Aujourd'hui, j'irai prendre mes tenues chez la couturière. Tonton me l'a fait savoir hier pendant le repas.
- Tonton : Jenny, demain tu iras retirer tes tenues chez la couturière. Tu peux y aller seule non ?
Avant que je n'ai pu prendre la parole, tata Martine avait déjà acheté la réponse
- Tata : et pourquoi ne le pourrait t elle pas ? Elle est assez grande
- Tonton (exaspéré) : toi aussi, nous y sommes allées à deux reprises. La dernière fois, c'était pour les essayages.
- Sophie : papa c'est chez Mme KOUKOU ?
- Tonton : oui
- Sophie (en posant sa main sur mon bras) : t'inquiètes. J'irai avec toi
- Esther : c'est ça ! dorlotez là et vous verrez quel effet ca fera
- Tonton : je trouve qu'elle est assez éveillée
- esther ; normal au village, si tu paresses, ta vie va ressembler à quoi ?
- Moi : (avec vigueur) : est ce que c'est un péché de venir du village ? Qu'as-tu à me le répéter tout le temps ? je suis fière de mes origines
J'ai dis tout cela d'une traite sans me rendre compte que j'ai haussé le ton. Tout le monde est resté figer d'autant plus que c'est la première fois que je sorte de mes gonds. Esther est restée la bouche ouverte. Une mouche pouvait y trouver son chemin.
- Sophie : bien fait pour toi
- Tata (de répliquer) : je ne veux pas d'éclats de voix à table
- Tonton : bon calmons-nous et finissons le repas. Sophie accompagnera Jenny.
Nous avons fini le repas dans un mutisme total. Je revois encore la scène défilé devant mes yeux lorsque j'entends les pas. J'attends que la personne se signale par une salutation mais rien. Je continue mon travail sans prêter attention à celle qui est derrière moi lorsque le bruit de la chaise se fait entendre. Je me redresse et voit Esther qui vient de casser la chaise en bambou qui était sur la véranda. Elle se lève et veut entrer à l'intérieur
- Moi : (en la hélant) : esther, esther
Elle se retourne d'un air dédaigneux
- Esther : c'est quoi ?
- Moi : la chaise que tu viens de casser qui selon toi va ramasser les débris ?
- Esther : hum toi bien sûr
- Moi : et pourquoi moi ? est ce que c'est moi qui l'ai cassée ?
- Esther ; et pardon le matin comme ça, il faut m'excuser. Tu es entrain de balayer. Donc ramasses tout ca
- Moi : je ne suis pas ton esclave hein
- Esther : (claquant les mains) ah oui la villageoise sort déjà ses griffes. Tu pouvais parler fort comme ca dans ton village ?
- Moi : (sentant la fumée sortir par les narines) si je le faisais et plus encore en tapant les filles qui me manquaient de respect
- Esther : ce n'est donc pas le lieu ici et en plus c'est toi qui me dois le respect. Je te donne donc l'ordre de ramasser cela.
- Moi : dans tes rêves madame
- Esther : ok c'est ce que nous allons voir
Elle entre dans la maison. Je continue ma tâche lorsque je sens une tape sur mes fesses.
- Moi : aie c'est qui ça en me retournant
Je vois tata Martine. A côté d'elle se tient Esther qui a un sourire en coin.
- Tata : (en s'adressant à Esther) : c'est ca ici ?
- Esther : oui maman
- Tata : (se tournant vers moi) : donc tu es venue détruire les choses dans ma maison ?
- Moi : non tata ce n'est pas....
- Tata : tais toi fermes moi ta bouche là. Je ne suis même pas sûr que tu l'aies brossée avant de sortir de la chambre
Je reste muette comme une carpe. Hum Meuma je souffre quoi ici ? mieux je restais avec toi
- Tata : je te parle et tu ne dis rien
- Moi : tata tu m'as demandée de ne plus parler
- Tata :c'est ça même. Saches que tu n'auras pas de repas aujourd'hui pour avoir casser ma chaise. C'était le souvenir de mon défunt père
- Moi : tata, je ne l'ai pas cassée. C'est Esther qui veut me faire porter le chapeau
- Esther : (bondissant sur moi) : laisses mon nom en paix tu entends. Petite menteuse
Tonton Claude revient de son footing et pousse le portail. Il est éberlué par la scène qui se présente sous ses yeux. Esther essayant de me molester et moi m'agrippant à elle
- Tonton : c'est quoi tout ce bazar là hein ?
