Elle expliqua comment le scandale avait anéanti Monsieur Martin. Le financement du centre était gelé. Les parents retiraient leurs enfants. Le rêve qu'ils avaient construit ensemble se transformait en cauchemar.
« Le coup de grâce, » dit Madame Gable, sa voix baissant à un murmure, « a été l'annonce. »
« Quelle annonce ? » demanda Kenza.
« Estelle Dubois. Elle a fait une déclaration à la presse. Elle a dit que son mariage avec Hadrien était réel, et que votre acte de mariage... était un faux. Juste un autre accessoire pour leur jeu malsain. »
Le monde bascula. Kenza sentit le sol se dérober sous ses pieds.
« Non, » murmura-t-elle. « Ça ne peut pas être vrai. »
Elle se souvint du jour où il le lui avait donné. Il l'avait emmenée dans un petit bureau à l'allure officielle. Un homme avait tamponné le papier. Hadrien l'avait embrassée, lui disant qu'elle était sa femme maintenant, pour toujours.
Tout était un mensonge. La promesse la plus sacrée qu'il lui avait faite n'était qu'une autre ligne de leur scénario tordu.
Sa tête la lançait. La douleur était si intense qu'elle crut que son crâne allait se fendre.
Le visage de Madame Gable, autrefois plein de sympathie, était maintenant dur de ressentiment.
« Vous saviez, n'est-ce pas ? » siffla-t-elle. « Vous jouiez le jeu, vous l'utilisiez, vous nous utilisiez, pour vous venger d'elle. Et vous avez laissé un homme bon mourir pour vos jeux mesquins. »
Elle traîna Kenza jusqu'à l'entrée de la chapelle. « Regardez ce que vous avez fait. Vous êtes égoïste. Vous avez tout détruit. »
« Je suis désolée, » cria Kenza, les mots arrachés de sa gorge. « Je suis tellement désolée. Je ne savais pas. »
Mais ses excuses étaient vaines. Si elle n'avait jamais rencontré Hadrien, si elle n'avait jamais offensé Estelle ce jour-là au café, si elle était simplement restée dans son propre monde, Monsieur Martin serait encore en vie.
La culpabilité était un poids physique, l'écrasant.
Juste à ce moment-là, un livreur en scooter s'arrêta. « Vous êtes Kenza Hédi ? »
Il lui tendit une grande boîte à gâteau d'apparence joyeuse.
« C'est de la part d'une Mademoiselle Dubois, » dit-il. « Elle m'a dit de vous dire : "Joyeuses funérailles ! J'espère que vous appréciez le dernier canular !" »
Les yeux de Kenza tombèrent sur l'étiquette cadeau de la boîte. C'était une carte pré-imprimée d'une pâtisserie chic. Mais en bas, dans l'écriture familière et élégante d'Hadrien, il y avait une signature. « H. »
Il savait. Il avait approuvé ça. Ce dernier acte de cruauté macabre.
Le dernier fragment de son cœur se changea en pierre.
Elle resta jusqu'à ce que tout le monde ait quitté le cimetière. Elle déposa un unique lys blanc sur la tombe de Monsieur Martin.
« Je le promets, » murmura-t-elle à la pierre froide, « je ne serai plus jamais cette fille faible et stupide. Je vivrai. Et je les ferai payer. »
Elle retourna au penthouse. Elle n'entra pas en douce cette fois. Elle franchit la porte d'entrée.
Hadrien, Estelle et sa grand-mère, Annabelle, étaient dans la salle à manger, savourant un repas somptueux. La scène était chaleureuse, domestique. Une famille parfaite.
Dès qu'elle entra, les rires cessèrent. L'air devint lourd de tension.
Annabelle de la Roche la regarda avec un mépris pur. « Regardez ce que le chat a ramené. Tu ne connais pas ta place, ma fille ? »
Kenza l'ignora. Elle avait enduré les insultes de classe d'Annabelle pendant trois ans. Elles n'avaient plus aucun pouvoir sur elle. Elle commença à passer devant eux, pour monter les escaliers.
« N'ose pas me tourner le dos quand je te parle, » claqua Annabelle. « Tu dois apprendre que certaines choses, et certaines personnes, ne t'appartiendront jamais. »
Elle désigna Estelle. « Hadrien va épouser Estelle. Le mariage est la semaine prochaine. Elle portera les bijoux de la famille de la Roche. Elle sera la prochaine Madame Dalton. »
Kenza se figea dans les escaliers. La semaine prochaine. Le mariage qu'elle avait passé trois ans à planifier avait toujours lieu. Seule la mariée avait changé.
« C'est juste pour apaiser ma grand-mère, » dit rapidement Hadrien, regardant Kenza avec des yeux suppliants. « Ça ne veut rien dire. »
Estelle rit. « Bien sûr que ça veut dire quelque chose, chéri. Ça veut dire que tu te débarrasses enfin des ordures. » Elle regarda Kenza, ses yeux brillant de malice. « Tu sais, on a encore besoin d'une demoiselle d'honneur. Je serais ravie de t'avoir. C'est le moins que tu puisses faire, après tous les ennuis que tu as causés. »