Quand je suis sorti de la voiture et que j'ai commencé à m'approcher d'elle, elle a semblé sursauter, presque comme si elle avait peur. Avant même que je puisse lui dire un mot, elle a pris la fuite, laissant derrière elle un vide inexplicable.
Maintenant, je suis assis seul dans le grand salon de ma maison, le silence pesant me dérangeant plus qu'il ne l'a jamais fait auparavant. La femme mystérieuse de la rue hante mes pensées, son image gravée dans mon esprit.
Je me lève et traverse la pièce, les pas résonnent dans le silence. Je m'arrête devant la porte d'une chambre, mon cœur se serre en tournant la poignée.
L'intérieur de la pièce est doux et chaleureux, rempli de jouets et de petits vêtements. Au centre, se trouve un berceau, dans lequel dort paisiblement mon fils de six mois.
En regardant mon fils endormi, je ne peux m'empêcher de penser à Elle. Elle aurait dû être ici avec nous. Elle aurait dû voir notre fils grandir. Mais la vie en a décidé autrement.
En me tournant, j'attrape une photo sur la commode. C'est une photo de nous deux, prise à notre mariage. Elle était belle, rayonnante, avec un sourire qui pouvait illuminer même les jours les plus sombres. Et maintenant, tout ce qui reste d'elle, c'est cette photo et le petit garçon qui dort paisiblement dans la pièce à côté.
La femme dans la rue, elle portait une ressemblance troublante avec Lydia. Ce n'était pas une copie conforme, plutôt une écho distant, une réverbération d'un souvenir sur le mur de mon esprit. Sa silhouette, d'une grâce légère et fluide, se mouvait comme Lydia le faisait. Ses yeux, bien qu'une nuance différente, avaient cette intensité familière. Les traits de son visage, bien distincts, dessinaient une toile de douceur et de résilience qui me rappelait Lydia.
C'était presque comme si quelqu'un avait essayé de peindre une version de Lydia, mais avait décidé de laisser certaines couleurs sur la palette. Comme si un artiste avait tenté de capturer son essence, mais en réinventant la façon de la représenter.
Il y avait cependant une différence flagrante. Lydia avait des cheveux blonds, des mèches dorées qui semblaient toujours capturer la lumière du soleil d'une manière magique. La femme que j'avais rencontrée aujourd'hui avait, quant à elle, des cheveux d'une teinte plus sombre, qui me rappelaient le chocolat fondu ou le bois de chêne.
Peut-être que c'est cela qui m'avait intrigué. Elle n'était pas une duplication exacte de Lydia, plutôt une version alternative. Comme une mélodie familière interprétée avec des instruments différents. Une chanson que je connaissais par cœur, mais chantée par une voix que je n'avais jamais entendue auparavant.
Je secouai la tête, essayant de chasser ces pensées. C'était absurde. Les personnes ne sont pas des chansons ou des peintures. Et je ne devrais pas comparer une étrangère à ma défunte épouse. C'est injuste pour nous tous.
Pourtant, alors que je me tiens là, dans le silence apaisant de la chambre de mon fils, je ne peux m'empêcher de me demander qui elle est. Cette femme sous la pluie. Cette femme qui porte en elle un écho de Lydia. Cette femme qui, même si elle ne le sait pas, a déjà laissé une empreinte indélébile dans ma vie.
***
Le jour suivant est un combat, une guerre entre mon esprit et mon cœur. Elle hante chaque recoin de mes pensées, et malgré tous mes efforts pour chasser son image, je ne peux pas. Mon bureau, qui d'habitude est un lieu de concentration et de tranquillité, est devenu une scène de confusion.
Sarah, ma secrétaire, entre, tenant une pile de dossiers que j'ai demandés. D'habitude, je les feuilletterais immédiatement, mais aujourd'hui, je suis ailleurs, perdu dans mes pensées.
- Posez-les sur le bureau et sortez, je dis d'un ton acerbe, que je regrette aussitôt. Elle sursaute mais ne fait aucun commentaire, elle s'exécute rapidement et sort du bureau.
Juste avant qu'elle ne franchisse la porte, je l'arrête.
- Annulez tous mes rendez-vous pour aujourd'hui, je dis d'une voix à peine audible. Elle hoche la tête, manifestement surprise, avant de s'éclipser discrètement.
Je dois la revoir. Même si elle n'est qu'une vague ressemblance de Lydia, il me faut la revoir. Je contacte Jamal, mon fidèle chauffeur, lui demandant de me conduire à cette rue où je l'ai aperçue pour la première fois. Nous y passons des heures, à scruter chaque visage, chaque silhouette qui passe, dans l'espoir fugace de la retrouver.
La nuit commence à tomber, enveloppant la ville dans une obscurité mélancolique, et mon espoir commence à vaciller. C'est alors que je l'aperçois. Mon cœur se serre, me laissant presque sans souffle. Je ne peux pas simplement m'approcher, la prendre dans mes bras, la serrer contre moi.
Je sors de la voiture, la suivant à distance, telle une ombre. Je ne sais pas vraiment ce que je veux, je suis guidé par une pulsion inexplicable.
Soudain, je sens qu'elle a pris conscience de ma présence. Pour ne pas l'effrayer davantage, je me cache. Je sais que je devrais partir, la laisser tranquille. Mais je ne le fais pas. Je continue à la suivre jusqu'à ce que je remarque son anxiété, sa peur palpable. Je suis transpercé de remords.
Elle se réfugie dans un hôpital. Alors que je reste là, à l'extérieur, une promesse se forme dans mon esprit. Je vais tout faire pour en savoir plus sur elle, pour mettre fin à cette sensation qui me consume de l'intérieur. C'est là, dans l'ombre de l'hôpital, que je réalise l'ampleur de ce que je ressens, et de ce que je suis prêt à faire pour y mettre fin.