Curieuse, je l'ouvris et commençai à lire. Les pages étaient remplies d'un langage ancien, mais certaines sections étaient traduites en marges, probablement par un membre de la meute dans le passé.
Je tombai sur un passage qui me glaça le sang. Il parlait d'une malédiction, une ancienne magie qui touchait "le sang de l'Alpha" et pouvait être déclenchée par des rituels oubliés.
Mon esprit revint immédiatement à Elias et à ses herbes étranges. Était-il impliqué ? Et si oui, pourquoi ?
Une phrase en particulier attira mon attention :
*"La malédiction est liée au cœur, mais aussi à la trahison. Elle se nourrit de la discorde, et seule l'harmonie peut la briser."*
Un frisson me parcourut. Que signifiait tout cela ? Et pourquoi avais-je l'impression que tout ce qui se passait dans la meute en ce moment était relié à cette énigme ?
Le grimoire était posé devant moi, ses pages anciennes dégageant une odeur de parchemin et de mystère. Le souffle court, je relisais encore et encore les mêmes phrases, comme si leur sens pouvait changer d'un instant à l'autre. L'écriture manuscrite, tremblante mais précise, semblait appartenir à quelqu'un qui avait compris la gravité des mots qu'il consignait.
*"La malédiction trouve ses racines dans le sang, dans les serments brisés et les cœurs empoisonnés par la trahison. Elle ne peut être brisée que par un acte de pure harmonie, à condition qu'il ne soit pas trop tard."*
Ces mots résonnaient dans mon esprit comme un avertissement. Le lien entre Gabriel, cette mystérieuse malédiction, et ce que j'avais surpris Elias faire dans la forêt devenait de plus en plus troublant. Était-ce une coïncidence ? Non, je n'y croyais pas. Je savais que tout était lié, mais je n'avais aucune idée de comment assembler les pièces du puzzle.
En tournant une autre page, mes doigts rencontrèrent une illustration inquiétante. Une silhouette indistincte, à la fois humaine et animale, semblait emprisonnée dans un cercle gravé de symboles étranges. Un frisson me parcourut l'échine. Était-ce là le destin qui attendait Gabriel ?
Soudain, un bruit derrière moi me fit sursauter. Je refermai précipitamment le grimoire et me retournai pour voir Axel, adossé à une étagère, un sourire amusé au coin des lèvres.
"Tu t'intéresses aux vieilles légendes maintenant ?" demanda-t-il, son ton à la fois moqueur et intrigué.
"Qu'est-ce que tu fais là ?" répliquai-je, essayant de masquer mon embarras.
"Je pourrais te poser la même question," dit-il en s'approchant. "Mais je suppose que tu es ici pour des raisons bien plus nobles que moi."
Axel était toujours comme ça, mélange de charme et de provocation. Il avait ce don pour faire oublier, même l'espace d'un instant, tout ce qui pesait sur mes épaules. Mais je savais qu'il jouait un jeu, un jeu dangereux que je n'avais pas encore appris à décrypter.
"Ce n'est qu'un vieux livre," dis-je en haussant les épaules, espérant qu'il lâcherait le sujet.
"Un vieux livre qui semble te passionner," rétorqua-t-il avec un sourire en coin. "Tu devrais faire attention, Clara. Les livres peuvent parfois révéler des vérités qu'on aurait préféré ignorer."
Il s'assit sur le rebord de la table, son regard fixé sur moi. Il était proche, trop proche, et je pouvais sentir la chaleur de sa présence.
"Tu veux que je t'aide ?" demanda-t-il soudainement, sa voix plus douce, presque séduisante.
"À faire quoi ?"
"À découvrir ce que tu cherches."
Je fronçai les sourcils, méfiante. "Pourquoi est-ce que tu voudrais m'aider ?"
"Parce que je vois quelque chose en toi que les autres ne voient pas," répondit-il. "Tu n'es pas qu'une Omega, Clara. Tu as du potentiel, mais tu te laisses enfermer dans le rôle qu'ils t'imposent."
Ses mots me frappèrent plus fort que je ne voulais l'admettre. Il tendit la main et effleura une mèche de mes cheveux, un geste à la fois intime et calculé.
"Tu pourrais être bien plus," murmura-t-il.
Je reculai légèrement, mal à l'aise. "Et qu'est-ce que tu veux en échange ?"
"Rien d'important," dit-il avec un sourire mystérieux. "Juste ta confiance."
Avant que je ne puisse répondre, il se leva et se dirigea vers une étagère où étaient rangées des armes anciennes. Il en sortit une lame fine et élégante, qu'il fit tourner dans sa main avec une aisance déconcertante.
"Viens," dit-il, en me lançant un regard provocateur. "Je vais t'apprendre à te défendre."
***
L'entraînement fut plus intense que je ne l'avais anticipé. Axel avait une manière de tester mes limites, de me pousser toujours plus loin, mais aussi de rendre chaque instant imprévisible. Il me corrigeait d'une main ferme, mais ses gestes étaient souvent accompagnés d'un sourire qui avait quelque chose d'ambigu.
"Tu es trop rigide," dit-il en se plaçant derrière moi pour ajuster ma posture. "Laisse ton instinct guider tes mouvements."
Je pouvais sentir son souffle contre ma nuque, et cela me troublait plus que je ne voulais l'admettre. Pourtant, je fis de mon mieux pour me concentrer sur l'exercice.
