Lorsque je levais la tête discrètement vers lui, je vis qu'il m'observait déjà. Un frisson inhabituel me chatouilla la nuque, comme s'il venait de me toucher la nuque avec son simple regard. Je restait pétrifiée face à sa prestance. Lorsqu'il leva un sourcil, sûrement surpris que je ne baisse pas les yeux pour une fois, je crus voir sa bouche s'ouvrir pour articuler quelque chose mais l'arrivée du bus le déconcerta. Pas un son ne sorti de sa bouche.
Il fronça les sourcils visiblement agacé mais eu la gentillesse de me laisser passer avant lui. Sans réclamer mon dû et après un minuscule et quasiment silencieux "merci" je m'assis à la première place qui s'offrait à moi à l'avant du bus.
Durant ce week-end passé chez moi en compagnie de Katy, j'avais renoncé à essayer de le comprendre, cela ne faisait que m'embrouiller l'esprit.
Icare quant à lui, continua son chemin normalement et prit place tout au fond du bus. J'étais impatiente de retrouver Katy et les jumeaux. À la descente du bus, je vis Garett et Victor qui m'attendaient de pied ferme. Je n'eus même pas le temps de les saluer, qu'ils m'attrapèrent chacun un bras pour me tirer de force je ne sais où, Icare lui, suivait le pas derrière nous.
- Coucou les garçons, moi aussi je suis contente de vous voir, mais on va où comme ça ?
Ils m'ignorèrent totalement. J'étais déjà épuisée par leur comportement, et dire que j'allais passer quatre jours avec eux...
Je voulus m'énerver lorsque je compris enfin où nous nous dirigions. Nous arrivâmes devant un groupe d'élèves que je reconnus comme étant ma classe. Mademoiselle Hélène me vit, et afficha son plus grand sourire. Derrière elle, se trouvait Katy, qui trépignait d'impatience.
- Aaahh ! Voilà les retardataires, un peu plus et nous partions sans vous ! Lança notre enseignante en soupirant.
Je n'avais pas réalisée que j'étais si en retard que ça. Tout le monde m'attendait, enfin NOUS attendait, moi et Icare. J'étais embarrassée à l'idée d'avoir fait patienter autant de personnes. Je lançai un regard discret en direction d'Icare, cette situation ne semblait pas le déranger plus que ça. Il arborait une expression beaucoup plus neutre que tout à l'heure, ses poings étaient desserrés. Il me fixait étrangement, comme s'il s'attendait que j'explique les choses moi-même. Je n'y prêta pas attention et m'empressai de m'excuser auprès de mademoiselle Hélène.
- Excusez-nous, notre bus a pris du retard...
Il fallait que je parle à sa place ? Tss... Il ne manquait pas de culot celui-là.
- Ne t'excuse pas, l'essentiel c'est que vous soyez là après tout !
Elle n'avait pas tort. Katy me rejoignit afin de m'annoncer qu'elle voyagerait assise aux côtés de Garett.
- Tu es sûre que ça ne te dérange pas Lydia ?
- Oui, ne t'en fais pas pour moi, c'est qu'un trajet en bus d'une vingtaine de minutes, la rassurai-je et puis, je suis sûre que Victor sera de bonne compagnie.
L'intéressé me regarda d'un air gêné avant de prendre la parole.
- Hum.. En fait, j'avais déjà prévu de me mettre avec Emily... Mais tu sais, je peux toujours ...
- Non ! Le coupai-je, ne t'inquiète pas, comme je l'ai dit à Katy, ce n'est qu'un trajet en bus, il n'y a pas mort d'homme.
Cette dernière lui lança un regard noir. Je la vis commencer à ouvrir la bouche pour l'engueuler mais mademoiselle Hélène lui coupa la parole.
- Bien, maintenant que tout le monde est là, nous allons monter à bord du bus, le premier que je surprends à bousculer tout le monde, aura affaire à moi. Dit-elle avec un petit sourire narquois. La classe monta alors dans le bus deux par deux, voulant à tout prix éviter de s'attirer les foudres de notre enseignante.
