Je la voyais différemment et elle me servit de modèle. Après le mariage, Tonton Fara venait en début de semaine et restait 3 jours. Il ne parlait pas beaucoup et restait au salon à lire ses journaux et regarder la télé. Quand tata rentrait tard du marché, tata Sophie restait avec lui au salon et je les entendais parfois rigoler ensemble. Quand tata rentrait c'est elle qui réchauffait et je la revoie encore dresser la table, mettre de l'encens, aller se changer et se parfumer pour venir manger avec tonton Fara. Pour quelqu'un qui mangeait parfois dans sa chambre et se couchait tout de suite après le changement était radical. Pendant ces jours, elle ne me voyait plus, ne s'occupait pas de ma présence ou pas dans la maison. Donc, intérieurement, la présence de tonton Fara me dérangeait mais je n'en laissais bien sur rien paraitre. Je demandais beaucoup d'attentions et elle n'en avait plus le temps. Et ca tombait à ma période d'adolescence.
Pendant cette période, mon corps changeait et me complexait. Mes seins poussaient, je grandissais, et je me rendais compte que j'étais trop mince. Comme toutes les ados, ce corps me foutait des complexes. Je me trouvais trop grande, trop mince et sans forme. Tout le monde me trouva belle et jolie mais pour moi j'étais bizarre. A cette époque je faisais tout pour grossir. Je mangeais comme une ogresse mais je ne prenais pas un gramme. Je mangeais tout, à n'importe quelle heure. Même tata Sophie était impressionné par les quantités d'aliments que je me forçais à manger et elle se plaignait souvent
- Je me demande cette petite tout ce qu'elle mange à quoi ca lui sert, disait elle tout le temps.
Moi je ne mangeais pas parce que j'avais faim mais juste pour prendre des kilos mais à un moment donné j'ai arrêté vu que ca ne servait à rien. Et c'était tout le contraire avec Coumba qui faisait tout pour maigrir alors que moi je la trouvai magnifique. Elle se trouvait trop grosse. Bizarre. Ca me déprimait et je me sentais mal dans ma peau ce qui a accentué ma timidité et ma propension à me renfermer sur moi-même. Les règles ont accentué mon mal être et je me suis encore plus renfermé sur moi-même. Je fuyais les gens et préférait de loin m'enfermer avec un bon roman que d'aller en groupe avec des amis comme me le proposait toujours Coumba. Mais j'ai quand même survécu à cette phase. Pour m'aider tata Fanta, m'avait inscrite à des cours de danse classique au village d'enfant SOS et ca m'a beaucoup aidé a accepté mon corps.
Je passais tranquillement les classes et j'étais très brillante. J'ai réussi mon BFEM avec succès et j'ai choisi la série scientifique car j'adorai les maths. Coumba était plus à l'aise avec la littérature et on a été séparé de classe à la seconde. Mais dès la sortie des classes on se retrouvait et on papotait jusqu'à la fin de la pause. Coumba à force de lire des roman d'amour se projettait dans chacun ses romans. Elle était à la quête perpétuelle du grand amour. Dès qu'un garçon la regardais une fois, ou lui parlais, elle se voyait déjà finir sa vie avec lui ; et même si ca n'aboutissais pas, elle ne se décourageait jamais. Persévérante jusqu'au bout. Moi j'étais plus réservé avec les garçons. Je recevais beaucoup de déclarations ou de garçons qui m'accostaient pour me parler. Mais souvent je coupais court à la discussion. J'étais trop en rage contre mon corps pour accepter qu'un garçon puisse s'intéresser à moi. Pourtant tout le monde disais que j'étais belle mais bon. Quand on a une vision déformée de soi même c'est difficile à accepter et j'espère que certaines personnes vont me comprendre.
