Contre toute attente
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Chapitre 2 Chapitre 02

Chapitre 2

Je m'appelle Mariama Woppa Diallo. Un deuxième prénom hors du commun n'est-ce pas ? Pour la plupart je sais déjà que c'est la première fois que vous voyez ce prénom. Je remercie mon père d'en avoir fait le deuxième si c'était le seul et l'unique, j'aurais été plus assujettie aux moqueries des autres enfants. Je ne l'ai pas eu par hasard. Mon nom signifie en peul « abandonné ». C'est un prénom qui est choisi pour conjurer le sort. C'est une ruse consistant à faire comme si on ne voulait pas de l'enfant et ainsi lui accorder une longévité. A ma naissance, ma mère avait déjà faite 2 fausses couches. Ils pensaient que le mauvais œil s'étaient rabattu sur eux donc quand je suis née ils ont cherché à contourner cela. A la maison j'étais toujours Woppa mais dehors je pouvais être Mariama, juste Mariama.

Naître au Sénégal ne fait pas de toi une sénégalaise. Je me suis toujours sentie exilée et rejetée par cette société qui n'a jamais hésité à me rappeler qu'en tant que fille de ndringue, ndringue j'étais. Le terme ndringue étant péjoratif, je n'ai jamais aimé qu'on m'appelle comme ça. Mais vous savez mieux que moi que dans cette vie mieux vaut taire ce qu'on ne veut pas car les gens aiment bien retourner le couteau dans la plaie. Ils aiment blesser leur prochain. Reste à savoir pourquoi tant de méchanceté.

Comme tout le monde sinon la plupart des gens, j'ai toujours été fière de mes origines. Même si je n'ai jamais passé une année entière en Guinée, guinéenne j'étais et je n'ai jamais hésité à le dire à qui voulait l'entendre. A part cet épisode vécu là-bas auquel je pourrais donner ma vie juste pour l'effacer, j'ai toujours aimé mes séjours dans le village natal de mes parents. J'étais avec mes grands-parents et je tenais beaucoup à eux.

Nous vivions dans un quartier populeux en banlieue dakaroise et mon père tenait une boutique comme beaucoup d'autres immigrés guinéens. La boutique marchait bien ou du moins c'est ce que j'ai toujours cru mais mon père étant l'ainé il avait la charge de la famille en Guinée et devait leur envoyer toujours beaucoup d'argent. De ce fait malgré, les bénéfices qu'il pouvait tirer de son commerce, il ne pouvait louer que deux pièces : une pour la boutique et une autre qui fait office de chambre. Nous dormions tous dans ces 2 pièces. Quand je dis tous, je parle de moi, mon frère, mes parents et 2 des frères et un cousin de mon père qui eux aussi avait migré au Sénégal. Mes deux oncles et leur cousin tenaient chacun un commerce de fruits au marché et souvent ils aidaient mon père dans la bonne marche de sa boutique. Au début, ils travaillaient exclusivement dans la boutique mais après ils ont voulu monter leur propre affaire.

Quant à ma mère, elle était lingère. Son travail consistait à laver et repasser les habits de différentes dames du quartier qui étaient sans doute très fainéantes pour le faire elles-mêmes. Je n'aime pas faire la lessive mais ma mère a toujours dit qu'elle l'a toujours fait pour sa famille en Guinée donc si elle peut le faire à Dakar et être payée pour ça, tant mieux. Et même ce n'est pas un travail quotidien. Ma mère faisait maximum deux foyers par semaine et pouvait se reposer le reste du temps. J'aidais toujours ma mère dans ses tâches même si à l'époque étant petite, je lui étais pas de grande utilité mais je pouvais quand même faire les commissions.

Notre maison était non loin de l'école primaire du quartier. Mon père tenait qu'on se réveille tous très tôt le matin. Il disait qu'il n'avait pas à élever un paresseux. Mon quotidien consistait à me mettre chaque matin devant la grande porte et regarder ainsi tous ces enfants vivre la vie que je n'aurais jamais. En effet, pour mes parents surtout mon père et mes grands-parents qui aussi avaient le pouvoir de décision sur leurs petits-enfants, l'école française menait à la perversité. Qu'un musulman devait juste se contenter de l'école coranique. Je suis allée à l'école coranique du coin mais j'y ai juste fait quelque temps.

