Je pose les pinceaux de maquillage et je laisse à Fifi, l'animatrice qui doit monter au plateau le soin de s'admirer. Comme toujours, elle apprécie. On est très complice elle et moi comme d'ailleurs je le suis avec la majeure partie des gens qui passent entre mes mains expertes. Je n'aime pas me vanter mais je fais des merveilles avec mes dix doigts et en plus, je suis comme on m'appelle la psychologue maison. Je sais materner les gens dés qu'ils arrivent au maquillage avant de passer à l'antenne. Les gens ont tellement de soucis chez eux et dés fois, ils arrivent au boulot tellement stressés que tu as peur qu'ils ratent leur émission. J'ai l'habitude de me comporter ainsi avec les autres. Toute petite, ma mère qui vivait dans un foyer polygame était la bête noire de ses deux autres coépouses. Elle était la troisième femme de mon père et aussi sa préférée ce que les deux autres ne supportaient pas et avec la complicité de ma grand-mère, elles lui faisaient l'enfer quand papa avait le dos tourné ce qui était le cas la majeure partie du temps vu qu'il travaillait et logeait en ville et nous au village dans le nord. Donc quand ma mère avait mal, j'étais toujours là pour la consoler et me comporter en adulte. J'ai grandi avant l'âge à force de voir ma mère vivre l'enfer dans son foyer conjugal. A la mort de mon père, alors que j'étais en terminale, les choses ont atteint leur paroxysme. Papa, en revenant au village un week end, a trouvé la mort et lorsque son dépouille est arrivée, ma grand-mère, mes tantes et mes oncles nous ont fait sortir de la maison ma mère et ma petite sœur et moi, nous accusant de sorcières. On n'a même pas fait le deuil de papa car on devait trouver rapidement un endroit où vivre. Les parents éloignés de maman nous ont chassées aussi car ils étaient contre le mariage de leur fille avec un habitant du nord, eux qui se marient qu'entre gens du sud. On est arrivées à Abidjan en décembre de la même année et là, dans un parfait anonymat, ma sœur et moi avons pu sauver l'année scolaire en cours et j'ai décroché mon bac et une bourse pour poursuivre mes études au Canada. Depuis lors, j'ai acquis une sensibilité envers les autres.
Je passe mes journées à la télé en dehors des caméras mais il m'arrive de présenter la rubrique mode et beauté de la matinale. Je le fais rarement car je n'aime pas me mettre au devant de la scène. J'ai de très bonnes relations avec les collègues et ce soir, Fifi m'a invitée à son anniversaire qu'elle fête dans un restaurant avec quelques rares amis. Donc, en quittant le travail, je me dépêche rapidement pour arriver chez moi et me préparer convenablement. J'ai rarement l'occasion de sortir car le plus souvent, je suis très fatiguée pour y penser. Je mets des sels de bain dans la baignoire et y plonge. J'ai failli y dormir mais je me redresse avec toute la volonté du monde. Je file vite fait dans la chambre et j'ouvre mon armoire à la recherche d'une robe adéquate pour l'anniversaire de Fifi. Fifi est d'après ce que je sais une fille unique au milieu de trois frères. Elle a débuté en tant que mannequin et heureusement, elle a les pieds sur terre raison pour laquelle elle a continué ses études de journalisme à Paris alors qu'elle était sollicitée par tous les créateurs pour des défilés.