En seconde, j'étais assise à coté de Mohamad. C'était un garçon charmant et très drôle. Au début j'avais droit à toutes sortes de déclaration d'amour. Mais je me contentai de rigoler sans rien répondre car il semblait s'amuser. Il était mignon, plus que mignon même. En plus il était travailleur, sérieux et adorai lire. On avait les mêmes centres d'intérêt. J'aimais discuter avec lui car il me faisait rire et on pouvait parler pendant des heures. Lui, ne cessait de me déclarer sa flamme. Un jour qu'on avait décidé de passer la journée au lycée, comme à son habitude, il s'est mis à me parler
- Diouldé, diouldé, offre moi ton cœur, je t'aime...
- Arrêtes tes bêtises Mouha... répondis je comme d'habitude
Ce jour la, il s'est assis en face de moi sur le table banc, m'a regardé droit dans les yeux et a pris un ton sérieux que je ne lui connaissais pas :
- Diouldé, spt je veux que tu m'écoute. Je sais que tu ne m'as jamais pris au sérieux, mais la je n'en peux plus. Diouldé c'est une véritable torture de te côtoyer tous les jours et que tu me prennes juste pour un ami. Je ne supporte plus ca car je suis vraiment mais alors vraiment amoureux de toi. Je me réveille en pensant à toi, je me couche en pensant à toi. Parfois c'en est même douloureux.
Il a baissé la tête sans trop savoir quoi ajouter et je suis est restée comme ca pendant longtemps. Moi je ne savais plus quoi répondre car cette fois ci j'étais convaincu qu'il était sérieux en me disant ca et je ne voulais en aucune façon le frustrer. Je lui ai pris la tête que j'ai lentement soulevé :
- Mouha, je ne sais pas quoi te répondre. Je n'ai jamais réfléchi à ce type de relation entre nous. Mais laisse-moi juste le temps d'y réfléchir.
Il n'a rien répondu et moi j'ai préféré prendre la tangente. J'ai cherché Coumba pour tout lui raconter et elle a sauté au plafond
- Je savais, je te l'avais dit. Il est tellement beau. Vos formez un beau couple ma chérie. Dis lui oui ou sinon je le dirai à ta place...
- Mais arrêtes donc, je le considère juste comme un frère. Mais je ne sais as comment lui dire non sans le frustrer
- Dans ce cas ne dis pas non. Essaie et si ça ne marche pas vous arrêterez.
C'était bien la première fois que j'étais confronté à un homme qui disait m'aimer et que je prenais vraiment au sérieux. Je me considéré encore trop jeune pour m'engager dans une relation amoureuse et surtout pas avec un jeune de ma classe. J'avais 16 ans et je me voyais mal dire à ma tante que je sortais avec un garçon. En plus dans mon fort intérieur, je songeais à Malick.
Le lendemain, je me suis assise à coté de lui toute gênée et lui aussi était plus calme. Il me faisait de la peine mais je n'étais pas disposé à sortir avec qui que se soit. Mais encore fallait il que j'ai le courage de le lui dire. Les jours qui suivirent je rentrais à midi et revenais à 15h évitant ainsi toute discussion. A la longue il comprit et un jour me glissa un mot dans mon sac. Je le vis à la maison et il m'expliquait qu'il m'aime plus que tout, mais qu'il préfère mon amitié à cette soudaine froideur qu'il a constatée ces derniers jours. Sa lettre était tellement triste que j'en pleurais. Le lendemain, à la pause, je suis allé lui parlé et lui ai expliqué que je ne suis pas prête pur une relation. Il a dit me comprendre et était décider à patienter. Notre relation s'est améliorer et avant la fin de l'année tout est rentré dans l'ordre. Il était devenu mon confident et s'occupait de repousser les avances des autres garçons. Beaucoup ont même cru qu'on sortait ensemble.
Durant ces vacances Malick devait venir car il avait terminé ses études et avait trouvé un stage dans une institution financière à dakar. Il devait d'abord avoir quelques jours de vacance avant de commencer le stage. J'attendais avec impatience et beaucoup d'appréhension son arrivée. Il est arrivé un dimanche soir et ce jour la, j'étais très nerveuse. J'étais allé voir mes parents et à mon retour je l'ai trouvé au salon en train de discuter avec son beau père. J'ai eu comme un choc en le voyant. Il était encore plus beau que dans mes souvenirs. Mon cœur battait tellement fort que j'avais peur que les autres ne l'entende. Grand, noir, beau, et toujours ce sourire qui creusait des fossettes. Pffff. Quand il m'a vu il a semblé un moment perdre le fil de sa discussion. Il m'a regardé avec des yeux ronds comme s'il me voyait pour la première fois.
