Je respire beaucoup plus sereinement lorsque je vois Aaron et Tyler dans la cour de l'école. J'imagine que Tyler ne sera sans doute pas content de me voir, vu à quel point il est en colère contre moi. Mais au moins je fais des efforts et s'il arrive à comprendre ça, c'est tant mieux. Je descends de la voiture et je marche lentement vers eux. Tyler se tient en face de Aaron et les deux discutent ensemble. Il parvient même à rire avec lui, chose qu'il n'a plus faite avec moi depuis le décès de sa mère. Je les regarde avec nostalgie, je retire ma cravate et ma veste et je les remets dans la voiture. Je marche jusqu'à eux d'un pas hésitant, Aaron est le premier à remarquer ma présence, il lève la tête vers moi et le fait remarquer à mon fils. Tyler s'arrête de parler et se tourne vers moi. Je me surprends à espérer un geste de sa part. Allez filston, cours vers moi, j'ai tellement besoin d'un geste de ta part je t'en supplie.
Ma prière tombe dans les oreilles d'un sourd, parce que Tyler reste auprès de son oncle et se contente juste de me regarder en chien de faïence.
" Salut mon chéri. "
" Salut. "
Juste un salut, aussi glacé que son regard. Je me contenterais de ça comme toujours.
" Tu n'es pas au travail ? "
Je reçois sa remarque comme un coup de poing en plein ventre. Mais je le mérite, surtout pour l'avoir délaissé après toutes ces années et m'être réfugié dans le travail.
" Non, je voulais voir mon fils plus que tout. "
" Eh bien moi, je ne veux pas te voir. " Dit-il en se tournant vers son oncle.
Je lève les yeux vers mon ami qui m'adresse un regard navré. Je le regarde et je souris tristement. Soudain une dispute éclate derrière nous. Elle est assez éloignée, mais grâce à mon ouïe plus que fine, j'arrive à entendre ce qui se dit. Je me retourne pour regarder le parent d'élève se plaindre de l'inefficacité de l'enseignant. Je suis presque admiratif face au calme de cette personne. D'ailleurs qui est-elle ? Je ne l'ai jamais vu. Je me fige soudain, les battements de mon cœur augmentent et ma respiration s'accélère. Non ! Ça ne peut pas être elle ! C'est impossible. Je referme les yeux et les ouvre à plusieurs reprises. Je regarde Aaron, il a ce sourire en coin sur les lèvres et ce qu'il m'a dit me revient en tête. Tu auras une surprise à ton retour. C'était ça la surprise ! Elle est ici, à quelques pas de moi. Mais comment est-ce possible ?
" Dis-moi que je rêve. " Murmurais-je.
" Non mon ami, tu ne rêves absolument pas. "
" Mais comment est-ce possible ? Et puis pourquoi ne m'as-tu rien dit ? "
" Et manquer de voir cette réaction ? Absolument pas, c'est bien la première fois que quelque chose te déconcerte à ce point. Le premier jour d'école, je suis venu accompagner le petit et je l'ai vu. "
Je continue de regarder la femme devant, l'animal en moi se met à gigoter dans tous les sens. C'est bien la première fois qu'une femme nous plaît autant à tous les deux.
" Calme-toi, j'arrive à entendre les battements de ton cœur jusqu'ici. " Me dit Aaron.
Je respire un bon coup et je continue de les observer de loin, de quoi peuvent-ils bien parler ? J'ai perdu le fil de la discussion lorsque mes yeux se sont posés sur elle. Ah oui ça y est punir un enfant. Je les écoute parler et j'admire son éloquence, elle ne se laisse pas désarçonner par cette femme venue défendre son fils. Mes pieds se mettent en marche tout seul, sans que je ne puisse rien y faire. Je me place juste derrière elle et je regarde la femme en face d'elle dans les yeux. Elle prend peur et décide de partir. Elle se tourne vers moi et me regarde droit dans les yeux. Instinctivement, je pense à elle allongée dans l'herbe, au bord de la jouissance, le regard marron prend une teinte assez particulière. Les battements de son cœur s'accélèrent et je vois le creux qu'elle a la gorge bouger de plus en vite. Arrive-t-elle à sentir tout ce sex-appeal qu'elle dégage ? Le directeur Morgan tend la main vers moi avec un sourire.
