Chapitre 4 Chapitre 4

Chapitre 4

Les rumeurs enflaient. Elles glissaient entre les couloirs, se coinçaient dans les recoins des discussions, s'insinuaient dans chaque regard lancé à Elena.

« Tu sors avec Blackwell ? » avait osé demander Mia, un sourire qui n'arrivait pas à masquer sa jalousie.

Elena avait nié, bien sûr. Trop vite. Trop sèchement. Et c'était comme ajouter du bois au feu. Maintenant, tout le campus la voyait comme la fille qui avait capté l'attention du prince noir.

Mais Damien n'aidait pas. Il était partout. Un café déposé sur sa table à la bibliothèque, une remarque mordante lancée à un étudiant qui lui bloquait le passage, un simple « Tout va bien ? » murmuré comme une évidence.

Elle n'avait rien demandé. Chaque geste de sa part, aussi petit soit-il, semblait hurler au monde : **Elle est sous ma protection.**

Elle avait tenté de l'ignorer. De le tenir à distance. Mais il trouvait toujours une excuse, une façon de s'imposer.

« Tu ne m'as pas remercié pour le café. »

Il l'avait dit comme ça, en passant, alors qu'elle essayait désespérément de se concentrer sur un exercice.

« Je ne t'ai rien demandé. »

Il haussa les épaules.

« Ce n'est pas une excuse. »

Elle lutta pour ne pas lever les yeux au ciel.

« Pourquoi tu fais ça ? »

Il s'assit en face d'elle, comme si la question méritait une réponse réfléchie.

« Parce que tu es différente. »

Elle éclata de rire. Un rire nerveux, coupant, presque cruel.

« C'est ça, ta ligne ? »

Il ne rit pas. Il la fixa, et pour la première fois, elle crut voir autre chose derrière ce masque.

« Je ne joue pas, Elena. »

Ces mots restèrent accrochés à elle, même après qu'il soit parti.

Mais les autres, eux, ne partaient pas. Les commérages devenaient plus lourds, plus agressifs. Dans les toilettes, une fille avait murmuré à sa copine : « Elle doit être d »uée pour qu'il s'intéresse à elle. »

Un autre jour, un mot avait été collé sur son casier : **Gold digger.**

Elle serra les dents, déchirant le papier sans un mot.

Elle se disait qu'elle pouvait encaisser, qu'elle avait survécu à pire. Mais c'était avant de tomber sur Nathan.

Elle ne l'avait pas revu depuis trois ans. Pas depuis qu'elle avait quitté cette petite ville où tout le monde connaissait ses affaires. Il était là, appuyé contre un mur près de la cafétéria, un sourire en coin.

« Elena Ravenswood. Toujours à te mêler où tu ne devrais pas. »

Sa voix avait ce ton moqueur qu'elle détestait.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? »

Il haussa les épaules.

« J'ai mes raisons. Mais toi, dis-moi... Comment tu as réussi à te glisser dans cette université d'élite ? C'est le Blackwell, c'est ça ? »

Elle croisa les bras, essayant de cacher sa panique.

« Ce n'est pas tes affaires. »

Il rit, un rire amer.

« Non, mais ça pourrait devenir celles de tout le monde, si je décidais de parler. »

Son cœur s'emballa.

« Parler de quoi ? »

Il s'approcha, son sourire s'effaçant.

« Tu sais de quoi je parle, Elena. De ton passé. De ce que tu as laissé derrière toi. »

Elle recula d'un pas.

« Tu ne sais rien. »

Il se pencha légèrement, comme pour lui murmurer un secret.

« Peut-être pas tout. Mais assez. Et je parie que ton Blackwell serait ravi d'en savoir plus. »

Il s'éloigna avant qu'elle ne puisse répondre, la laissant avec un goût amer dans la bouche et une peur grandissante.

Cette nuit-là, alors qu'elle tentait de mettre de l'ordre dans ses pensées, un message s'afficha sur son téléphone.

**« Viens dehors. »**

Pas de numéro. Pas de nom. Mais elle savait.

Damien l'attendait près de la fontaine, les mains dans les poches.

« Qui était ce gars ? » demanda-t-il sans préambule.

Elle secoua la tête.

« Personne. »

Il avança d'un pas, ses yeux perçants dans la lumière tamisée.

« Ne me mens pas, Elena. »

Elle détourna le regard, sentant les larmes monter malgré elle.

« Pourquoi ça t'intéresse ? Tu ne peux pas contrôler tout ce qui m'arrive. »

Il resta silencieux un moment, puis posa une main sur son épaule.

« Si quelqu'un te menace, je veux le savoir. »

Elle releva la tête, croisant son regard.

« Et si c'est toi, la menace ? »

Il sembla surpris, juste un instant. Puis il sourit, mais ce sourire n'atteignit pas ses yeux.

« Peut-être que je le suis. Mais crois-moi, il y a pire que moi, Elena. »

Elle ne répondit pas. Parce qu'au fond, elle savait qu'il avait raison.