Le plus grand regret de ma vie sera toujours ça, de n'avoir pas eu la possibilité d'avoir cette vie-là. A chaque fois que je me trouvais devant l'école et que je regardais les autres enfants entrer et sortir, je ressentais un pincement dans le cœur. Je voulais cette vie-là.

Un jour quelque chose que je considérais comme une lumière dans l'obscurité s'était présentée à moi. J'avais quelque chose que je pensais avoir perdu : l'espoir. Un jour, ma mère devait faire la lessive de la femme d'un des instituteurs de l'école qui habite dans notre quartier. Quand le monsieur est descendu du travail, il est venu trouver ma mère qui vaquait à ses occupations et moi qui la regardais faire. Il a lui a demandé pourquoi je n'allais pas à l'école et qu'il avait remarqué que j'aimais me mettre devant la porte de l'établissement, que mon envie de les rejoindre était plus que flagrant. Ma mère lui expliquait les raisons déjà évoquées. Il lui répondait que c'était à la limite du stupide et que l'école française ne pouvait faire de personne ce qu'elle n'était pas déjà. J'avais 7 ans mais je me souviens encore des détails de cette conversation comme si c'était hier. Quand il expliquait à ma mère les bienfaits de l'école, mes yeux pétillaient tellement que j'étais heureuse, étant instituteur c'était aussi normal qu'il fasse l'apanage de son gagne-pain. Ayant une classe de CI, qu'il s'occupera lui-même de moi, je serais dans sa classe. Mais hélas mon bonheur fut de courte durée. Dès qu'il a évoqué le nom de mon père, je savais que c'était perdu d'avance. Je n'entretenais pas une grande relation avec mon père, je ne voulais pas m'attirer ses foudres alors j'ai toujours préféré me tenir à l'écart. On ne se voyait qu'au tour du bol. Mon frère et moi, les seuls enfants mangions doucement et calmement prenant garde à ne jamais faire tomber une miette car on savait que l'addition allait être salée si on passait outre les prérogatives déjà citées par mon père qui disait clairement qu'on reconnaissait la bonne éducation d'un enfant par comment il tenait quand il mangeait. On avait l'obligation de montrer qu'on était bien élevé.

Comme je le savais l'instituteur était allée parler avec mon père au sujet de mon cas non celui de mon frère, il était encore trop jeune. Oui il a fait le déplacement juste pour moi. Mon père lui a répondu un non catégorique. J'ai pleuré, reste à savoir pourquoi car je savais qu'il allait dire non.

J'ai fini par me faire une raison. Ceci était une vie que je ne connaitrais jamais. Je pouvais déjà planifier mon avenir, le même sort que ma mère ou d'autres guinéennes. Me marier un jour avec un homme choisi par mes parents et finir vendeuse ou ménagère à Dakar. A moins que l'homme en question préfère que je retourne en Guinée, c'est la vie de ma mère qui m'attendait.

Je n'ai jamais eu un seul cours de français mais je traînais souvent avec les autres enfants de mon quartier. Quand ils révisaient leurs cours, je l'ai regardé faire. Je les entendais s'exprimer dans cette langue que je trouvais merveilleuse. C'était dû je pense au fait que je ne la comprenais pas. Ma copine Safietou qu'on appelait Safi m'a appris quelques bases. Mais comprendre le français sans aller à l'école était une mission impossible d'autant plus qu'au Sénégal tout le monde s'exprime en wolof. Je parle couramment le wolof et le peul mais pour le français je devais me contenter que des basiques qui m'ont été enseignées par Safi.

Du haut de mes 15 ans, l'état de ma mère s'est dégradé. Elle a commencé à avoir des problèmes de santé. Personne ne sait d'où ça mais si on pense que son travail de lingère y joue un rôle vient mais on sait tous où ça va si on ne faisait pas attention. Elle avait besoin d'énormément de repos et j'étais assez âgée pour avoir un travail à moi. Mes oncles m'ont aidé et je suis devenue vendeuse de fruit dans un CEM qui se trouvait un peu plus loin de notre quartier. Mon quotidien continuait mais différemment que quand j'étais petite maintenant je ne me mettais plus devant la porte pour regarder les élèves, je peux le faire dans la cour et voir ainsi une vie que je regretterais toujours.

