Chapitre 6 Course de la Mort

« Qu'est-ce que tu veux dire par là ? », a demandé Sebastian en lançant à Emilia un regard méfiant, la suspicion évidente dans ses yeux.

« Course de la Mort », a répondu Emilia, d'un ton calme et assuré.

Une vague de stupeur a parcouru la foule.

Elle avait perdu la tête ? La Course de la Mort était tristement célèbre, bien plus mortelle que n'importe quelle autre course classique. Elle exigeait non seulement des réflexes aiguisés comme des lames, mais aussi des nerfs d'acier.

Même la version d'entrée de la Course de la Mort était impitoyable. Le parcours consistait en une ligne droite, mais à l'arrivée se trouvaient deux barils d'essence.

Les coureurs devaient foncer sur la piste à toute vitesse, poussant leur voiture jusqu'à ses limites, mais ne pouvaient freiner qu'après avoir franchi une marque bien précise.

Quiconque ralentissait trop tôt était immédiatement éliminé, tandis que ceux qui osaient s'approcher au maximum des barils d'essence avaient les meilleures chances de l'emporter.

La moindre erreur était fatale. Chaque pilote devait calculer avec précision la distance que sa voiture continuerait à parcourir après avoir freiné, sous l'effet de l'élan.

La moindre erreur, qu'il s'agisse de freiner trop tôt ou trop tard, pouvait signer l'échec ou une collision directe avec les barils, provoquant une catastrophe enflammée.

Et ce n'était là que la manche d'entrée ; les étapes suivantes étaient encore plus dangereuses.

Malgré les probabilités macabres et le nombre de morts chaque année, les amateurs d'adrénaline se précipitaient toujours au départ, incapables de résister à l'appel de la Course de la Mort.

La récompense en argent était si extravagante que certains étaient prêts à risquer leur vie juste pour une chance de l'obtenir, sans parler des gains colossaux générés par les paris parallèles.

Le visage de Rodger s'est durci. « Tu as perdu l'esprit ? »

Emilia a répliqué : « Qu'est-ce qu'il y a, Rodger ? Tu as peur de m'affronter ? »

Rodger la fixait, stupéfait et indigné, incapable de trouver ses mots.

Comment une femme qui avait passé ses journées en tant qu'épouse au foyer osait-elle défier un pro, dans la course la plus dangereuse qui soit, en plus ?

Était-ce une tentative désespérée d'attirer son attention, ou bien était-elle simplement irréfléchie à l'extrême ?

Pensait-elle sérieusement pouvoir se mesurer à Ace, la légende vivante du circuit ? Quelle plaisanterie ! Ace était intouchable !

À ce moment-là, Violet s'est approchée de Rodger, se lovant contre lui avec une fragilité affectée.

Sa voix était douce, dégoulinante de fausse compassion. « Emilia, tu réalises à quel point la Course de la Mort est imprévisible, n'est-ce pas ? Tu veux punir Rodger en mettant ta propre vie en jeu ? »

« Arrête ton numéro dégoûtant. J'ai juste envie de t'éclater la figure », a lâché Emilia, le visage tordu de mépris.

Des larmes feintes ont affleuré aux yeux de Violet alors qu'elle levait vers Rodger un regard tremblant. « Rodger... »

Il l'a prise par les épaules, cherchant à l'apaiser d'une voix douce. « Ne t'inquiète pas, Violet. Je suis là. Elle ne pourra rien contre toi. »

Une fois Violet calmée, Rodger s'est tourné vers Emilia avec un regard tranchant comme une lame. « Emilia, tu ferais bien de te tenir à carreau. Prononce encore un mot contre Violet, et je te jure que tu ne t'en sortiras pas. Je ne plaisante pas. Si quelque chose lui arrive à cause de toi, tu le regretteras toute ta vie. »

La rage dans les yeux de Rodger donnait l'impression qu'il était prêt à tout pour Violet.