Comme prévu, Katy s'installa à côté de Garett. Je voulus m'asseoir sur le siège juste derrière eux, mais je vis que Victor y était déjà installé. Il devait sûrement attendre Emily... Je me résignais donc à aller au tout au fond du bus. Je devais quand même avouer que même si je feignais l'indifférence, le fait d'être toute seule me peinait quelque peu... Je n'aimais pas vraiment la solitude, voir même pas du tout. Cependant, je ne voulais pas être une sorte de boulet que l'on traîne avec obligation.
Je pris place sur mon siège et attendis que le bus ne commence sa course. Ce qu'il fît, au bout de quelques secondes. Je rêvassais, tête contre vitre, lorsqu'une voix suave et mélodieuse attira mon attention.
- Tu n'as pas l'air très joyeux dis-moi...
Je tournai la tête pour faire face à mon interlocuteur lorsque j'aperçus Icare, là, assis à côté de moi. Je me figeais net. Je ne comprenais pas ce qu'il faisait ici... Ce matin il n'avait pas osé s'exprimer, pourquoi diable s'assoirait-il à côté de moi maintenant ?
- I... Icare ? !
L'intéressé parut intrigué, il arqua un sourcil avant de me répondre avec un sourire des plus ravageurs.
- Hum... Oui, à moins que je sois quelqu'un d'autre, mais ça m'étonnerait.
À la vue de son visage aussi proche du mien, mon cœur rata un battement. Je pouvais clairement sentir mes joues s'empourprer à une vitesse folle, ma peau commençait à chauffer. Je devais me calmer, ou il allait me prendre pour une cinglée ou pire... Comprendre que j'ai un petit faible pour lui. Je ne devais pas penser à son odeur si envoûtante, sa voix angélique, son regard qui me faisait fondre et à son sourire qui découvrait légèrement ses dents d'une blancheur absolument parfaite. Il semblait sortir tout droit d'un conte de fée...
Reprends-toi Lydia, arrête de t'extasier devant lui. Mon cœur battait à toute allure, je ne pouvais pas m'arrêter de trembler. Pourquoi me faisait-il cet effet-là ? ! C'était insupportable.
- Et pourquoi est-ce que tu es... Là ?
- J'ai vu que tu étais assise seule, sans tes amis, je me suis dit que tu voudrait un peu de compagnie pour le trajet, ça ne te dérange pas au moins ? Je peux toujours.... finit-il en commençant à se lever
- Non pas du tout ! M'empressai-je de répondre peut être, avec un peu trop d'enthousiasme.
Je le vis se rassoire en souriant bêtement comme un enfant. Brrr... C'était quoi cette sensation étrangement agréables que j'éprouvais lorsqu'il était près de moi ?
- Tu sens vraiment très bon Lydia.
Non. Il ne pouvait pas faire ça. Mon cœur allait lâcher à tout moment. Me complimenter était une chose ! Mais dire prénom avec autant sensualité en était une autre. J'étais certaine de virer au rouge fluo si je ne me reprenait pas très vite.
- M...Merci, bafouillais-je encore sous l'effet de surprise de l'enchaînement des récents événements. C'est le parfum que ma petite sœur a fabriquer avec sa classe alors... Je n'ai pas du le choix !
Il semblait... Différent. C'était la première fois que je le voyait sourire aussi longtemps. Était-ce un vrai sourire pour une fois ? Et enfin pourquoi il ne parlait jamais de la sorte avec n'importe qui d'autre ?! Je mourais d'envie de lui poser ces questions... Cependant il m'intimidait tant que je n'eu tout simplement pas le courage.
- Du parfum ? Je n'en sens pas une goutte sur toi pourtant, affirma-t-il en rapprochant son visage un peu plus prêt pour me sentir davantage.
Une violente décharge electric dans mon bas ventre me fit me courber en deux, me penchant en avant retenu par la ceinture.
C'était quoi ça ?!
- Lydia ? Ça va ?! Tu vas...
Plus aucun son ne sortait de sa bouche. Lorsque je tournais la tête enfin vers lui. Je vis ses yeux s'ecarquiller d'une drôle de façon. J'aurais jurée voir ses pupille se dilater automatiquement, faisant assombrir le reste de son iris.
Lorsque je sentis des gouttes couler sur ma main, je compris d'où venait son expression de surprise. Mon nez saignait quelque peu.
- Oh, mince ! La vue du sang te dérange ? Je suis désolée ! Dis-je en me dépêchant de sortir un paquet de mouchoir afin de stoper le léger écoulement en me tournant coter vitre pour lui épargner un spectacle sanglant dégoûtant.
