J'avais payée de mes erreurs, car je ne pouvais presque plus marcher. Le processus de guérison chez les loups-garous est en général plus rapide pour les Alphas, j'en ai donc hérité mais lorsque les coups sont fréquents, il ralentit suivant la gravité de la blessure.
Si actuellement je ne sens plus mes bras, ni mes jambes, et que tous mes muscles souffrent à chaque mouvements que j'ose faire, c'est parce que je paie pour avoir répondu à mon père. J'ai déjà fait ma crise d'ado il y'a un bon nombre de mois, et j'en ai gardé un joli souvenir sur ma hanche : une trace brûlante d'une lame en métal surchauffée. Signé par mon père, évidemment.
Mais si j'ai répondu, c'était parce que j'ai son foutu gène d'alpha dominant !
Il y'a des fois où je me soumets. Mais rares sont ces fois car la plupart du temps je réponds sans même me contrôler. Je me dirigeais vers la douche et me glissais sous l'eau brûlante. Cela détendit mes muscles, sans pour autant enlever la douleur.
Après une bonne heure, je sortais et me séchais. Je m'habillais d'un legging noir et d'un sweat gris. J'attachais mes cheveux en un chignon coiffé-décoiffé.
Je n'allais pas me mettre sur mon trente-et-un alors que j'allais probablement me faire frapper d'ici ce soir.
Je savais que mon père ne serait pas là durant la journée parce qu'il avait prévu une réunion. Heureusement pour moi, d'un côté. Je descendais et déjeunais tranquillement. Il était onze heures. Pour une fois, il ne m'a pas réveillée au beau milieu de la nuit ! Parce que oui, d'habitude, il me réveille toujours chaque nuit, ivre et prêt à m'en mettre plein la tronche. En général, il me plonge la tête sous l'eau glaciale du lac, puis me fracture une ou deux côtes avant de me laisser tranquille. C'est son petit rituel.
Et moi, je n'y fais même plus attention. J'ai prit l'habitude de recevoir des coups, et pas n'importe lesquels. Ceux d'un alpha. Mon père n'est pas l'Alpha Suprême, alors il n'a pas autant de force que lui. L'Alpha suprême habite à Los Angeles, au Sud de l'Amérique du nord. Il a l'âge de mon père.
Évidemment, nous sommes au Nord de L'Amérique et mon père dirige l'île Victoria. J'ai toujours ressenti le manque d'affection maternel depuis que ma mère était partie, mais avec le temps, lorsque je me suis rendue compte que tout ça était de sa faute, je m'en suis vite passée et j'ai continué ma vie.
Mon téléphone sonna. J'aperçus le nom de Florian s'afficher à l'écran.
Florian ? C'était mon meilleur ami. Il avait déménagé au Sud des États-Unis, il y'a deux mois, justement à Los-Angeles, pour faire des études spécialisées là-bas. Il a dû quitter notre meute pour une autre, pour pouvoir réaliser ses rêves. Il prend des nouvelles de ses parents restés ici grâce à moi, parce que mon père ne veux pas que quelqu'un qui quitte la meute reste en contact avec nous. Mais je le fais toujours en cachette.
J'ai trouvé ça immonde de priver Florian de tout contact avec ses parents, alors je lui communique de leur nouvelles et il en est ainsi pour ses parents.
-« Allô ? » Dis-je.
-« Salut Amber ! Comment tu vas ? »
-« Hum, ça pourrait aller mieux, et toi ? »
-« Je vais bien. J'imagine que ton père s'est encore défoulé cette nuit ? »
Je soupirais.
-« Non ! Pas cette fois. Il ne m'a frappée que pendant la soirée. Miracle ! » lançais-je, d'un air faussement joyeux.
-« Ouh, il progresse alors ! »
Nous rigolons. J'adorais me confier à Florian. C'est la personne la plus fiable sur terre.
J'avais une deuxième amie ici, Mia. Elle est très gentille, c'est la seule qui est au courant que mon père me frappe. Néanmoins, je n'accorde que ma confiance à Florian.
Il a toujours su que mon père me battait, je n'avais pas eu besoin de lui dire.
Un jour, il m'a protégée. Depuis, nous étions devenus inséparables. Mais c'était jusqu'à ce qu'il parte. Je ne lui en voulais pas, il avait le droit d'avoir une belle vie.
-« Apparemment. Et sinon, toi ? C'est comment Los Angeles ? »
-« Ma nouvelle meute est géniale. Bon, l'alpha suprême est très autoritaire mais on s'entend bien ! »
Je recrachais presque tout mon lait et mes céréales.
-« Mais non !? Tu as intégré la meute la plus puissante du monde !? J'en reviens pas. » criais-je.
Il rigola.
-« Ouais ! Je rêve ou tu as recraché ce que tu mangeais ? »
Je regardais la table. Il y avait une flaque de lait étalée dessus ainsi que des céréales dispersées un peu partout dessus.
-« Euh.. non, tu ne rêves pas. » dis-je, coupable.
Il éclata de rire et j'éloignais mon téléphone un instant.
-« Tu ne changeras jamais ! Et comment vont mes parents ? »
Je rigolais un instant, puis allais chercher l'éponge.
-« Ils vont bien, je les ai croisés il y'a une semaine. Ils me demandent souvent de tes nouvelles. Pense à m'envoyer une photo de toi, je l'imprimerais pour eux. »
-« D'accord, merci beaucoup Amber. »
-« Pas de quoi. Oh, et j'oubliais ! Tu ne sauras jamais ce qu'a fait mon père. »
-« Non, mais venant de lui, je m'attends à tout. »
Je soupirais, il avait raison.
