Chapitre 3 Le bal masqué

Le crépuscule enveloppait la villa Mbaye dans un voile doré, rehaussant la beauté majestueuse de cette demeure nichée au cœur d'un quartier huppé de Wanga. Construite avec un mélange harmonieux de pierres blanches et de bois précieux, la villa s'élevait sur trois étages, ses fenêtres à meneaux reflétant les lueurs du soleil couchant. Les vastes pelouses parfaitement taillées s'étendaient tout autour, ponctuées de parterres de fleurs exotiques, soigneusement agencés par un jardinier expert.

Un imposant portail en fer forgé gardait l'entrée, tandis qu'une allée bordée de statues antiques menait directement à la porte principale.

Ce soir-là, la villa débordait d'animation. Les voitures de luxe défilaient devant l'entrée, déposant des invités élégamment vêtus. À l'intérieur, la grande salle de fête était métamorphosée en un écrin de lumière et de couleurs. De grands lustres en cristal pendaient du plafond voûté, diffusant une lueur douce qui dansait sur les murs recouverts de tentures pourpres. Des bouquets somptueux de roses et de lys blancs ornaient chaque recoin, remplissant l'air de leur parfum enivrant.

Les invités, masqués selon la tradition du bal, se mêlaient dans une valse de soie, de velours et de dentelle. Les masques, tous plus artistiques les uns que les autres, cachaient partiellement les visages, ajoutant une aura de mystère et d'intrigue à cette soirée déjà enchanteresse. Des rires discrets, des conversations animées, et le tintement des coupes de champagne remplissaient l'air, tandis que l'orchestre, installé au fond de la salle, jouait une mélodie envoûtante.

Isabelle Mbaye portait une somptueuse robe de soirée longue, d'un bleu nuit profonde, qui semblait capturer la lumière à chaque mouvement. Le tissu, délicatement satiné, épousait ses courbes avec élégance, accentuant sa silhouette élancée. Le décolleté en cœur, subtilement orné de petites perles scintillantes, ajoutait une touche de raffinement sans être ostentatoire. La robe s'évasait légèrement à partir de la taille, avec un effet drapé qui tombait en cascade jusqu'au sol, évoquant une allure à la fois royale et mystérieuse. Une fine ceinture argentée marquait sa taille, tandis que ses épaules étaient sublimées par des bretelles délicatement perlées.

La tenue était complétée par un masque assorti, également bleu nuit, brodé de fils d'argent avec des motifs floraux, laissant juste entrevoir ses yeux noirs perçants. Ses cheveux, soigneusement relevés en un chignon sophistiqué, laissaient tomber quelques mèches ondulées encadrant son visage, ajoutant une touche de douceur à son allure majestueuse. Les quelques bijoux qu'elle portait, discrets mais d'une élégance rare, complétaient l'ensemble avec une harmonie parfaite. Nonobstant cette allure, Isabelle se tenait à l'écart, observant la scène avec un sourire poli. Cette soirée mondaine, bien que somptueuse, n'était pas son milieu de prédilection. Fille d'une grande beauté, Isabelle était une jeune femme noire au teint éclatant, dotée d'un regard perçant qui trahissait une intelligence vive et une détermination à toute épreuve. Elle avait hérité de la grâce naturelle de sa mère et du charisme de son père, mais c'était son esprit indomptable qui la distinguait véritablement.

Journaliste d'investigation, Isabelle s'était forgée une réputation en fer dans un milieu où il n'était pas facile de se faire une place. Brillante, curieuse, et dotée d'un sens aigu de la justice, elle avait couvert des affaires qui auraient effrayé plus d'un homme. Sa plume était acérée, ses articles révélaient des vérités enfouies sous des couches de mensonges, et elle n'avait jamais reculé devant un danger, pas même face aux menaces qui étaient devenues son quotidien. Mais ce soir-là, le danger semblait venir d'une autre source.

Soudain, Isabelle sentit un regard insistant sur elle. Ce n'était pas un regard admiratif ou curieux comme ceux auxquels elle était habituée dans ce genre de soirées, mais plutôt un regard inquisiteur, presque inquiétant. Elle parcourut la pièce du regard, cherchant à identifier la personne qui l'observait avec une telle intensité.