Je remarquai qu'il ne semblait pas vouloir répondre à ma question. Le sang est la phobie de certaines personnes, c'était probablement son cas...
- Tout... Vas bien? Demandai-je innocemment en le regardant curieusement.
Il me répondit en hochant de la tête avant d'ouvrir la bouche enfin.
- Oui. Ne t'en fait pas pour moi. J'espère que toi tu vas bien... Tu m'as juste surpris, se défendit-il en détournant son regard.
J'étais folle de joie de faire le trajet en compagnie d'Icare. J'allais pouvoir en apprendre un peu plus sur lui. Du moins, c'était ce que je croyais... La vingtaine de minutes que j'avais prédite pour le trajet en bus, c'était transformé en une bonne heure. Bon je n'allais pas m'en plaindre, cela m'avait permis d'apprendre au moins une chose sur Icare : il avait le mal des transports, quelques minutes après notre discussion, il passa le reste du trajet la tête dans un sac, vraisemblablement prêt à vomir à tout moment. Ce qui m'arracha un petit rire.
Le bus termina sa course à l'entrée d'un sentier qui s'enfonçait dans la nature luxuriante de la forêt. Il était environ neuf heures dix. Mademoiselle Hélène pria tout le monde de l'attendre à la sortie du véhicule. Elle fut la dernière à en descendre, avant de remercier le chauffeur et de se tourner dans notre direction.
- Nous y sommes, nous devons marcher encore quelques minutes pour atteindre le camp qui vas nous accueillir durant notre séjour.
Elle se plaça en tête de file et nous commençâmes notre marche. Je ne pus apercevoir Katy, ni Garrett ou son frère. Ils devaient probablement être au-devant du rang. Je soupirai... Ils ne m'avaient pas attendue... Heureusement qu'Icare était avec moi, je me sentais moins seule. Posant instinctivement mon regard sur lui, pour voir s'il allait mieux. Une chose me frappa, la couleur de ses yeux, ils étaient passés du doré fatigué de tout à l'heure à un vert plus ou moins sombre...
Il marchait d'un pas rapide, comme s'il cherchait à fuir quelque chose. Ce quelque chose c'était moi ?... Mais non, j'avais tendance à m'affoler pour un rien, ça devait sûrement être mon imagination. Je suivie son rythme pour ne pas trop m'éloigner de lui, mais me risqua tout de même à lui poser une question.
- Tu marches un peu vite, non ?
Il posa son regard sur moi, avant de serrer ses poings et de baisser rapidement les yeux afin de fixer le sol. Il m'ignorait. Encore. Ça n'allait pas se passer comme ça. J'étais décidée à le faire réagir.
- Icare ! Dis-je en lui donnant un petit coup d'épaule pour obtenir une réponse.
- Désolé... Finit-il par lâcher au bout de quelques secondes de silence. J'étais distrait !perdu dans... de mauvaises pensées.
Des mauvaises pensées ? Une partie de moi fut soulagée d'entendre ces mots. Pas que je sois heureuse qu'il ait des problèmes, mais cela le rendait plus... Humain. Cela me rassurait d'entendre qu'une personne comme lui, pouvait aussi avoir quelques mauvaises passes. Cependant, même si c'était lui, je n'aimais pas voir les gens mal. Je m'empressai de lui répondre.
- Des mauvaises pensées ? Tu veux en parler ... Peut être ?
- Ne t'en fais pas, ce n'est rien de bien méchant et puis c'est assez personnel tu comprends ?
D'un air gêné il plaça sa main derrière sa tête avant de me sourire timidement. Il avait l'air embarrassé. Plus les minutes passaient, plus le silence régnait. C'était gênant. Cependant, quelque part je m'estimais heureuse d'être en sa compagnie. Il y avait en lui une part de mystère et un calme que je trouvais particulièrement attirant.
Nous arrivions au camp, après une quinzaine de minutes à marcher dans cette forêt verdoyante sous les fort rayons du soleil. Heureusement que j'avais mon petit short spécial pour ce genre d'occasions. C'est alors que mademoiselle Hélène regroupa la classe pour annoncer notre arrivée.
Deux grands totems de bois, taillés avec précision, étaient reliés par une pancarte ou était inscrit : Camp GreenWood. Derrière cela, un petit pont, en bois également, rejoignait l'autre rive qui était séparée de là où nous étions par un imposant cours d'eau.