Je pouvais prendre un car rapide et payer 50frs pour m'y rendre mais mon père disait que ce n'était que de la fainéantise que je pouvais marcher pour y aller. Les 100frs mis bout à bout représentaient beaucoup d'argent et que je ne devais pas la gaspiller. Je devais être sur place avant la récréation de 10h et rester jusqu'après la pause de 12h à 13h. Safi était dans ce collège et souvent si elle ne trainait pas avec ses camarades de classe venait s'asseoir à côté de moi et on discutait. Ça me faisait beaucoup plaisir d'avoir un peu de compagnie. Ma vie n'était plus aussi déprimante qu'elle en avait l'air. Je regardais ces enfants vivre cette vie que je n'aurais jamais. J'avoue avoir toujours été jalouse d'eux.

Safi me disait un jour alors qu'on était chez elle un après-midi de samedi, elle était à l'université et ne rentrait que les week-ends. Elle disait que j'avais beaucoup de chance que chez les peuls, elle aimait beaucoup faire des catégorisations, l'âge du mariage était toujours très avancé. Que c'était rare de voir une peul qui avait atteint ses 19 ans mais était toujours célibataire. Je riais à sa remarque car 3 ans auparavant mon père voulait que j'épouse un de mes cousins. J'ai refusé prétextant l'état de santé de ma mère qui avait besoin de son unique fille à ses côté pour s'occuper de ses tâches ménagères et de son commerce. Heureusement mon père n'avait pas insisté. Mon argument était de taille et il savait que maman ne pouvait pas faire grand-chose et que cette maison avait besoin de moi. Safi n'était pas au courant de ce détail et je préférais ne pas lui en parler.

Ce que je ne savais pas à l'époque était que mon argument ne pouvait pas durer éternellement et que tôt ou tard j'allais sortir de cette maison, laissant une maman malade qui avait besoin de sa fille. Et oui, un an plus tard mon père prenait une deuxième épouse. Ce mariage fut le commencement de tous mes maux. Déjà qu'elle était une divorcée et elle est venu avec une fille de 7 ans très mal élevée. J'en voulais beaucoup à mon père d'avoir pris cette deuxième épouse, maman était malade et avait besoin du soutien de son mari. Et après il a accepté à la fille de cette étrangère ce qu'il m'a refusé moi, à savoir d'aller à l'école. J'étais très en colère contre lui.

Un jour j'étais chez ma Safi, avec Bineta une autre copine. Safi nous parlait de son petit copain étudiant. Moi je fuyais les garçons comme la peste. Je prenais mes jambes à mon cou à chaque fois qu'un d'entre eux m'interceptait dans la rue. J'avais pas envie que d'être battue simplement parce que l'un de mes oncles ou mon père lui-même m'avait croisé dehors en train de parler à l'un d'eux. Je savais ce qui m'attendait et je préférais ne pas tenter le diable. Alors qu'on discutait ou plutôt les deux discutaient moi je ne faisais qu'écouter, la fille de ma belle-mère, Assietou venait me voir et me demander de répondre à mon père. Les parents de Safi louaient le même bâtiment que nous donc je ne mettais pas trop de temps avant d'accéder à la chambre où je voyais mes parents assis sur le lit et deux hommes assez âgés sur les chaises que mon père a dû emprunter aux voisins. Après avoir salué les invités, j'ai rejoint mes parents sur le lit attendant ce qu'ils avaient à me dire. C'est mon père qui a commencé.

-Woppa comme tu le sais tu n'es plus une petite fille. On en avait parlé il y a quelques années de cela et tu avais dit et j'étais d'accord avec ça que ta mère et cette maison avait besoin de toi. Aujourd'hui ta tante Aminata est là, ce qui fait que ta présence dans cette maison n'est plus indispensable. Je t'ai appelé pour te dire que ces monsieurs sont venus pour demander ta main.

