- Tu n'a pas été à l'hôpital ? demanda t elle inquiète ?
- Non Tata, mais ma grand mère m'a donné des médicaments à boire
- Oh ma chérie... ne t'inquiète pas. Je prendrai soin de toi
- Et Rama ??
- Rama est parti au Canada. Elle a appelé chaque jour pour demander si tu étais rentré. Elle était très triste de ne pas te voir avant son départ...
Elle a continué à parler mais moi je venais encore de recevoir un choc. Ma sœur, ma moitié était partie. Moi qui comptai sur elle pour lui confier ces horreurs. C'était comme si je venais de perdre une partie de moi. Une fois à la maison, j'ai encore plus ressenti ce vide, mais pour ne pas attrister tata, j'ai fais comme si de rien n'était. J'ai aussi demandé Malick le coeur battant et tata m'a répondu qu'il était aussi rentré et elle était bien seule à la maison. .
J'avais l'impression d'être partie depuis une éternité. Je suis rentré dans la chambre de Rama et j'ai trouvé ses armoires à moitié vidée. Devant la réalité de son départ, je me suis mise à pleurer. Les larmes coulaient et se sont vite transformée s en sanglots incontrôlables. Je ne pouvait plus m'arrêter. Je pleurais pour les souffrances passées, pour le départ de Rama. tata Sophie est passé et m'a trouvé dans cet état et a alerté tata. Tata Fanta est venue et m'a amener dans sa chambre pour me réconforter. Je me suis blottie dans ses bras et j'ai continué à pleurer. Elle m'a posé toutes sortes de questions mais je répétais juste le nom de Rama. Je ne pouvais pas lui raconter tout ce que j'avais enduré. J'ai fini par dormir dans sa chambre et le lendemain j'allai mieux. J'avais encore cette tristesse au fond du cœur mais pour ne pas inquiété tata je ne laisser rie paraître. Je devais commencer le collège ce jour là et tata m'a accompagné.
L'année scolaire avait déjà commencé et mon nouvel établissement se trouvait sur l'avenue cheikh Anta. C'était un lycée d'application (que certaines ont surement du fréquenter) avec un excellent niveau d'enseignement. Tata m'avait trouvé un abonnement aux bus SOTRAC car après le départ de Rama, elle avait arrêté le chauffeur et conduisait elle-même son véhicule. Mais comme elle ne pouvait pas se lever tôt le matin donc je prenais le bus. Je me suis vite rendu compte que je n'étais pas la seule du quartier à aller dans cet établissement et c'est ainsi que quelques jours après, je me faisais conduire par des voisins. A mon arrivée, ma tante est allée expliquer au censeur que j'étais malade et que c'est pour cette raison que je suis venue en retard. Heureusement ma voisine de table m'a prêtée ses cours et je me suis vite rattrapé. Ahh ma voisine... c'est Coumba. Coumba était une fille gentille mais tellement extravagante et exubérante. Elle faisait tout pour se faire remarquer ce qui était tout mon contraire. Mais dès le début, nous avons été proches. Elle disait qu'elle m'adorait parce que ca remontait sa cote de fréquenter une fille aussi jolie. Ca me faisait rire mais je ne la suivais pas toujours dans ses délires. A la récréation, elle voulait toujours qu'on aille discuter avec les garçons mais moi je préférais rester en classe. A la pause tout le monde sortait et le bruit ainsi que le monde m'impressionnait et m'intimidait. C'est vrai que j'étais très timide et je faisais tout pour passer inaperçu ce qui était assez compliqué quand on est de teint clair et grande ; donc je m'enfermais dans une carapace qu'on appelle le silence. A l'école je parlais peu avec les autres sauf avec Coumba qui avait juste besoin qu'on l'écoute. Ca l'importait peu que je réponde ou pas. Parfois, elle me posait une question, y répondait, me redemandait si la réponse qu'elle a donné est bien exacte, et y répondait encore...enfin une vrai tornade cette fille. Elle habitait les Sicap avec ses parents et au fil des années je connaissais sa famille et elle aussi venait à la maison.
On avait plusieurs cours et les nombreux profs nous bourraient de leçons. C'était nouveau et ca nous faisait nous sentir...disons matures. Je lisais beaucoup à l'époque : club des cinq, fantomette (ca va rappeler des souvenirs à certaines). C'étaient les livres de Rama que je récupérais. Il y avait aussi des bandes dessinées pif et hercule, tintin...et bien entendu comme toute bonne adolescente qui se respecte, les arlequins. J'en ai lu juste quelques uns car ce genre ne m'intéressait pas beaucoup, mais Coumba les dévorait. Je me souviens que la première fois que j'ai lu un arlequin, j'ai eu l'impression de commettre une grosse gaffe. Ce jour la, quand tata Sophie est entré dans la chambre, j'ai sursauté et caché le livre comme si j'avais de la drogue. J'ai eu peur qu'elle raconte à tata que je lisais ces livres qui parlais d'amour et décrivaient des choses pas du tout respectables. Finalement pour ne pas avoir a toujours me cacher, je disais à Coumba que je n'aimais pas et je pense que je préférais mes bandes dessinées, ou les enquêtes d'Agatha Christie.