On pouvait apercevoir plusieurs sortes de cabanons, sûrement nos logements pour la nuit, éparpillés juste après le petit pont. Cependant, la forte végétation y restait présente, que ce soit sur les murs des cabanons ou sur le petit chantier qui s'enfonçait plus loin dans le camp, tout cela était recouvert de plantes grimpantes ou de fleurs tropicales en tous genres. C'était très joli à voir. Je n'arrivais pas à croire que nous allions passer plusieurs jours ici.
A peine arrivée, notre enseignante jeta littéralement son sac de randonnée au pied d'un totem avant de se retourner dans notre direction en sautillant. Elle débordait d'énergie, son visage affichait un sourire des plus radieux, quant à son corps, elle ne pouvait pas l'empêcher de gigoter dans tous les sens. L'étrange collier en forme de plume qu'elle portait à son cou n'allait pas tenir bien longtemps si elle continuait de bouger ainsi.
- Voilà ! Nous y sommes enfin ! Dit-elle débordante d'excitation. C'est ici que nous allons rester durant ces quatre jours. Alors, encore un peu de patience, je vais vous montrer où nous allons dormir.
Elle reprit son sac et traversa le pont, suivie de l'ensemble de la classe. Elle emprunta le sentier que j'avais vu plus tôt et nous mena au pied d'un arbre gigantesque.
- Whaaoow ! M'exclamais-je.
C'était un spécimen magnifique. Cet arbre devait être âgé de cent ans au moins. Icare qui avait observé la scène juste derrière moi, ne put retenir son rire melodieux.
- Qu'est-ce qu'il y a de drôle ? M'offusquai-je
- Rien, on aurait dit que c'est la première fois que tu voyais un arbre, désolé, mon rire est sorti tout seul.
Au moins j'aurais réussi à lui décrocher un petit rire. Il était bien plus beau lorsqu'il souriait. Je n'osai pas lui répondre et pourtant le désir de caresser ses lèvres avec les miennes était bien là...Calme toi Lydia ! Ça suffit.
Mademoiselle Hélène nous laissa quelques minutes, avant de revenir avec un moniteur qui se prénommait Jackson. Tous deux avaient les bras chargés de sacs bleus.
- Bien, fit-elle, nous allons installer les tentes pour notre séjour.
Elle déposa au pied de l'arbre l'ensemble des sacs qui devaient contenir nos tentes, que le campement devait sûrement nous prêter. Tout le monde lâcha un râle, on espérait tous passer nos nuits dans ces cabanons que l'on avait vu plus tôt. Mais elle ne se laissa pas décourager par les remarques de quelques adolescents mécontents.
- Ce sont des tentes très faciles à monter, vous serez au maximum deux par tente, donc prenez la vôtre et allez la monter. Elle enchaîna. Mais pour ce faire, toutes les filles se placent à ma droite, quant aux garçons, placez-vous à gauche. Nous n'allons pas former de camp mixte, sait-on jamais.
Elle venait de terminer sa phrase par un clin d'œil chargé de sens qui, j'en étais certaine n'échappa à personne. Je tournai alors la tête pour saluer Icare, mais ce dernier était déjà parti rejoindre le groupe des garçons, sans se retourner.
Durant la formation des deux parties, je retrouvai Katy qui s'excusa de ne pas m'avoir attendue lors de la descente du bus. En peu de temps, les groupes étaient formés. Notre professeur, nous distribua nos tentes une à une, avant de tracer une ligne au sol avec un bâton. Le message était clair : chacun doit rester de son côté, seuls nous séparaient une branche d'une finesse ridicule et le fameux emplacement du feu de camp, qui était pile au milieu des deux parties.
Sous les directives de mademoiselle Hélène, tout le monde s'attaqua au montage de tente. Chose close en une vingtaine de minutes, la majorité des adolescents s'en étaient plutôt bien sortie.
- Bien, voilà une bonne chose de faite ! Elle regarda sa montre avant d'enchaîner. Il est dix heures, alors je vous donne quartier libre jusqu'au repas à onze heures trente, cependant ne dépassez pas les limites du camp.
Génial ! Un peu de temps libre avant de devoir travailler, rien de mieux pour ce motiver.