Il s'approche de nous et réussit à maîtriser Esther. Je me redresse et réajuste mon cabas.
- Tonton : vous croyez que vous êtes dans un champ ici ? etant à l'extérieur, je vous entends crier
Il s'adresse à sa femme
- Tonton : mais Martine les filles se crêpent le chignon et tu ne fais rien ?
- Tata Martine : Esther dit que c'est Jenny qui a cassé la chaise en bambou qui était ici et Jenny dit le contraire
- Tonton : La discussion porte sur une chaise ? mais tout est vanité. Les meubles se cassent nous pouvons les remplacer mais l'être humain ne revient jamais. Alors, je ne veux plus en entendre parler
Il se retourne et entre directement dans la maison. Tata le suit en traînant le pas. Je comprends qu'elle soit fâchée mais elle devait me demander ma version des faits. Elle est arrivée au point de vouloir m'interdit la nourriture. Eh dire qu'au village, je mangeais à satiété. Je continue mon balayage pendant qu'Esther fiasque et s'en va à son tour. Elle croit que je vais me laisser faire. Elle m'a montrée son sale caractère. Je vais me comporter avec elle de la même façon qu'elle me traite. Je finis mon travail et entre dans la maison. Sur la pendule, je peux lire qu'il est déjà sept heures du matin. Je passe un coup de balai à la cuisine et va nettoyer la salle de bains. Je fais presque tout dans cette demeure. Cela ne me dépasse pas parce que mami m'a tout appris. Pendant que je lave, la porte s'ouvre sur celle que vous connaissez.
- Esther : (d'un ton autoritaire) sors je voudrais me laver
- Moi : (posée) : tu vas attendre que je termine ce que j'ai commencé
- Esther : tu me parles comme ca pourquoi ?
- Moi : parce que tu n'es pas polie et tu n'es pas de patiente. Donc, tu vas attendre gentiment dehors
- Esther : pfffff n'importe quoi
Fatiguée de son bavardage, je rabats la porte et je continue ma besogne. Elle tambourine sur la porte sans marquer un temps arrêt tout en criant
- Esther : ouvres moi cette porte. Tu me fermes la porte au nez ? tu es qui ? tu penses faire la loi ici ? Petite villageoise comme ça
Je fais la sourde oreille et finit de nettoyer la baignoire. Lorsque j'ouvre la porte, elle est là debout avec sa serviette et tape le pied au sol. Je passe devant elle sans lui prêter de l'attention. Je vais dans la chambre. Yeuch Sophie et le sommeil, c'est quelque chose hein. Je m'assieds sur le lit et pose doucement ma main sur son épaule pour la réveiller.
- Moi : sophie, sophie
- Sophie : ..............
- Moi : il fait déjà jour ma belle
- Sophie : hum j'ai encore sommeil
- Moi : je sais, toi tu as toujours sommeil le matin. Lorsque les classes vont commencer, tu feras comment ?
- Sophie : (ouvrant péniblement les yeux) : tu seras là non ?
- Moi : donc suis ton réveil ?
- Sophie : oui
- Moi : tu dois aller laver tes vêtements que tu as trempé hier avant que tata ne vienne ici te ramasser
- Sophie : (s'asseyant péniblement) : tu as raison. Je ne veux pas son bavardage le matin
- Moi : surtout qu'elle s'est exercée sur moi .
- Sophie (étonnée) : hein, il y'a eu quoi ?
- Moi : rien de grave. Juste Esther qui a cassé la chaise et voulait me faire porter le chapeau
- Sophie : oui le contraire m'aurait surprit
Pour éviter qu'elle ne parler contre sa sœur, je lui ai demandé de se dépêcher. Aujourd'hui, elle va me parler de sa sœur. Demain, elle pourra faire pareil avec cette dernière donc mieux, j'évite. Elle va laver ses habits pendant que je dresse le lit. Sophie est âgée de douze ans et est en classe de cinquième au lycée lelerc. Esther est en terminale dans le même établissement. Je balaie aussi la chambre et à l'appel de tata Martine, je sors de la chambre. Je la trouve devant sa porte.