-Diouldé ???
-bonjour Malick, dis-je timidement en lui tendant la main.
Il saisit ma main et me tira a lui pour me faire une grosse bise sur la joue. Je crois que si Rama était la, elle verrait que j'avais les oreilles rouges. Mon cœur battait fort et j'avais perdu tous mes moyens. Il me posait des questions mais je le regardais comme fasciné et ne répondait pas. Il m'avait gardé dans ses bras et continuer à parler à sa mère
- Mais maman Diouldé a vraiment grandi. Tu ne m'avais pas dit qu'elle était tellement jolie.
- Oh Malick, laisse diouldé tranquille. Même toi tu as grandi non ??
Je me libérais de son étreinte et m'assis sur le canapé. Comme pour rajouter à ma gêne, il vint s'assoir à coté de moi et continuait à me dévisager comme une peinture. Son cinéma fit rire tout le monde et c'est dans cette ambiance bon enfant qu'on a passé la soirée.
Ce soir la, après le diner, je suis montée me coucher. Je me peignais les cheveux en pensant à Malick quand on toqua doucement à la porte. C'était lui. Il s'était douché et changé. Il sentait bon et quand il est entré dans ma chambre je l'ai regardé avec de gros yeux. Mon cœur semblait vouloir sortir de ma poitrine et aucun son n'arrivait à sortir. Il tenait un sachet et me le remis
- Tiens Diouldé c'est pour toi
- Merci dis-je la voix tremblante en prenant le paquet.
Il se tenait debout au milieu de la chambre et me regardait fixement.
- Tu n'ouvre pas pour savoir ce que je t'ai ramené.
Je me suis assise sur le lit et le sachet contenait un coffret avec un lait de corps, un shampoing et un parfum. Tout ce que j'adorai
- Oh merci...c'est gentil
- C'est pour toi. Je ne savais pas trop quoi te prendre.
- Merci. Tu a du lire dans les pensées. J'adore les parfums.
- Arrête de me remercier comme ca. c'est tout à fait normal. Bon j'y vais et te laisser te reposer
- Ok dis je mais en fait je ne voulais pas qu'il parte.
Il est parti et a refermé doucement la porte. Cette nuit je m'endormis en pensant à lui.
Les jours qui suivirent j'appris à me familiariser avec Malick. Il était simple et très curieux. Il me posait des tonnes de questions et j'essayais de répondre. Il ne s'entendais pas avec tata Sophie et ca se voyait. Il ne faisait aucun effort pour lui parler et dès qu'il avait le dos tourné, tata Sophie lui faisait un « khélou » d'enfer. Ha si Rama était la, elle m'aurait dit ce qui s'était passé entre ces deux la. Malick me demandait toujours d'arrêter de paraitre gênée en sa présence et pour cela dès qu'il me voyait, il criait, venait me prendre dans ses bras, me soulevait et toutes autres types de singeries. Finalement, au bout de quelques jours, la gêne fit place à une complicité et je le taquinais sans cesse sur son accent français, sur la manie qu'il avait à son âge de jouer à des jeux vidéo. Il en riait donnait des explications comme quoi c'était encore un enfant. Maman nous regardait nous amuser sans rien dire. Mais quand elle était la, j'étais plus réservée. Elle m'avait toujours dit de faire attention aux hommes et dans cette situation Malick l'était même si c'était son fils. Je ne savais pas comment elle voyait notre complicité car elle ne disait rien.