Là je me disais, lequel des deux c'était mais peu importe il était tous les deux trop vieux et je ne voulais pas d'un mari qui avait l'âge de mon père. Mais je me calmais pensant à la possibilité que ça soit pour un de leurs fils et pas pour un des deux.

Vu que je ne disais rien, mon père continuait.

-Monsieur Korka que tu vois ici (Montrant un des hommes du doigt) est un grand commerçant. Il est très respecté en Guinée. Ce sera un honneur pour toi de devenir sa troisième épouse et de vivre dans sa maison.

Là tous mes espoirs se sont dissipés. J'allais me marier avec un vieux. Je commençais à regretter la proposition de mon père il y a 4 ans. J'aurais dû épouser mon cousin. Oh mon Dieu, que vais-je devenir ?

Je continuais toujours dans mon mutisme. Je voulais parler mais aucun son ne voulait sortir de ma bouche. Je devais me rendre à l'évidence ma vie était foutue.

Après des échanges entre mon père et celui qui allait être mon futur mari en ce qui concerne la dote entre autres, une somme importante là je compris que mon père voulait me vendre comme les vulgaires marchandises qui sont dans sa boutique. Les invités décidèrent de prendre congé juste avant que je ne sorte pour rejoindre Safi en pleurs dans sa chambre. Elle me regarde intriguée alors que je prends place.

-Je vais me marier Safi.

-Il fallait s'y attendre. Ton père au moins t'as laissé atteindre tes 20 ans, beaucoup se marient en étant bien plus jeune que ça.

-Mon problème, ce n'est pas le mariage. J'ai toujours su que j'allais me marier tôt ou tard mais pas avec un vieux... Disais-je en reniflant.

-Avec un vieux ? Pourquoi ton père veut-il te donner en mariage à un vieux ?

-Parce qu'il a beaucoup d'argent.

-Argent ? Non ton père ne peut pas te faire ça.

-Si il le peut et le pire et que je vais rejoindre sa maison en Guinée et que je serais sa troisième femme. Je suis sûre qu'il a des enfants plus âgés que moi et que ses premières épouses sont aussi âgées que ma mère. Ma vie là-bas ne sera jamais facile, d'autant plus que je serais loin de tout ce que j'ai toujours connu.

-Ne le laisse pas faire Mariama. C'est toi qui va te marier pas ton père. Ce sera ta vie pas la sienne. Tu ne peux pas être destinée à être malheureuse toute ta vie. Vas voir ton père et dis-lui ce que tu penses.

Là je pris peur. Je sais déjà que je vais avoir droit aux coups et je n'en voulais pas. Mais les coups que j'allais recevoir ce soir ne valaient-ils pas moins que le calvaire qui m'attendait à Conakry chez ce vieux. Safi avait raison et je devais affronter mon père.

-Oui tu as raison... Lui disais-je avant de quitter sa chambre.

Je suis allée voir mon père et je lui ai révélé le fond de ma pensée. La morsure de la ceinture sur ma peau ne se faisait pas attendre. J'avais pris cher ce jour-là. Il ne m'a vraiment pas fait de cadeau. J'avais vu mon père battre ma mère tellement de fois que je savais que c'était ce qui m'attendait chez mon futur époux alors je devais résister et rester sur ma position. A chaque fois que mon père me demandait si j'étais d'accord maintenant je disais non et les coups se faisaient retentir. J'avais peur d'une chose que la morsure de la ceinture ce jour-là, laissent des marques indélébiles sur ma peau claire.

Face à la tête de mule que j'étais mon père en a eu marre il est sorti me laissant toute seule accroupie dans un coin de la chambre. Ma mère est venue pour me faire entendre raison. Mais ces paroles ne pouvaient pas réussir, là où la morsure de la ceinture avait échoué je ne voulais pas de ce mariage. Mais jamais je ne pouvais m'attendre à ce qui s'est passé quelques heures plus tard. J'ai vu mon père prendre toutes mes affaires et les faire sortir de la maison comme si j'étais un mal propre. Après il m'a traînée par les cheveux et m'a mise dehors.