Ma vie à continué tranquillement entre mes cours, et mes autres activités. Il fallait aussi insérer les moments que je passais avec ma vraie famille. J'y allai aussi souvent que possible et mes relations avec ma mère se sont améliorées mais toujours avec cette part de gêne entre nous. Ca me faisait toujours mal de penser qu'elle m'avait jeté en pâture à des sorcières qui m'on charcutées. La seule fois ou on en parlé c'était quand elle repartait en guinée suite au décès de son père. Elle était triste et moi aussi ca me faisais beaucoup de peine mais intérieurement, je pensais que puisqu'elle amenait la petite Fanta, on risquait de lui faire subir la même chose. Donc au moment ou elle rangeait ses affaires, je lui ai demandé si on n'allait pas exciser Fanta. Elle m'a assuré que non, et qu'elle avait autre chose en tête. Elle ne comptait pas rentrer de si tôt et m'avait chargé de passer régulièrement voir mon père.
Pendant tout ce temps, il y avait aussi les coups de fil régulier qu'on passait à Rama. Tata l'appelait toutes les semaines. C'étaient des moments de bonheur pour moi d'entendre ma Rama. On discutait et elle me racontait sa vie la bas. Elle avait rencontré un canadien la bas et ils s'aimaient. Quand elle me parlait de lui elle s'assurait que sa mère était loin du combiné. Il était blanc et doutais que sa mère accepte cette relation. Moi aussi je lui parlai de mes cours et aussi ma vie. Souvent c'est tata qui venait pour raccrocher de force le téléphone. Après elle appelait malick et moi je ne sais pas pourquoi, c'est toujours le cœur battant que je lui parlais. Il me taquinait et me posait pleins de questions. Après lui avoir parlé je passais des jours à penser à lui et je luttai contre ca car je ne comprenais pas qu'un garçon puisse me perturber comme ca.
Un jour, j'étais en 4ème si je ne me trompe, tata Fanta m'a appelé :
- Ma chérie, j'ai une bonne nouvelle. Dans quelques jours je vais me remarier.
J'étais étonnée et je ne disais rien. Depuis quelques temps, tonton Farah venait plus souvent à la maison et restait plus longtemps. Il était gentil et passait son temps à regarder la télé. Je n'étais pas toujours pressé de le voir, car on devait sortir du salon pour le laisser regarder la télé. Il venait toujours bien habillé et sentais très bon. A part lui, il y avait des frères de son défunt mari qui venait mais parfois elle me disait d'aller leur dire qu'elle était malade.
- Tu sais je n'ai jamais voulu me remarier pour ne pas perturber les enfants. Mais maintenant ils sont grands et je suis toute seule. Heureusement que tu es la pour me tenir compagnie.
- Est-ce que c'est tonton Farah ?? demandais-je
- Oui c'est lui ? comment tu le trouve ?
- Il est gentil maman. Est-ce qu'il va venir vivre ici ?? En fait je pensais plus à ma télé...
- Il viendra de temps en temps. Il a une autre épouse.
J'étais contente pour tata. Elle semblait plus épanouie. Je la trouvai déjà belle, grande, noire et toujours bien habillée. Elle a toujours été une battante. C'est à ce moment qu'elle m'a expliqué son histoire avec le père de Rama et Malick.
Elle est arrivée à Dakar à l'âge de 12 ans et venait de son Fatick natal. Elle n'a jamais connu son père qui est décédé très tôt et venait de perdre sa mère. Donc toute seule, elle est venue vivre auprès de son oncle, commerçant à Sandaga. Malheureusement, son oncle lui a demandé d'arrêter ses études pour aider sa femme dans la maison. Sa tante lui a fait subir toutes sortes de brimades, mais elle a tenu bon. Et c'est en apportant tous les jours le repas à son oncle qu'elle a rencontré celui qui deviendra son mari. C'était aussi un commerçant qui tenait une boutique de pièces détachées pas loin du magasin de son oncle. Elle avait 18 ans et lui était beaucoup plus âgée. Elle a accepté de l'épouser pour échapper à la tyrannie de sa tante mais aussi parce que cet homme l'aimait beaucoup. Après leur mariage, elle est allée vivre auprès de son mari qui ne voulait plus qu'elle se fatigue. Ainsi, elle lui trouva une bonne et l'inscrivit à une formation en couture qui lui permit plus tard d'ouvrir un atelier. Lui aussi fit fortune et a immigré vers les Etats Unies à la naissance de Rama. Il a travaillé dur et a pu construire la maison et a aussi permis tata de voyager. Elle fait partie des premières commerçantes à amener des tissus et de l'or. Ses affaires florissaient mais son mari est tombé malade. Il est revenu au Sénégal mais quelques temps après il est décédé. Après sa mort, les problèmes de successions ont émaillé son deuil. La famille de son mari voulait vendre la maison mais elle s'est battu et a tenu bon. Pour le bien de ses enfants elle n'a pas voulu se remarier se consacrant uniquement à l'éducation de ses petits. La famille de son mari ne mettait plus les pieds chez elle. Elle a pris sous son aile sa demi sœur Sophie qui se trouve en fait être la fille de l'oncle qui l'avait accueilli et frère de son père. Elle m'a même avoué qu'elle savait que Sophie disais et faisais beaucoup de méchanceté mais qu'elle avait décidé de fermer les yeux car elle la considérait comme sa propre sœur.