"Comme ça ?" demandai-je, en essayant de reproduire le mouvement qu'il m'avait montré.
"Pas mal," répondit-il, son ton chargé d'une pointe d'amusement. "Mais tu peux faire mieux."
Il se plaça devant moi, nos regards se croisèrent, et pendant un instant, le temps sembla s'arrêter.
"Tu as du talent, Clara," murmura-t-il. "Tu pourrais être redoutable."
"Tu veux dire comme toi ?" rétorquai-je, essayant de briser la tension.
"Non," dit-il, son sourire disparaissant. "Mieux que moi."
Avant que je ne puisse répondre, une voix familière brisa le moment.
"Qu'est-ce que vous faites ?"
Je me tournai pour voir Gabriel, debout à l'entrée, les bras croisés et le regard sombre.
"On s'entraîne," répondit Axel avec un sourire narquois. "Tu veux nous rejoindre ?"
Gabriel ignora la provocation et fixa son regard sur moi. "Clara, peux-tu nous laisser un moment ? J'ai besoin de parler à Axel."
"Pas question," intervint Axel. "Si tu veux dire quelque chose, dis-le devant elle."
Gabriel ferma les yeux un instant, visiblement exaspéré, avant de reporter son attention sur moi.
"Clara, s'il te plaît," dit-il, son ton plus doux cette fois.
Je hochai la tête, incapable de soutenir son regard, et quittai la pièce, laissant les deux hommes face à face.
***
Plus tard, alors que je m'éloignais, espérant trouver un peu de solitude, Gabriel me rattrapa.
"Clara, attends."
Je m'arrêtai, mais je ne me retournai pas.
"Qu'est-ce qui se passe avec toi dernièrement ?" demanda-t-il, sa voix emplie d'une inquiétude sincère.
"Rien," répondis-je, les bras croisés.
"Ne me mens pas," dit-il en s'approchant. "Je t'ai vue fouiller dans ce vieux grimoire. Et maintenant, tu passes ton temps avec Axel. Qu'est-ce que tu cherches ?"
Je me tournai enfin vers lui, mon regard brûlant de défi. "Et toi, Gabriel ? Qu'est-ce que tu caches ?"
Il sembla pris au dépourvu par ma question, mais il se reprit rapidement. "Ce n'est pas moi qui joue à un jeu dangereux ici."
"Peut-être que si tu nous faisais confiance, je n'aurais pas à chercher les réponses par moi-même."
"Faire confiance ?!" s'exclama-t-il, sa voix montant d'un ton. "Clara, tu te mets en danger. Tu ne sais pas ce que tu fais, ni ce à quoi tu t'attaques."
"Alors explique-moi !" rétorquai-je.
Un silence tendu s'installa entre nous, avant qu'il ne secoue la tête. "Certaines choses ne peuvent pas être expliquées, Clara. Pas encore."
"Et quand ce sera trop tard, Gabriel ? Quand ?"
Il n'eut pas le temps de répondre. Une cloche résonna dans le camp, signe qu'un événement important se préparait. Gabriel me lança un dernier regard, mêlé de colère et de quelque chose que je ne pouvais pas identifier, avant de partir en direction de la place centrale.
Je restai là, seule, avec plus de questions que jamais.
La confrontation avec Gabriel résonnait encore dans mon esprit alors que je me glissais hors de la bibliothèque, le cœur lourd et l'esprit confus. Il y avait quelque chose qu'il ne me disait pas, quelque chose de bien plus sombre que ce qu'il voulait laisser paraître. Et cette fois, je n'allais pas simplement ignorer les signes. Je devais savoir.
Le lendemain matin, j'aperçus Gabriel à l'orée du camp, discutant avec Elias. Son visage semblait plus fermé que jamais, et son regard fuyait le mien à chaque fois que nos chemins se croisaient. J'en avais assez d'être tenue à l'écart. Prenant une grande inspiration, je décidai d'aller le confronter une fois de plus.
"Gabriel," appelai-je en m'approchant.
Il se retourna lentement, visiblement agacé par mon interruption. "Clara, ce n'est pas le moment."
"Ça ne l'est jamais, n'est-ce pas ?" répondis-je, les bras croisés. "Tu ne veux jamais parler, mais tu m'attends toujours à obéir aveuglément. Ça ne marche plus comme ça."
Son regard s'assombrit. "Tu ne comprends pas dans quoi tu te mêles."
"Alors explique-moi," insistai-je, en plantant mon regard dans le sien. "Parle-moi de cette malédiction, Gabriel. Parle-moi de ce qui te hante."
Il hésita un instant, le silence entre nous devenant presque insupportable, avant de soupirer lourdement. "Certains secrets doivent rester enterrés, Clara. Si tu les déterres, tu pourrais causer plus de mal que de bien."
"Et si ce n'est pas le cas ?"
Sa mâchoire se contracta, mais il finit par détourner le regard. "Je ne peux pas te dire ce que tu veux savoir."
"Pourquoi ?" demandai-je, ma voix tremblant sous l'effet de la frustration.
"Parce que tu n'es pas prête," dit-il finalement. "Et parce que certaines vérités ne feront que te blesser."
Je restai figée, choquée par ses mots. Ce n'était pas seulement une question de confiance ; c'était une question de contrôle. Gabriel voulait me protéger, mais à quel prix ?