Je ne savais pas où aller je ne connaissais personne. Mais comme un éclat de lumière, Safi sortait de la maison et prenait mes bagages pour les mettre dans sa chambre. Je rendais grâce au ciel que ça soit les vacances et qu'elle ne soit pas à l'université car sinon je savais déjà que j'allais dormir dans la rue sans rien.

Les traces laissaient par la ceinture me faisaient excessivement mal. Et j'avais autant de mal à m'asseoir que de me coucher. La mère de Safi venait nous rejoindre et sa fille lui expliquait mon cas mais évidemment je ne pouvais pas rester là-bas. Safi n'avait pas sa chambre à elle toute seule et ses parents n'étaient pas assez riches pour avoir une bouche de plus à nourrir. Sa mère est allée parler à mon père et ce dernier était catégorique. Il m'a traitée de vagabonde et que sous son toit ne pouvait pas vivre une fille de cette espèce. Toutefois ses parents avaient un grand cœur et savait que j'allais dormir dehors si eux aussi me chassait à leur tour alors je suis restée chez elle, le temps qu'une solution se présente à nous.

La mère de Safi connaissait beaucoup de monde et je rendais grâce à Dieu pour ça. Durant un tour avec ses amies, elle m'a amenée avec elle et a parlé de mon cas voulant savoir si l'une d'entre elles n'avait pas besoin d'une domestique qui bien sûr allait passer la nuit dans son domicile de travail. Aucune d'elles n'en a avait besoin mais la fille d'une des femmes travaillait dans une maison dans un quartier huppé de Dakar et que la maîtresse de maison prenait souvent des domestiques. Qu'elle pouvait m'y amener le lendemain pour voir si elle avait quelque chose pour moi. Là je ne pouvais que commencer mes prières dans la mesure où je me sentais vraiment de trop chez Safi. Ils sont vraiment gentils mais je savais qu'ils avaient besoin de leur espace et que je les encombrais.

Le lendemain, tata Diarry m'amenait comme prévu dans la maison où travaillait sa fille. Il nous a fallu prendre 2 cars et marchaient pas mal de temps car seuls les taxis passaient par là-bas et bien sûr c'était un luxe que ni moi ni tata Diarry ne pouvions nous payer. Sur le chemin je n'arrêtais pas de regarder la bouche grandement ouverte. Je ne savais pas que Dakar avait de telles maisons. Je n'étais pas entrée pas je pouvais m'imaginer de là qu'elles étaient immenses. Nous arrivons devant la porte d'une maison et je vois tata Diarry s'arrêtait pour sonner. Ça devait être là. Un homme venait nous ouvrir, il avait l'air très fâché et tata Diarry après avoir salué, demander après sa fille. L'homme nous demandait d'entrer. J'avais l'impression d'être dans un champ, cet endroit est juste immense.

-Tu regardes le jardin... Me disait tata Diarry sans doute interpellée par mon ébahissement.

-C'est très grand.

-Attends d'entrer à l'intérieur c'est bien plus beau. Ils ont vraiment beaucoup d'argent... Dit-elle en m'invitant à m'asseoir. Il y avait une table et des chaises qui l'entouraient. Il y avait un parasol qui protégeait ceux qui étaient assis du soleil. Il y en avait d'autres aussi.

-Oui ça se voit.

Après quelques minutes d'attentes, la fille de tata Diarry venait. Elle se présentait, Rama était son prénom.

Tata Diarry lui parlait de mon cas et demandait après sa patronne. Heureusement pour moi elle était là donc si toutefois elle me refusait je n'avais pas besoin de revenir pour rien.

Rama était assez sceptique car elle disait que le personnel était au complet et qu'elle doutait que sa patronne me prenne mais qu'on pouvait quand même essayer.

Après plusieurs minutes d'attente, Rama était de retour et elle me demandait d'aller rejoindre sa patronne dans une pièce du bas. Bien sûr je la regardais avec des yeux de chiens battus pour qu'elle ait pitié de moi et qu'elle m'amène dans la pièce en question vu que je ne savais rien dans cette maison.

Mon regard était suffisant pour qu'elle comprenne que j'étais terrifiée alors elle me demandait de l'accompagner.

Tata Diarry avait raison. Le jardin n'est que de la poudre aux yeux face à l'intérieur de la maison.

