan se dressait au milieu du sentier, un monolithe imposant taillé dans l'ombre et la lumière. Ses yeux verts la fixaient avec une intensité brute, comme si le simple fait de la voir lui brûlait l'âme. Son torse se soulevait sous l'effort d'une respiration contenue, et la tension dans sa posture disait tout de son état d'esprit.

- Sélène, murmura-t-il, presque trop doucement.

Elle s'arrêta, chaque fibre de son être en alerte. Une vague de souvenirs l'envahit - des souvenirs qu'elle aurait voulu effacer de sa mémoire.

- Que fais-tu ici, Ronan ? lâcha-t-elle, la voix tranchante comme une lame.

Il fit un pas vers elle, mais elle recula instinctivement, le regard dur.

- Je... Je voulais te voir, avoua-t-il, les mots semblant le brûler à mesure qu'ils franchissaient ses lèvres. Te parler.

- Parler ? gronda-t-elle. Après tout ce que tu as fait ?

Il ferma brièvement les yeux, le poids de ses erreurs visible sur son visage. Lorsqu'il les rouvrit, une lueur de douleur transparaissait dans ses prunelles.

- Je n'ai jamais voulu te blesser. Tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour protéger la meute.

- Et moi, Ronan ? cracha-t-elle. Est-ce que je comptais pour toi, ou étais-je juste une pièce de plus dans ton jeu de pouvoir ?

Il serra les poings.

- Tu as toujours compté. Plus que tu ne l'imagines.

Un silence s'étira entre eux, aussi tendu qu'une corde prête à se briser. Sélène sentit son cœur battre douloureusement dans sa poitrine, mais elle refusa de laisser son regard vaciller.

- Les mots ne changent rien, Ronan. Ils ne changent pas le fait que tu m'as trahie.

Il se rapprocha encore, cette fois déterminé à ne plus laisser la distance entre eux s'agrandir.

- Alors je te le prouverai, murmura-t-il, chaque syllabe vibrante de promesse. Je trouverai un moyen de regagner ta confiance. Même si cela me coûte tout.

Elle le fixa un long moment, le cœur partagé entre colère et un écho d'émotion qu'elle n'était pas prête à nommer. Puis, sans un mot de plus, elle tourna les talons et disparut dans l'obscurité, laissant Ronan seul avec le poids de ses regrets.

            
            

COPYRIGHT(©) 2022