N'y tenant plus, elle quitta la grande salle pour prendre l'air dans le jardin. Le contraste entre l'agitation de la fête et le calme apaisant du jardin était frappant. Les allées pavées, bordées de buissons taillés avec précision, serpentaient entre les arbres centenaires aux branches lourdes de feuillage. Des lanternes de fer forgé, disséminées çà et là, projetaient une lumière douce et chaleureuse, éclairant les bancs de marbre et les statues élégantes qui ponctuaient ce havre de paix.

Mais le sentiment d'être observée persistait. Elle se retourna brusquement, prête à affronter celui qui la suivait.

« Je ne sais pas qui vous êtes, mais je vous conseille de cesser immédiatement de me suivre ! » lança-t-elle, la voix teintée d'agacement.

L'homme sortit de l'ombre, s'approchant d'un pas calme mais assuré. Son visage, désormais éclairé par une lanterne proche, était celui de Krist. Ses traits, durs et taillés, exprimaient une confiance inébranlable.

« Je suis Krist, » dit-il simplement, sans chercher à masquer le ton grave de sa voix. « Votre garde du corps. »

Les yeux d'Isabelle s'écarquillèrent, son irritation se mêlant à l'incrédulité. « Un garde du corps ? Je n'ai jamais demandé de garde du corps, encore moins pour être espionnée dans mon propre jardin ! »

« Votre père en a décidé autrement, » répondit Krist, impassible.

« Mon père ! » Isabelle fit volte-face, ses talons claquant sur les pavés alors qu'elle retournait vers la villa. « Je vais lui parler tout de suite. »

Elle retrouva son père, Monsieur Richard Mbaye, en pleine discussion avec son oncle Édouard, un homme à l'apparence stricte et aux cheveux légèrement grisonnants. Le voir ainsi, détendu, contrastait avec l'agitation qu'elle ressentait. Sans préambule, elle s'adressa à lui, la voix tranchante.

« Papa, tu n'as pas le droit de m'imposer un garde du corps sans me consulter ! Je n'en veux pas et je n'en ai pas besoin ! »

Richard Mbaye la regarda avec patience, mais il y avait dans ses yeux une détermination égale à celle de sa fille. « Isabelle, c'est pour ta sécurité. Tu sais très bien que ton travail te met en danger, et je ne peux pas rester sans rien faire. »

« Ma sécurité ? J'ai toujours su gérer ces situations. Et puis, un garde du corps ne fera que m'attirer plus d'ennuis ! » répliqua-t-elle, croisant les bras avec une expression de défi.

Édouard, qui observait la scène en silence, échangea un regard complice avec son frère avant d'intervenir. « Isabelle, nous savons à quel point tu es compétente. Mais parfois, il faut admettre qu'un peu d'aide n'est pas un signe de faiblesse. Krist est l'un des meilleurs, tu n'as rien à craindre avec lui. »

Mais Isabelle, visiblement contrariée, bouda et tourna les talons sans un mot de plus. Elle quitta la pièce, décidée à s'éloigner de cette situation qui la mettait en colère.

Monsieur Richard se tourna vers Krist, un sourire rassurant sur les lèvres. « Gardez un œil sur elle, Krist. Elle est têtue, mais elle finira par comprendre. »

Krist hocha la tête, puis se dirigea à nouveau vers le jardin. Il était sur ses gardes, ses sens en alerte alors qu'il s'avançait sous les arbres éclairés. Mais lorsqu'il arriva à l'endroit où il avait vu Isabelle quelques minutes plus tôt, une étrange sensation le saisit. Le silence était devenu lourd, presque oppressant. Isabelle n'était plus là.

Soudain, un bruit sourd brisa le silence. Krist se retourna juste à temps pour apercevoir une silhouette s'éloigner à toute vitesse, portant Isabelle dans ses bras, inconsciente. Sans perdre une seconde, Krist se lança à leur poursuite, son cœur battant à tout rompre.

            
            

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