" Loreen, laissez-moi vous présenter Ethan Pierce. Le fondateur de cette école. Ethan voici Loreen, la nouvelle enseignante qui a pris en charge la classe de votre fils. "
Elle me tend la main, je la regarde pendant de longues secondes avant de la prendre dans la mienne. Je comprends tout de suite mon erreur lorsque nos mains entrent en contact. J'ai comme un électrochoc qui me parcourt l'ensemble du corps. Mon loup qui était agité, recommence à bouger de plus belle. J'ai comme l'impression que mon cœur va sortir de ma poitrine et se traîner au sol jusqu'à elle.
" Respire. " Me dit Aaron.
Il est resté derrière , mais j'ai entendu son conseil, j'aimerais bien l'y voir. Pourquoi suis-je dans cet état ? Que possède cette femme qui puisse me mettre dans un état pareil ? Un tourment intérieur.
" À cette allure, je vais finir par rencontrer tous les parents. J'avais prévu d'organiser une réunion d'élèves la semaine prochaine. Pour pouvoir tous vous rencontrer et parler de vos enfants. "
" C'est très bien... " Est la seule chose que je fus capable de dire.
J'attends le rire de Aaron derrière moi et mon fils qui lui demande pourquoi est-ce qu'il n'arrête pas de rire.
" Tu comprendras quand tu seras plus grand. "
Mon fils semble ne pas comprendre et c'est tant mieux pour moi. Comment lui expliquer que son père, alpha de la meute, perd ses moyens devant une femelle humaine.
" Euh très bien, dans ce cas, nous nous verrons donc la semaine prochaine. "
Sur ce elle tourne les talons et s'en va, je la regarde partir, mon loup s'agite et m'ordonne de la rattraper. Mais je ne peux pas, du moins pas maintenant. Je rebrousse chemin et je marche jusqu'à ma voiture, Tyler monte avec moi et Aaron monte seul dans sa pickup. Nous roulons jusqu'à l'entrée de State Garden. Je vois l'enseignante marcher devant nous en écoutant de la musique et en se déhanchant sans se soucier de qui pourrait la voir ou pas. Je l'imagine empalée sur ma queue se déhanchant de la même manière. Je grogne en fermant les yeux.
" Tout va bien papa ? "
J'ouvre brusquement les yeux, bordel ! J'ai oublié que mon fils était à mes côtés. Mais qui est cette femme ? Je prends la route jusqu'à chez nous et je roule environ sur encore cinq kilomètres. Mes sens sont immédiatement apaisés, je me sens immédiatement plus en sécurité au cœur de cette immense forêt qu'en dehors. Je gare ma voiture devant notre maison, un immense manoir en pierre, puis je me tourne vers Tyler.
" Ça te dirait qu'on aille au cinéma demain ? Tous les deux ? "
Il se recule contre la portière et me regarde comme si je lui avais fait une proposition indécente.
" Tu veux aller au cinéma avec moi ? Tu n'as pas du travail ou un autre truc plus important à faire ? "
" Tyler. " Dis-je dans un soupir. " Je suis conscient que ces dernières années, je n'ai pas été là pour toi. Mais, je suis en train de faire des efforts et je voudrais que tu me laisses une chance. "
Mon fils me regarde soupçonneux, puis il secoue la tête et descend de la voiture.
" Il y'a un super film sur les super-héros en plus, comment dire non. "
Il ferme la portière et court vers la maison. C'est sa manière à lui de me dire je viendrais avec plaisir. Mon fils tient beaucoup trop de moi. Je descends de la voiture en souriant. Ce soir, j'ai envie de passer du temps avec lui à faire de la cuisine et parler de football. Je me réjouis à cette idée. Je déchante rapidement lorsque je pousse la porte de ma maison et que je vois la table dressée et Shea me sourire.