- Tata : Jenny
- Moi : oui tata
- Tata : je n'ai pas le temps de préparer ce matin car j'ai une réunion urgente à neuf heures. Tu vas aller faire le marché avec Sophie. Tu feras le ntoumba (plantain pilé) avec la sauce de ndo'o (graines de la mangue sauvage). Il y'a de la viande au congélateur. Tu la sortiras avant d'aller au marché et tu la mettras dans de l'eau avec du sel et des citrons
- Moi : oui tata
- Tata : tu as compris tout ce que j'ai dis ?
- Moi : oui tata
- Tata ; (tendant un papier et de l'argent) : tiens la liste des courses et l'argent
- Moi : d'accord tata
Elle se retourne et entre de nouveau dans la chambre. Il y'a pas de ménagère ici. C'est Tata qui fait la cuisine soit le matin avant d'aller au bureau, soit le soir au retour. J'imagine que cela ne soit pas facile pour elle avec toute la fatigue. Si au moins, Esher pouvait déjà apprêter ce qu'il faut mais non fainéante. Elle s'assied et mange. Hum, dans tout cela, je trouve que sa mère ne l'aide pas. Comment fera t elle dans son foyer si elle se marie plus tard ? Bref, je me pose juste les questions.
Tonton est sur le point de partir. En général, il prend le petit déjeuner fait par tata. Mais j'ai comme impression que ce ne sera pas le cas aujourd'hui. Il sort avec le visage fermé. Ca doit être chaud à l'intérieur là bas. Il passe devant moi et revient sur ses pas.
- Tonton : jenny
- Moi : oui tonton
- Tonton : n'oublies pas d'aller prendre tes tenues hein
- Jenny : je ne vais pas oublier tonton
- Tonton : (en me tirant la main) accompagnes moi vers la voiture
Il y'a encore quoi. Il va sûrement me réprimander par rapport à la scène du matin. Seigneur, aides moi sil te plaît. Je n'ai rien fais de mal. Nous arrivons près de la voiture. Il ouvre la portière et prend place.
- Tonton : je veux que tu te sentes à l'aise ici. Si tu as un souci, n'hésites pas à venir m'en parler, d'accord ?
- Moi : oui tonton
- Tonton : tiens dix mille en me donnant le billet
- Moi : oui tonton, c'est pour acheter quoi ?
- Tonton : (souriant) ce que tu veux
- Moi : (joyeuse) : merci tonton
- Tonton : allez bonne journée
- Moi : aurevoir tonton
Il ferme la portière et baisse la vitre
- Tonton : martine, martine je suis déjà en retard
Il dépose tata tous les matins au bureau et elle rentre par le transport public le soir. Malgré son appel, elle n'arrive toujours pas.
- Tonton : weeh les femmes. Elles traînent toujours. Il faut mettre la peinture sur le visage et tout
- Tata : n'est ce pas que si je ne fais pas ça, c'est dehors que tu iras ?
Je ne l'avais pas entendu venir. Je crois que tonton va se mettre en colère avec ce qu'elle a dit.
- Tonton : montes ici. Tu veux chercher les problèmes le matin pour justifier le fait que tu étais entrain de te faire belle
Il se met à rire et tata devient souriante. Je regarde la voiture démarrer et j'entre à la cuisine. Il faut que je sorte la viande comme tata me l'a dit. Je le fais selon ses indications. Aie, mon ventre fait du bruit. Je fais mon petit déjeuner. Tata m'a dit que je peux de temps en temps faire les omelettes mais je n'ai jamais osé. Ca fait à peine deux semaines que je suis là. Il faut que je prenne d'abord mes marques. Tata achete des graines qu'on met dans le lait. Sophie m'a dit que ce sont les corns flaskes. Ca remplace le pain. J'ai goûté. Je préfère de loin manger le pain. Ca ce sont les choses des « tahan » (blancs). Je finis ma tasse et la rince. Je vais retrouver Sophie à la buanderie. Elle fait sa lessive.
- Moi : depuis là maman tu n'as pas encore fini ?
- Sophie : est ce que c'est alors facile ?
- Moi : aka fais vite tata a dit que tu dois m'accompagner au marché
- Sophie : (s'arrêtant un instant) : pour faire quoi ?
- Moi : acheter le plantain et le ndo'o
- Sophie : maman aime de ces nourritures
- Moi : (pensive) : ma grand-mère m'a toujours de ne pas choisir la nourriture car l'on ne sait pas où l'on tomberait demain
- Sophie : hum
Ha c'est une petite fille. Elle y comprend quoi.