-Evite juste de gober une mouche... Plaisantait Rama alors que je fermais la bouche instantanément.

Elle m'invite dans quelque chose qui ressemblait à un salon. En tout cas c'était décoré comme tel.

-Assis-toi, elle va bientôt arriver. Elle te demandera si tu as déjà travaillé pour quelqu'un. Dis-lui, oui. Elle ne prend que des expérimentés.

-Qu'est-ce que je vais lui dire ?

-Dis-lui que tu as travaillé chez une famille et qu'ils ont déménagé à l'intérieur du pays, que c'est pour c'est pour ça que tu as dû arrêter. Crée-toi de l'expérience sinon elle ne va pas te prendre. Ils payent très bien et je doute que tu puisses avoir mieux ailleurs...Disait Rama avant de me laisser toute seule dans cette pièce qui était à elle seule plus grande que les 2 pièces que mon père louait.

Je regardais au tour de moi et je me demandais si je pouvais travailler dans une telle maison. J'ai toujours été très maladroite. Ma maladresse m'a coûté cher bien des fois. J'avais peur de casser un truc hors de prix et de devoir travailler durant des mois pour le rembourser. Je voulais ce travail mais parallèlement j'avais peur de le regretter.

Peu de temps après, une dame très belle et très élégante se présenter à moi.

-Je suis Seynabou Ndiaye Mar...Disait-elle en me tendant la main.

-Mariama Diallo... Disais-je d'un son à peine audible, intimidée par celle que j'avais en face.

-Rama m'a dit que tu cherchais un travail. J'aurais besoin de quelqu'un mais à la fin du mois donc la semaine prochaine. Une de mes domestiques m'a fait savoir qu'elle se mariait et qu'elle finissait ce mois-ci. Tu as déjà travaillé pour quelqu'un ?

Avant de répondre par la négation, je repensais à ce que Rama me disait. Donc je prenais mon courage à deux mains et me lancer dans un baratin incroyable. Je ne sais même où ces idées me sont venues. Je ne pouvais plus rester chez Safi et je ne devais pas laisser cette opportunité m'échappait.

-Rama est quelqu'un de bien et très travailleuse. Puis que vous êtes amies, je crois que vous devez vous ressemblez. La semaine prochaine, tu peux venir t'installer et faire ta semaine d'essai. Si ça me suffit, ce travail sera à toi.

Je répondais par un hochement de tête avant qu'elle me dise que je pouvais disposer.

Je rejoignais Rama et tata Diarry dans le jardin et je les expliquais à la lettre la conversation que j'ai partagé avec madame Seynabou. Rama me faisait savoir que tous les employés sont passés par cette semaine d'essai et que vu que je n'avais pas trop de choses à faire, je ne pouvais pas faire de bêtises.

-J'espère bien...Lui répondais-je avant que tata Diarry et moi nous ne quittions la maison pour rejoindre nos maisons respectives. J'avais placé beaucoup d'espoir dans cette maison. Je devais quitter chez Safi et je les ai vu très emballés quand j'ai parlé de la possibilité d'avoir ce travail. Oui comme je le pensais j'étais de trop et même s'ils ne me le signalaient pas. Je pouvais m'en apercevoir.

J'étais chez Safi et je pouvais toujours aller voir ma mère ou c'est elle qui venait me voir car papa ne devait pas me trouver sur ses lieux et c'était moins risqué quand c'est elle qui venait. Je lui avais parlé de cette possibilité de travail et elle a beaucoup prié pour moi laissant échapper quelques larmes pendant que je la suivais aussi. Toute ma vie, je n'ai connu que çà et là je devais me diriger vers de nouveaux horizons. J'avais le tract et c'était un euphémisme.

La semaine s'était écoulée lentement. J'avais peur de braver l'inconnu mais la gêne que je ressentais dans cette maison dissiper toute mon anxiété.

Aujourd'hui, je peux enfin quitter la maison des Beye et me rendre sur mon lieu de travail espérant n'en ressortir que pour le mariage. Oui maintenant que mon père m'a reniée, j'ai mon destin en main et je peux ainsi me marier avec qui je veux. Ma situation est déplorable mais n'a pas que de mauvais côtés.