" Surprise, je me suis dit qu'après ce long voyage, tu devais mourir de faim. "
Je regarde Shea sans savoir comment réagir, puis mon regard se pose sur mon fils qui me regarde avec des yeux plein de colère, j'essaye de lui faire comprendre que je ne savais pas qu'elle serait là mais il ne me laisse pas le temps de parler qu'il monte dans sa chambre en courant. Tout comme moi, il pensait que nous allions passer une bonne soirée juste tous les deux. Je suis autant déçu que lui.
" J'ai dis quelque chose qu'il ne fallait pas ? "
Je marche jusqu'à la table et je dépose mes clés.
" Que fais-tu ici Shea ? En plus comment as-tu fait pour entrer ? "
" J'ai pris une clé dans le trousseau. " Dit-elle le plus calmement possible comme si ce n'était rien.
Je regarde la brune plantureuse devant moi et j'ai juste envie de lui arracher la tête.
" Tu as pris mon double de clé sans ma permission ? "
Je fais un pas vers elle et elle recule, je pense qu'elle a senti le danger et que je pourrais bien la dépecer.
" Je me suis dit que ce serait une bonne idée et que je pourrai venir de temps en temps aider. "
" La clé ! "
Elle me donne la clé d'un geste tremblant et je la lance furieusement sur la table.
" On baise peut-être ensemble, mais cela ne te donne pas le droit de t'immiscer dans ma vie et de forcer les choses. Je t'ai baisé toi, comme j'aurais pu baiser n'importe qui d'autre. N'essaye plus jamais de prendre la place de ma femme ! "
Je la traîne jusqu'à la sortie et je la mets dehors en claquant la porte derrière moi. Je soupire puis je monte à l'étage pour parler à mon fils. J'hésite à entrer dans sa chambre, je regarde la porte close, puis je marche jusqu'à ma propre chambre. Je me déshabille, puis je me place à la fenêtre et je regarde la nuit tomber. Une envie irrépressible d'aller courir me prend, je saute par la fenêtre et j'atterris dehors. Je ferme les yeux et je me concentre. La transformation en loup peut-être volontaire comme en ce moment ou involontaire et ceci lorsque nous sommes pris d'un sentiment très fort qui nous empêche de nous contrôler. Comme la colère ou la peur, c'est pour cette raison que tout bon loup doit être en mesure de contrôler ce qu'il ressent, à cause de nos sentiments multipliés en quatre. Je laisse peu à peu le loup prendre la place de l'humain. La transition est douloureuse, chaque os du corps se brise et diminue. C'est impossible de s'habituer à cette douleur. Mais avec le temps on apprend à l'apprécier, parce qu'avec elle vient la liberté. Le loup est un animal sauvage libre. La pleine lune multiplie nos pouvoirs, plus de force, plus de vitesse, de rapidité. Mes ongles disparaissent pour laisser place aux griffes, ma peau laisse place à une fourrure noire. Une fois transformé, je me lance à toute vitesse à travers la forêt et je cours à en perdre haleine. Que c'est bon d'être soi, parce que oui, ça c'est ce que je suis, c'est ma vraie nature. Mon loup est guidé par un seul désir en ce moment et pour l'animal que je suis, cela m'est aussi vital que de respirer. Je sors du domaine. Je sais pourtant que je ne devrais pas sortir sous ma forme de loup, c'est moi-même qui ai instauré ces règles. Mais j'ai besoin de la voir. Je sors du domaine en courant et je me fie uniquement à mon odorat pour me conduire chez elle. J'arrive dans un quartier résidentiel, je me faufile entre les maisons. J'aperçois ma magnifique institutrice par l'une des fenêtres, elle défait ses cheveux et se masse le crâne. J'imagine mes mains dans ses boucles frisées, j'imagine mes mains sur plusieurs parties de son anatomie. Elle stoppe son geste et se tourne précipitamment vers la fenêtre. Je disparais en courant dans la nuit et je rentre chez moi. M'a t'elle vu ? Impossible ! J'ai fait très attention. Alors pourquoi a-t-elle réagit comme si elle avant senti ma présence ?