**Fifi Ndiaye**
Lorsque je suis arrivée au restaurant où j'ai invité quelques amis, toutes les têtes se sont retournées pour voir arriver la reine du jour. Daouda, mon frère ainé, se lève et vient me faire la bise et m'escorte jusqu'à notre table. Je crois que tous mes invités sont là. Je fais le tour pour saluer tout un chacun et c'est ainsi que je remarque que Chantal n'est pas encore là. Chantal ne fait pas partir de mes amis intimes mais je l'apprécie beaucoup pour sa spontanéité et j'ai un autre plan pour elle. Je suis entrain de parler avec une amie d'enfance quand tout devient calme dans le restaurant. Hommes et femmes se tournent. Je me retourne et vois une bombe devant la porte du restaurant. Elle semble cherchée quelqu'un des yeux et quand nos yeux se rencontrent, elle sourit et vient vers nous. C'est quand elle est à quelques pas de nous que j'ai reconnu Chantal. Mon frère en bave à force de la regarder. Tant mieux car je les imagine ensemble. Elle porte une robe rouge sang très classe sans faire vulgaire. Avec les bras dénudés et une fente raisonnable, elle marche comme une féline et une grâce royale. Dés qu'elle arrive à mon niveau, je la fasse tournoyer et waouh, le décolleté du dos est époustouflant.
Moi : je rêve ou c'est toi Chantal ?
Chantal : toi rêvé ? Jamais ! Telle que je te connais c'est impossible. Pourquoi tu dis rêver ?
Moi : tu t'es regardée avant de sortir de chez toi ? Une vraie bombe mais j'adore ton look. Ça te change de ton look habituel.
Chantal : merci. J'ai voulu faire honneur à la reine du jour. Joyeux anniversaire Fifi la folle et tout le bonheur du monde pour toi.
Moi : merci. Viens je vais te présenter à quelques amis.
Je fais le tour des gens la présentant comme une collègue et amie et je termine par mon frère Daouda.
Moi : Chantal, je te présente mon frère, mon ami et mon papa, Daouda mais tu peux l'appeler Da comme tout le monde.
Chantal : enchantée de faire votre connaissance Daouda.
Da : le plaisir est partagé et stp ne me vouvoies pas, ça ne me rajeunis pas.
Chantal : merci Daouda mais rassures toi, tu n'es pas vieux.
Je prétexte de saluer un ami et je les laisse discuter ensemble. Le reste de la soirée, ils la passent ensemble et ils ont l'air de s'apprécier.
**Khalil**
Mon monde s'écroule de jour en jour sans que je ne puisse rien y faire. Depuis quelque temps, je suis victime de chantage et mon divorce avec Khadija est imminent. Je ne pouvais plus ne pas le lui accorder. Non seulement il y a un journaliste qui me soutire d'énormes sommes d'argent dés que l'envie lui prend, mais il y a aussi ma future ex-femme qui me menace avec des vidéos et documents. Dans ma position, je ne peux que céder mais je le jure sur la tombe de mon père qu'elle le regrettera toute sa vie. Je ne suis plus pressé, je lui ai signé ses documents de divorce et la procédure suit son cours normal.
Depuis plus d'un an que ma femme est partie, ma mère me presse de me marier vu mon statut dans le pays, je ne peux pas me permettre de tourner d'une femme à une autre d'après elle. Elle a raison car quand on est une autorité, il ya de ces choses qu'on ne te pardonne pas. J'ai eu deux divorces et pour le prochain mariage, je dois être rigoureux et sélectif dans mon choix. Je n'ai plus droit à l'erreur. Il me faut une femme avec une image irréprochable, capable de me soutenir surtout qu'on va bientôt dans des joutes électorales, mais aussi discrète. Je ne peux pas dire que je l'aimerais à la folie mais une femme qui m'aura comme mari va faire une bonne affaire. Puisque mon image n'est pas au beau fixe ces temps ci, pourquoi ne pas aller chercher cette femme dans la population défavorisée. C'est une excellente idée et je gagnerai en plus d'une femme mais aussi d'un électorat à ne pas négliger.
Je ferme la porte de mon bureau et pour la première fois, je regarde ma secrétaire, Maréme Sy, avec de nouveaux yeux. Elle travaille avec moi depuis qu'on m'a nommé ministre mais je ne l'ai vraiment jamais regardé comme une femme. Elle est très belle avec des yeux de revolver comme dit Marc Antoine. Si bien sur elle enlève ses lunettes qui ne la favorisent pas. Elle a la peau claire et elle est très efficace dans son travail. Je la salue et l'invite à déjeuner pour voir ce que ça va donner.
