Vingt ans. J'ai été Kyle Larson, le jeune maître du Château Evans, pendant vingt ans. Vingt ans d'une vie de luxe, choyé par des parents que je croyais miens, aimé par une fiancée que je pensais m'être destinée.
Tout s'est effondré il y a trois mois, le jour où Alan Evans, le véritable héritier, est revenu.
Mon monde s'est écroulé. L'amour de mes "parents", les points de séduction que mon système biologique m'avait fait accumuler pendant toutes ces années, tout est tombé à zéro. Je n'étais plus qu'un imposteur, un usurpateur.
La famille Evans m'a jeté dehors sans un regard. Seule ma fiancée, Juliette Moore, est restée à mes côtés. Je pensais naïvement qu'elle était mon dernier espoir.
Jusqu'à ce qu'elle me dise, d'une voix plus froide que la pierre :
« Donne un de tes reins à Alan, Kyle. Si tu le fais, je t'épouse. »
Je la fixais, incapable de croire ce que je venais d'entendre. Mon cœur, déjà brisé, se fissurait un peu plus.
Elle a continué, son ton pragmatique et dénué de toute chaleur.
« Tu as ce système de régénération. Tu vivras très bien avec un seul rein. Mais Alan, lui, il va mourir sans cette greffe. C'est la seule façon de rembourser ta dette envers les Evans. »
Ma dette ? Quelle dette ? Celle d'avoir été échangé à la naissance sans mon consentement ? Celle d'avoir été le sujet d'une expérience secrète ?
Une douleur aiguë m'a traversé la poitrine. Ce n'était pas une douleur physique, mais celle de mon système qui réagissait à mon désespoir. "Points de séduction de Juliette Moore : -100. Statut actuel : Haine."
Je me suis souvenu de toutes ces années passées à essayer de gagner son amour, à accomplir des "missions" pour augmenter ses points. Chaque sourire, chaque cadeau, chaque moment partagé n'était qu'un chiffre dans une interface que moi seul pouvais voir. Et maintenant, tout était réduit à néant.
Pire encore, je me suis rappelé pourquoi ses points avaient chuté si vite. Alan, depuis son arrivée, n'avait cessé de la manipuler. Il prétendait que j'avais été cruel avec lui enfant, qu'il avait des souvenirs de moi le maltraitant, alors que nous ne nous étions jamais rencontrés. Juliette l'avait cru.
Épuisé, vidé, j'ai fini par accepter. Peut-être qu'en donnant ce rein, je pourrais enfin être libre.
Le lendemain, mon "père", M. Evans, m'a tendu un formulaire de consentement. "Don volontaire par culpabilité", était-il écrit.
« Signe ça. C'est le moins que tu puisses faire après avoir volé la vie de mon fils. »
Le voir me regarder avec un tel mépris, lui qui m'avait élevé, a été la goutte d'eau. J'ai arraché le papier de ses mains et l'ai déchiré en mille morceaux.
« Je donnerai mon rein. Mais pas par culpabilité. »
Une gifle violente m'a envoyé au sol.