Chapitre 3

Le rendez-vous avec le directeur a été un désastre.

Madame Martin était là, convoquée elle aussi, et elle est arrivée comme une furie.

Avant même que mes parents aient pu finir d'expliquer la situation, elle a commencé à crier.

« Ma fille, une harceleuse ? Vous plaisantez ! C'est votre fille, Amélie, qui est jalouse de la réussite de Chloé ! C'est elle qui cherche des problèmes ! »

Elle a dressé un portrait de Chloé en victime, une élève brillante et populaire persécutée par une camarade envieuse.

Son assurance était telle que le doute s'est installé sur le visage du directeur.

Mes parents ont tenté de raisonner, de présenter des faits, mais la mère de Chloé dominait la conversation par sa voix forte et ses accusations.

L'affaire s'est terminée sans aucune mesure concrète, juste une vague promesse du directeur de "garder un œil sur la situation".

Pour Chloé, c'était une victoire totale.

Elle est revenue au collège le lendemain avec un air de triomphe.

Elle savait maintenant qu'elle avait le soutien inconditionnel de sa mère et que l'école ne ferait rien.

Elle a décidé de passer à la vitesse supérieure.

Quelques jours plus tard, une somme d'argent collectée pour une sortie scolaire a disparu de la salle de classe.

L'argent était dans une enveloppe, posée sur le bureau de la professeure.

Pendant la récréation, Chloé m'a demandé de l'aide pour un exercice, me retenant dans la classe alors que tout le monde était sorti.

Je n'ai rien vu de suspect.

À la fin de la journée, quand la professeure a réalisé que l'enveloppe avait disparu, la panique s'est installée.

Chloé a immédiatement levé la main.

« Madame, j'ai vu Amélie près de votre bureau pendant la récréation, elle était toute seule. »

Tous les regards se sont tournés vers moi.

J'ai protesté, j'ai dit que Chloé était avec moi, mais elle a nié.

« Non, je suis sortie juste avant la sonnerie, tu es restée seule dans la classe, » a-t-elle dit avec un air innocent.

Les autres élèves de son groupe ont appuyé ses dires.

La professeure, désemparée, a décidé de fouiller les sacs.

Et bien sûr, l'enveloppe avec l'argent a été retrouvée dans mon sac à dos.

Je n'arrivais pas à y croire.

J'ai compris qu'elle avait dû la glisser dedans quand j'avais le dos tourné.

Mais je n'avais aucune preuve.

J'ai été convoquée dans le bureau du directeur, cette fois comme une coupable.

J'ai pleuré, j'ai juré que j'étais innocente, mais les preuves étaient contre moi.

J'ai été suspendue de l'école pendant une semaine et j'ai dû rembourser l'argent.

Le pire n'était pas la punition, mais la honte.

La rumeur s'est répandue comme une traînée de poudre, j'étais devenue "la voleuse".

Même les quelques élèves qui me parlaient encore ont commencé à m'éviter.

Mes parents étaient dévastés, mais ils me croyaient.

Ils savaient que je n'aurais jamais fait une chose pareille.

Ils ont compris que l'environnement scolaire était devenu trop toxique pour moi.

C'est là qu'ils ont commencé à envisager de me faire changer de collège.

Ils voulaient me protéger, m'offrir un nouveau départ loin de Chloé et de sa famille.

Mais alors que nous étions en train de gérer cette crise, un nouveau coup est tombé, bien plus grave.

Un soir, mon père est rentré du travail plus tard que d'habitude, le visage pâle et défait.

Il s'est assis lourdement sur une chaise dans la cuisine, sans dire un mot.

Ma mère s'est approchée de lui, inquiète.

« Qu'est-ce qui se passe, chéri ? »

Il a levé les yeux vers elle, le regard vide.

« Il y a eu une réorganisation au bureau. Une nouvelle direction a été nommée. »

Il a fait une pause, comme si les mots lui coûtaient.

« C'est le père de Chloé, Jean-Luc Martin. Il est devenu mon supérieur direct. »

Un silence glacial est tombé dans la cuisine.

Nous avons tous compris ce que cela signifiait.

Le harcèlement ne se limitait plus à la cour de récréation, il venait d'entrer dans notre vie d'adulte, menaçant la stabilité même de notre famille.

La guerre était déclarée sur tous les fronts.