Je suis devant la maison, mon sac de 2000frs au marché hebdomadaire en main. La maman de Safi m'avait fait ce cadeau, vu que je ne pouvais pas transporter mes affaires dans divers sachets. Je sonne et le gars qui est toujours fâché m'ouvre la porte. Ça lui arrive de sourire lui ? Je le salue et il se donne même pas la peine de me répondre mais ça ne fait rien. On n'est pas ami. Je dois aller trouver Rama mais je ne sais pas où la chercher. Cette maison est gigantesque. Je vois une fille qui balaie les feuilles mortes, je vais jusqu'à elle.

-Bonjour, je suis Mariama.

-Oui, la nouvelle. Rama nous a parlé de toi. Je suis Codou.

-D'accord, où est-elle ?

-Elle doit être dans notre chambre.

-Où c'est ?

Elle m'explique le chemin que je devais emprunter. Je suis ses directives à la lettre pour accéder à la chambre. Une fois devant je toque.

« Entrez » Pouvais-je entendre depuis l'intérieur.

J'entre et je trouve Rama faisant les lits. C'est une grande chambre avec 3 petits lits dedans mais aussi des commodes et des armoires.

-Bonjour...Dit-elle avant de venir prendre mon sac de mes mains.

-Bonjour.

-Ici c'est notre chambre. On l'occupera toi, moi et Codou. Chacune a son lit.

-D'accord.

Un lit à moi toute seule, j'y croyais à peine. Je dois me retenir pour me retenir pour ne pas sautiller de joie.

-Puis que tu as pris la place de Khoudia, tu vas occuper le lit qu'elle avait c'est celui qui est au fond.

-D'accord... Répondis-je alors que franchement tant que c'était un lit pour moi, je ne pouvais pas me préoccuper de son emplacement.

-Tu peux ranger tes affaires après je vais t'expliquer en quoi consistait le travail de Khoudia. J'ai déposé ton uniforme sur le lit.

Je me souviens quelque chose me tracassait.

-Comment se passe la période d'essai ?

-Tu sais la patronne n'a pas le temps de te surveiller. Au terme de ta semaine, elle appelle tous les employés pour leur demander ce qu'ils pensent de toi. Ils sont tous très gentils, arrange-toi juste pour bien t'entendre avec tout le monde et ça ira.

-D'accord.

-Peut-être que ce qui ira moins sera le fils de la patronne. Le nouveau patron si tu veux depuis la mort de son père. Ce gars est super arrogant et se croit meilleur que tout le monde. Il peut te virer en un claquement de doigt. J'ai si hâte qu'il retourne aux USA. Mais bon, un conseil, évite-le.

-Tu me fais peur là, d'accord.

-Range tes affaires, change-toi et je te dirais ce que t'as à faire.

Après avoir fait ce que Rama m'a demandé, je suis allée la rejoindre en fait on avait les mêmes occupations et vu qu'on le faisait à deux on terminait très vite.

La cuisinière qui s'appelle Rokhaya que Rama m'avait présentée m'a demandé de venir que le fils de la patronne devait avoir son déjeuner. Après ce que Rama m'a dit je n'étais pas très emballée. Je lui ai demandé de le faire pour moi mais elle m'a dit niet et que c'était à mon tour.

J'avais le plateau entre les mains mais je grelottais tellement que je sentais qu'il pouvait m'échapper tout moment.

Je suis entrée dans la salle à manger, qui en passant est immense comme tout dans cette maison. Et je regarde le fils de la patronne au fond de la salle en train de manipuler son portable. Je tremble à chaque pas me souvenant des mots de Rama disant qu'il pouvait me virer en un claquement de doigt, perdre ce travail après une journée signifie que je vais dormir dans la rue, j'oserais pas retourner chez Safi, après les au revoir de ce matin. Plus j'avance et plus je sens que mon cœur est sur le point d'exploser. En posant le plateau, ma maladresse légendaire doublée de mon stress a fait parler d'elle. J'ai trébuché et tout s'est déversé. Il me jette des regards noirs et là je sens la mort toute proche.

            
            

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