Une heure plus tard, nous sommes en route pour le marché. Sophie me dit que nous allons à Mvog Mbi qui est celui qui est à proximité. La maison de tonton est juste après l'ambassade de France. Nous prenons le taxi et je suis surprise que nous payions juste cent francs. Sophie me dit que ce n'est pas aussi loin que cela. Nous arrivons et entrons à l'intérieur du marché. A Obout, le marché est habituellement un jour dans la semaine. Si tu ne fais pas les achats, tu vas attendre la prochaine semaine. A l'aide de Sophie, je trouve le ndo'o que j'achète ainsi que le plantain. Au moment de ressortir, j'aperçois des étalages de vêtements. Je m'y dirige lorsqu'elle attrape mon bras. Je suis surprise et la regarde interloquée
- Moi : y'a-t-il un problème ?
- Sophie (relâchant mon bras) : euh désolée, je me posais juste la question de savoir où tu vas
- Moi : ah oui je vais m'acheter quelques habits
- Sophie : donc tu as de l'argent ?
Je sais alors que je dis quoi ici ? elle semble être gentille mais si elle va répéter tout à sa sœur. J'ai déjà assez de problème comme ca.
- Sophie : tu penses à quoi ?
- Moi : non c'est ma grand-mère qui m'a donnée un peu d'argent en venant ici. Et comme j'ai pas d'habits ni de sous vêtements, je voudrai en achéter
- Sophie : ok allons y
Nous nous rapprochons d'un vendeur qui apparemment a des articles qui plaisent à mes yeux. Je choisis deux robes, deux jupes, un chemisier et un tee shirt. Les prix sont abordables. J'ai eu tout cela pour la modique somme de quatre mille. Il me reste en main encore six mille.
- Moi : Sophie tu ne prends rien ?
- Sophie (avec une moue d'enfant gâtée) : non merci
- Moi : ok saurais tu où je peux trouver des sous vêtements ?
- Sophie : tu trouveras des sous vêtements déjà portés ici
- Moi : mami ca fait quoi ? c'est mon niveau là bas. J'achète et je trempe avec de l'eau chaude et du détergent et le tour est joué.
- Sophie : faut faire attention avec les maladies
- Moi : (réfléchissant) : comme il me reste de l'argent, cherchons un magasin
Nous commençons à silloner le marché de long à large et avons la chance d'en trouver un. La dame nous invite à y entrer. Il est assez vaste et ne contient que des sous vêtements. Je fouille et en trouve à ma taille. Je prends six slips à cinq cents la pièce et je prends deux soutiens gorge qu'elle me laisse à mille cinq cents après réduction. J'ai proposé à Sophie de lui en offrir aussi mais elle a répondu qu'elle en a en stock. Je comptais les payer avec le reliquat de l'argent de tata et ensuite le compléter à la maison. Nous prenons le chemin de retour. Arrivées à la maison, nous a trouvons un jeune homme assis à la véranda avec Esther. Qui ça peut bien être ? je me pose la question intérieurement. Sophie s'est mise à courir vers lui.
- Sophie : tonton.
Elle est toute heureuse. Il l'a fait tournoyer jusqu'en à perdre haleine et la reposer à même le sol.
- Lui : ha ma petite Sophie comment vas-tu ?
- Sophie : (boudeuse) : tonton tu m'as abandonnée
- Lui : pas du tout. C'est juste le travail qui veut ma mort
Je suis restée en retrait. Il se tourne vers moi et me dévisage. Je suis mal à l'aise. Je regarde mes vêtements qui n'ont l'air de rien. J'ai honte tout à coup.
- Lui : Sophie comment s'appelle ta copine ?
- Sophie (souriant) : hé tonton ce n'est pas ma copine mais ma sœur
- Esther : (rugissant comme un lion) : quelle sœur hein ?
- Sophie : tu voulais que je dise ma cousine.
- Lui : les filles arrêtez de vous battre là
Je passe tranquillement et va dans la cuisine. Je commence à préparer. Il est presque onze heures. Nous avons mis du temps au marché à chercher le magasin des sous vêtements. Tonton est le seul qui rentre à midi. J'aurai le temps de finir. Je suis entrain de piler le plantain lorsque le tonton de Sophie entre et une fois de plus me dévisage. Je ne sais plus où me mettre.