« Et qu'on soit bien clairs. Ne te berce pas d'illusions avec tes espoirs ridicules. Il n'y a aucun monde où je te choisirais, toi. Violet est tout pour moi. Elle l'a toujours été, et elle le sera pour toujours. »

L'esprit de Rodger s'est échappé vers ses souvenirs de jeunesse, vers la Violet angélique qui l'avait sauvé un jour. Dans son cœur, Violet avait toujours été irremplaçable.

Imaginer qu'Emilia puisse un jour la remplacer relevait du pur fantasme.

Blottie dans les bras de Rodger, Violet a lancé à Emilia un regard arrogant, triomphant.

Emilia ne lui arriverait jamais à la cheville. Tous les hommes qu'elle voulait finissaient toujours par la choisir, elle. Et jamais elle ne révélerait à Rodger que celle qui l'avait sauvé autrefois, c'était en réalité Emilia.

Rodger, quant à lui, scrutait le visage d'Emilia, attendant de voir si ses mots allaient la briser.

Mais ses yeux restaient clairs, ne trahissant rien. Pas la moindre trace de tristesse, pas le moindre trouble en surface.

Le calme distant d'Emilia a déstabilisé Rodger. Il ne correspondait pas au souvenir qu'il avait d'elle, cette femme qui pendait à ses lèvres et aurait tout fait pour lui plaire.

Pour quelqu'un qui l'avait aimé de tout son cœur, Emilia ne montrait même pas un frisson face à sa cruauté.

Rodger s'est convaincu que ce n'était qu'un masque, sûrement une façade froide pour attirer son attention.

Cette pensée l'a rassuré. Il n'y avait pas moyen qu'Emilia, qui l'avait adoré, l'oublie aussi facilement.

Il en était certain : si elle s'était montrée ici, prétendant l'indifférence, c'était pour mieux l'attirer.

Il croyait que sa façade finirait par se fissurer, et qu'elle se mettrait à genoux, le suppliant du regard.

Pensait-elle vraiment pouvoir jouer à ce petit jeu et le tromper ? Quelle blague ! Il était persuadé de voir clair en elle.

À ses yeux, elle resterait toujours la même : une simple épouse au foyer prisonnière de ses routines, bien trop banale pour devenir cette femme que l'on admire. Elle n'avait aucune chance de se réinventer.

L'imagination de Rodger a projeté l'image d'Emilia, à genoux, le visage inondé de larmes, le suppliant pour une miette d'attention.

Cette vision a fait naître un rictus de mépris sur ses lèvres alors qu'il la fixait.

Il s'apprêtait à lui asséner une nouvelle salve de mots cruels quand la voix d'Emilia a tranché net la tension.

« Assez de fanfaronnades. Tu as vraiment les tripes de m'affronter dans la Course de la Mort ? » Emilia a soufflé, sa voix ferme et inébranlable.

Sebastian est intervenu, haussant un sourcil : « Et quelle est la mise ? »

Emilia a croisé son regard avec un sourire froid. « Si vous perdez, je prends vingt pour cent des parts du Groupe Mitchell. Ce n'est pas trop demander, non ? »

Un souffle collectif a traversé la foule. Pas trop demander ? Elle avait perdu la tête ?

« Tu plaisantes, j'espère. Qu'est-ce qui te fait croire que tu mérites vingt pour cent du Groupe Mitchell ? », a raillé Sebastian.

« Qu'est-ce qu'il y a ? Peur de perdre ? », a rétorqué Emilia. « Si tu n'as vraiment aucune confiance en ton frère, Sebastian, tu peux toujours parier sur moi. »

Sebastian a explosé, la voix montant d'un cran : « Ne dis pas de bêtises ! Rodger ne perdrait jamais contre toi. Si je dois miser, ce sera sur lui, pas sur toi. Tu n'es rien ! »

Le regard de Rodger s'est glacé alors qu'il fixait Emilia. « Très bien. Je mets vingt pour cent des parts en jeu. Et toi, qu'est-ce que tu mises ? »

Les lèvres d'Emilia se sont étirées dans un sourire lent et chargé de sens. « Un traitement par Asclepius. Ça te semble assez équitable ? »