Moi : Mademoiselle Sy, depuis ce matin vous travaillez sans repos.
Elle : merci M. le ministre.
Moi : mon nom c'est Khalil et depuis que vous avez commencé à travailler pour moi, je vous ai demandé de m'appeler comme tel quand nous sommes seuls.
Elle : d'accord Khalil.
Moi : et si on allait déjeuner ensemble ?
Elle : je ne...
Je lui coupe la parole.
- Je ne veux pas de refus et puis ça me permettra de mieux connaitre ma plus proche collaboratrice.
- Dis comme ça je ne peux qu'accepter.
On va dans un restaurant où j'ai mes habitudes. Dés mon arrivée, on nous introduit dans la salle V.I.P. Ma secrétaire regarde autour d'elle comme pour mémoriser les moindres recoins de cette salle.
Moi : alors ça vous plait ?
Elle : oui beaucoup. Je ne connaissais pas ici.
Moi : et pourtant vous leur parlez chaque fois que je dois sortir au restaurant pour réserver !
Elle : oui c'est bizarre de toujours appeler pour faire votre réservation sans connaitre le lieu.
Moi : mais ça me plait que ça soit moi qui vous fais découvrir le lieu.
Elle : merci.
On déjeune dans un bon climat et je lui pose sans paraitre le faire des questions pour connaitre sa famille. C'est ainsi que je découvre qu'elle habite avec sa mère et ses frères et qu'elle est l'ainé donc soutien de famille. Leur père étant mort depuis longtemps, elle a pris le relais. Je la félicite pour son dévouement envers ses petits frères et sa mère. Au bout de deux heures dans ce cadre idyllique, on se décide de quitter le restaurant pour retourner au boulot. J'apprécie beaucoup cette fille et je crois que je vais la considérer un peu plus pour voir.
** Khadija Rose**
Enfin je suis officiellement divorcée. Mon avocat vient de me faxer mon certificat de divorce et j'ai les larmes aux yeux. Quelle femme souhaite divorcer ? Moi en tout cas, ce mot n'a jamais fait parti de mon vocabulaire. On ne divorce qu'en dernier recours. Lorsque je me suis mariée, je me voyais finir mes jours avec mon mari et nos enfants mais la situation m'a démentie. Je me disais que la vie de couple n'est jamais facile et que tous les couples rencontrent un jour ou l'autre des problèmes. Je me voyais après une dispute avec mon mari, l'accueillir le soir avec une tenue si sexy qu'il oubliera la dispute. Comme disait ma mère, ce que l'on veut et ce que l'on a, il ya une grande différence. Khalil m'a montré une facette du mariage que je ne souhaite à aucune femme, même pas à mon pire ennemie. J'essuie mes larmes car mon ex mari ne mérite plus que je mouille mon visage. Heureusement que du coté professionnel, tout va bien. Notre dévouement pour nos clients commence à porter ses fruits. Chaque jour, de nouveaux clients franchissent les portes de l'agence et on a été obligées de déménager dans d'autres locaux plus grands et plus spacieux. Si on m'avait dit il ya deux ans que je serais ici en ce moment, je dirai non. Dieu seul sait ce qu'il nous réserve mais moi, je sais déjà ce que je réserve à mon désormais ex mari. Tôt ou tard, je vais lui faire face, et ce jour là, je veux qu'il me supplie les genoux à terre et dans ce cas, il verra ce que c'est d'humilier et de battre une femme. Seuls les lâches battent les femmes. Les hommes qui ont assez de couilles vont dans les salles de sport pour évacuer leur colère, vont s'enfermer dans leur bureau jusqu'à ce que la tempête passe. Khalil, je ne lui ai rien fait si ce n'est que lui prouver un amour inconditionnel mais il n'a pas su saisir sa chance et quand ma foudre s'abattra sur lui, rien ni personne ne peuvent le sauver et il ne tardera pas à recevoir sa punition. Pour le moment, je ne me focalise pas sur lui car je ne veux rien faire dans la précipitation au risque de foirer mon plan