-« Eh bien figures toi que pour mon anniversaire, mon super papa a décidé de me vendre à un alpha super tordu ! »
-« Quoi !? Tu plaisantes !? » hurla t'il, à travers le téléphone.
-« Non, hélas..pas du tout. » soufflais-je.
-« Mais il est complètement malade ! On ne revends pas sa fille ! »
-« A croire que si..De toute façon, c'est peut-être pas si pire. Au moins je ne serais plus tabassée par mon père. »
-« Et si l'autre alpha est comme lui ?! C'est dans deux jours Amber ! Sauves-toi. »
-« Je l'ai rencontré hier. Il est comme lui, c'est certain. Qui d'assez fou ferait affaire avec mon père ? »
-« Alors fait ce que je te dis ! Barre-toi ! » cria t'il.
-« Mais pour aller où ?! J'y ai pensé mais de toute manière, il me retrouvera ! »
Un silence s'en suivit.
-« Rejoins-moi ici, à Los-Angeles. Je te cacherais, on se débrouillera. »
-« Non, Flo ! Je ne veux pas t'embarquer dans mes problèmes ! »
-« J'étais déjà impliqué dans tes problèmes le jour où j'ai pris ta défense contre ton père ! Tu fuis tes problèmes pour t'en sortir, c'est la seule solution. Puis je te dois beaucoup, Amber. »
-« Non tu ne me dois rien du tout. Florian je ne veux pas t'attirer plus d'ennuis. »
-« Amber !! Tu vas bouger ton cul oui ?! Tu comptes encore souffrir toute ta vie ?! »
-« Quelle vie..? »
Il souffla.
-« Merde.. Amber. Rejoins-moi, je t'en supplie. Tu seras majeur, on s'en sortira facilement. Puis d'ici là, ton père ne saura pas que tu auras quitté l'île pour le sud ! Et on aura largement le temps de trouver un moyen de te cacher avant qu'il arrive. »
-« Je sais pas.. je serais à peine majeur ! »
-« Fais ce que je te dis. Organise toi. On est lundi, prépare ta fuite dans la nuit de mardi à mercredi ! Tu prends un vol pendant la nuit, puis tu me rejoins. Dis-moi l'heure, je serais là. Je vais devoir y aller. En tout cas, réfléchis bien à ce que je viens de te dire. »
-« Ok, je vais y réfléchir. À plus. »
Il me salua et nous raccrochons. Partir ? Après tout, cela pourrait m'éviter un bon nombre de choses, comme fêter mon anniversaire chez un taré, être vendue..
Mais cela signifierait aussi abandonner tout mon passé derrière moi..
Je finissais de nettoyer la table avant d'aller regarder la télé.
Une heure plus tard, la sonnette retentit et je me levais. J'eus la bonne surprise de voir Mia derrière la porte. Il pleuvait comme pas possible.
- Salut ! Lança t'elle.
- Entre ! Dis-je
Je me décalais et elle entra à l'intérieur, trempée. Elle me fit la bise et nous allons nous assoir sur le canapé.
- Ton père nous a annoncé ton départ avec l'Alpha Luka.
- Oh.. je vois. Il n'a pas perdu son temps.
- Ne lui en veux pas.. il doit sûrement s'en vouloir, mais il est obligé de faire alliance ! Notre meute serait trop faible, sinon. Dit t'elle.
Je cru m'étouffer. Lui ? S'en vouloir !? C'est vraiment mal le connaître.
C'est pour ça que je ne n'accordais pas toute mon amitié à Mia. Elle prenait toujours la défense de mon père, mais pourtant elle savait ce qu'il me faisait endurer. Alors j'avais tendance à me méfier d'elle. Je l'aimais bien, mais quand j'entends ces mots sortir de sa bouche, alors qu'elle ne sait pas ce que j'ai vécu, c'est juste.. étouffant.
On ne parle pas quand on ne sait pas. On se tait. Et c'est ce qu'elle aurait dû faire, mais à chaque fois, elle sort des paroles en l'air.
Elle aurait dû être sa fille pour voir ! Après j'aurais bien voulu écouter sa nouvelle version du « papa parfait » que représente mon père à ses yeux.
- Hum, je ne pense pas qu'il s'en veuille le moindre du monde.
- Amber, c'est ta mère la traîtresse, c'est elle qui t'as abandonnée, pas lui ! Me dit t'elle.
Cette fois, je serrais les poings et fis un immense effort pour ne pas me jeter sur elle.
- Dégage.
- Quoi !? Me dit t'elle, surprise.
- Dégage, dehors ! Hurlais-je.
Je me levais et pointais la sortie. Elle prit peur et s'en alla vers la porte. Je la suivais et la poussait sous la pluie.
- Mais pourquoi tu t'énerves !?
- Tu ne connais rien de ma mère, ni de mon père alors je ne te permet pas de juger ma vie ! J'aimerais bien t'y voir, à toi ! Et n'ose surtout pas revenir me voir. Casse-toi et ne reviens plus jamais me parler. Dis-je, d'une voix menaçante.
Elle prit encore plus peur et dégagea. Je claquais la porte et retournais m'assoir sur le canapé. Les seules personnes fiables que je connais ici sont bien les parents de Florian.
Ils savent que mon père me bat, grâce à Florian qui leur avait avoué.
Sinon, personne ne mérite une quelconque confiance ici. Il n'y a qu'à voir Mia !
Je soupirais, et pris sans plus attendre ma décision. Il n'y a plus rien qui me retient ici.
Je vais partir à Los-Angeles.