Démasquer sa duplicité, Reprendre ma vie
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Chapitre 4

Point de vue de Camille :

Je me suis dit que ce serait un incident isolé. Une mauvaise première impression. Mais j'avais gravement sous-estimé la ténacité de Flora. Elle n'était pas seulement une prédatrice ; c'était un boa constrictor, resserrant lentement, méthodiquement, son étreinte.

Elle devint un élément permanent de la maison Beaumont. Elle était toujours là, drapée sur Baptiste, son rire résonnant dans des pièces où il n'avait pas sa place. Elle jouait le rôle de la future belle-fille parfaite à un degré nauséabond, se souvenant toujours du scotch préféré de Charles ou apportant à Geneviève un bouquet de leurs pivoines favorites.

Mais ses attaques contre moi devinrent une sorte de sport pour elle, une série de petites coupures calculées.

Elle le faisait quand Baptiste était présent mais distrait, ou quand les parents étaient juste hors de portée de voix.

« Camille, cette robe est... intéressante », disait-elle en me toisant avec un sourire apitoyé. « C'est un peu austère pour une jeune femme. Tu devrais me laisser t'emmener faire du shopping. Il faut qu'on te trouve quelque chose qui te donne l'air moins... académique. »

Ou bien elle évoquait mes études avec un ton d'admiration feinte qui n'était que pure condescendance. « Tout ce travail pour ton diplôme d'architecture, c'est tellement impressionnant ! Mais vraiment, tu n'as pas besoin de te donner tant de mal. Tu auras toujours les Beaumont pour prendre soin de toi, n'est-ce pas ? »

L'implication était toujours la même : j'étais une dépendante, un cas de charité, une vieille fille en formation qui n'avait pas sa place dans leur monde glamour.

La goutte d'eau qui fit déborder le vase, avant la véritable explosion, arriva lors d'un petit dîner de famille avec quelques cousins de Charles. L'une d'eux, une douce tante âgée nommée Carole, me faisait des éloges.

« Cette bourse pour ton école est tout simplement merveilleuse, Camille. Tes parents auraient été si fiers. »

Je sentis une chaleur familière se répandre dans ma poitrine. Avant que je puisse la remercier, Flora, qui était assise à côté de moi, passa un bras autour de mes épaules. Son contact me fit l'effet d'une araignée rampant sur ma peau.

« N'est-elle pas la meilleure ? » gazouilla Flora en me serrant fort. « Baptiste et moi en parlions justement. Nous sommes si fiers de notre petite sœur. » Elle insista sur le mot « petite » avec une tape condescendante sur mon bras. « En fait, une fois que Baptiste et moi serons mariés, je me ferai un devoir de trouver un mari à Camille. Il est grand temps qu'elle quitte la maison et fonde sa propre famille. On ne peut pas la laisser devenir une vieille fille, n'est-ce pas ? »

La table devint silencieuse.

On aurait pu entendre une mouche voler. Les cousins échangèrent des regards gênés. Le visage de Geneviève se figea.

Être traitée de dépendante était une chose. Voir mon avenir tracé pour moi comme si j'étais un bien à liquider, devant ma famille ? Cela dépassait une limite que je ne savais même pas exister.

Mon corps tout entier se glaça. Je posai lentement ma fourchette.

Geneviève lança un regard à Baptiste, un ordre silencieux et furieux de maîtriser sa petite amie. Baptiste, à son crédit, avait l'air mortifié. Il attrapa le bras de Flora, sa voix un sifflement bas. « Flora, arrête. »

Mais Flora était lancée. Soit elle ne vit pas son avertissement, soit elle s'en fichait. Elle prit un morceau d'asperge du plat de service et le posa dans mon assiette.

« Tiens, ma chérie, tu dois manger plus. Tu es trop maigre », dit-elle, sa voix dégoulinant d'une fausse inquiétude.

Je fixai la tige d'asperge posée au milieu de ma purée. Je regardai son visage parfaitement maquillé, ses yeux souriants et suffisants. Et quelque chose en moi, quelque chose qui avait patiemment absorbé son poison pendant des semaines, finit par craquer.

J'étais sur le point de parler, de dire quelque chose d'impardonnable, quand une voix grave trancha la tension comme une guillotine.

« Flora. »

C'était Charles. Il avait posé son verre de vin, et le son résonna dans la pièce silencieuse. Il ne la regardait pas, mais sa voix était chargée d'une autorité si froide qu'elle tressaillit.

« Camille est notre fille », dit-il, sa voix calme mais portant le poids d'un décret de fer. « Son avenir lui appartient. Sa place dans cette maison est permanente et non négociable. C'est la dernière fois que je veux vous entendre, ou qui que ce soit d'autre, suggérer le contraire. C'est bien clair ? »

Le sourire de Flora s'évanouit. Son visage passa de suffisant à blanc comme un linge en un battement de cœur.

« Oui, Charles », marmonna-t-elle, les yeux écarquillés de choc. « Je... je suis désolée. Je plaisantais juste. »

« Ce n'était pas drôle », dit-il, se tournant enfin pour la regarder. Son regard était glacial. « Ne recommencez pas. »

Il reprit son verre de vin et but une gorgée, l'affaire était close.

Le reste du dîner fut une agonie. Flora ne dit plus un mot, se contentant de picorer sa nourriture avec une expression orageuse. Je savais que j'aurais dû me sentir victorieuse. Mon père m'avait défendue, sans équivoque. Mais tout ce que je ressentais était un nœud d'angoisse. Je n'avais pas gagné une bataille. J'avais juste rendu l'ennemi plus déterminé.

Et alors que Flora me lançait un regard par-dessus la table, un regard de haine pure et sans mélange, je sus que sa prochaine attaque ne se ferait pas avec des mots.

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