J'étais très complice avec elle mais je ne savais pas comment aborder ce sujet. Il était souvent au téléphone et maman se plaignait que sa facture allait exploser ce mois avant qu'il ne commence son stage. Un samedi on alla ensemble au cinéma « Le Paris ». C'était la première fois que j'entrai dans une salle de cinéma et quand la première image est apparu dans la noir, j'ai sursauté et pris sa main ; ce qui m'a valu des blagues pendant des jours. C'était aussi l'époque du walkman (ne rigolez pas). C'était à la mode et il voulait que j'écoute du rap. Je n'aimais pas trop et préférais de loin la chanson française. Il avait juste 15 jour de vacance avant de commencer son stage et un soir il me proposa d'aller nous promener. Il voulait me dire quelque chose et voulait qu'on sorte pour le faire.
Mais ce soir la, ma mère m'a appelé pour me dire que mon père était malade depuis quelques jours et qu'il était hospitalisé. Je promis de lui rendre visite le lendemain et prévins ma tante qui voulais aussi venir. Je n'avais plus le cœur à sortir.
Le lendemain, je me suis donc réveillé très tôt et suis descendu dans la cuisine pour prendre mon petit déjeuner. En traversant le salon, j'ai aperçu Malick assis en train de répondre au téléphone. Je rebroussais chemin, quand je l'ai entendu raccrocher puis il m'a appelé
-Diouldé...pourquoi tu pars? Viens donc par ici.
Je me suis approchée. Il s'est levé et m'a fait la bise (cette manie qu'on les vacanciers a toujours faire la bise). Il était plus grand que moi et avait une petite barbe. Ca m'a piqué et je me suis gratté la joue. Il a souri, creusant une fossette sur sa joue.
- Ca pique, je viens de me lever et je ne me suis pas encore rasé
-....
- Tu n'es pas très bavarde ou tu n'as pas envie de me parler aujourd'hui
- Oh sii répondis je un peu trop rapidement ce qui le fit sourire.
- Tu sais Diouldé que tu es vraiment belle dit il en se mettant devant moi et en me regardant fixement.
J'avais enlevé mes éternels « lifes » et avait attaché mes cheveux par derrière.
On était encore debout à l'entré du salon et il était proche de moi. Un peu trop d'ailleurs au point de me gêner. Je m'éloignais un peu et me contentai de sourire. Je ne savais pas quoi répondre et je crois que je n'avais pas trop les idées en place. Ces temps ci ces petits rapprochement faisaient battre mon cœur plus vite et me troublaient.
-Arrête de me taquiner...
-je suis sur que tu entends tous les jours des compliments. Au fait tu as quel âge Diouldé ?
-17 ans, 18 dans 3 mois. Et toi ?
-50.. non je rigole. J'en ai 27. Si j'avais rencontré de jolies filles comme toi à mes 10 ans. Tu aurais pu être ma fille.
Le regard que je lui lançais, le fit rire à gorge déployée. Il était vraiment craquant quand il rigolait comme ca.
-J'allais prendre mon petit déjeuner.
- Allons y. dit il en me prenant la main pour partir dans la cuisine
Il était très tactile et ca me gênait énormément. Il parlait aussi beaucoup. Il m'a expliqué qu'il appelait son co locataire pour lui dire je ne sais quoi. Je l'écoutais en hochant la tête et en le regardant. Il était à l'aise dans la cuisine, allumant le gaz, sortant les tasses. .
-Tu n'es pas trop en forme aujourd'hui. Tu as un problème ?
- Mon père est malade et j'ai prévu d'aller le voir tout a l'heure
- c'est vrai tu me le disais hier. Mais j'espère que ce n'est pas trop grave ?
- Il est hospitalisé. Je crois que c'est le palu. Je dois y aller tôt pour pouvoir le voir.
- Je t'accompagne si tu veux, me demanda t-il gentiment.
- non ne te dérange pas si tôt. Maman a décidé d'y aller cet après midi. On ira ensemble sit u veux.
- ca marche ma belle...heureusement que maman n'était pas la quand tu me demandais mon âge. Elle aurait répondu que je suis en âge de me marier.
- et elle aurait raison...répondit maman qui venait d'entrer dans la cuisine. Tu es en âge de te marier et au lieu de cela chaque année tu me parle d'études qui ne finissent jamais.