L'appel du vide, la voix de l'amour
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Chapitre 2

Le lendemain de ma "renaissance", mon premier objectif était clair : retrouver Marc. Je ne connaissais que son prénom et sa profession. Ce n'était pas grand-chose, mais c'était un début.

Je ne pouvais pas simplement appeler le 18 et demander : « Bonjour, je cherche un pompier nommé Marc qui m'a sauvée d'un suicide hier soir. » On m'aurait probablement internée.

Il fallait une approche plus subtile. Une approche digne de la nouvelle Jeanne Dubois.

J'ai passé la matinée à faire des recherches sur les casernes de pompiers de Paris, en me concentrant sur celles qui intervenaient dans le secteur du pont de Bir-Hakeim. J'ai ensuite contacté le meilleur traiteur de la ville.

Ma stratégie était simple : faire le tour des casernes concernées sous prétexte de remercier les pompiers pour leur travail dévoué, en leur offrant café et viennoiseries de luxe. C'était une excuse plausible pour une riche philanthrope comme moi.

La première caserne était une fausse piste. La deuxième aussi. Les pompiers étaient charmants, reconnaissants, mais aucun ne correspondait à mon souvenir. Le doute commençait à s'installer. Et si j'avais rêvé son nom ?

J'arrivai à la troisième caserne, la Caserne Malar, dans le 7ème arrondissement. Elle était vieille, en briques rouges, pleine de caractère. J'ai sonné, et un pompier costaud m'a ouvert.

« Bonjour, je peux vous aider ? »

« Bonjour, » ai-je dit avec mon plus beau sourire. « Je suis Jeanne Dubois. Je voulais simplement vous remercier pour votre service exceptionnel. J'ai apporté quelques petites choses pour vous et votre équipe. »

Il a semblé surpris, puis un large sourire a éclairé son visage.

« Eh bien, ça alors ! Entrez, Mademoiselle Dubois. Les gars, regardez ce que nous avons là ! »

Je suis entrée dans la cour où plusieurs pompiers s'entraînaient ou entretenaient leur matériel. Ils se sont approchés, curieux. J'ai scruté chaque visage, le cœur battant. Personne. Mon espoir s'amenuisait.

J'ai commencé à distribuer les cafés et les croissants, engageant la conversation, essayant de paraître naturelle.

Soudain, une porte s'est ouverte et un homme en est sorti, essuyant ses mains sur un chiffon. Il était de dos, vêtu d'un simple t-shirt bleu marine de service et d'un pantalon de treillis. Il avait une démarche assurée.

Puis il s'est retourné et a parlé.

« Qu'est-ce qui se passe ici ? On dirait Noël avant l'heure. »

Cette voix. C'était cette voix. Calme, profonde, avec une pointe d'autorité. C'était lui.

Mon cœur a raté un battement. Il était encore plus impressionnant en plein jour, sans l'urgence et le drame de la nuit. Ses cheveux étaient courts, châtain foncé, et ses yeux... ses yeux étaient d'un bleu-gris intense qui semblait tout voir.

Un de ses collègues lui a donné une tape dans le dos.

« Marc, mon vieux ! C'est Mademoiselle Dubois qui nous gâte. Elle est venue nous remercier. »

Marc. C'était bien lui. Il a posé son regard sur moi. Il y avait une lueur de reconnaissance, mais aussi de la confusion. Il ne faisait pas le lien avec la jeune femme en pleurs sur le pont.

« C'est très généreux de votre part, Mademoiselle, » a-t-il dit poliment, en gardant une distance professionnelle.

Je me suis approchée de lui, un café à la main.

« C'est la moindre des choses. Vous faites un travail incroyable. »

Un autre pompier, plus jeune et blagueur, a ajouté : « Fais attention, Marc. On dirait qu'elle a un faible pour les uniformes. C'est peut-être ta nouvelle copine ! »

Marc a levé les yeux au ciel, un peu gêné, mais une ombre de sourire a joué sur ses lèvres. Il n'a pas répondu à la provocation.

Je lui ai tendu le café. Nos doigts se sont effleurés. Une petite décharge électrique a parcouru mon bras. Je l'ai regardé droit dans les yeux.

« En fait, je ne suis pas seulement venue livrer du café, » ai-je murmuré pour que lui seul entende. « Je suis venue vous trouver. Vous. »

La surprise a remplacé la politesse sur son visage. Il a froncé les sourcils, essayant de me situer.

Je n'allais pas lui faciliter la tâche. Pas tout de suite.

« J'ai vu un reportage sur une de vos interventions. Vous étiez... impressionnant. » C'était un demi-mensonge, mais il fallait bien commencer quelque part.

Il a semblé sceptique mais n'a pas insisté.

Après quelques minutes de conversation polie avec l'équipe, j'ai annoncé que je devais partir. J'ai salué tout le monde, en gardant Marc pour la fin.

« J'espère que le café vous plaira, » ai-je dit.

« Merci encore, Mademoiselle Dubois. »

Avant de me retourner, j'ai sorti mon téléphone, l'ai mis en mode selfie et j'ai pris une photo rapide de nous deux. Il a été pris au dépourvu.

« Qu'est-ce que... »

« Un souvenir, » ai-je lancé avec un clin d'œil. « Pour ne pas oublier le visage de mon pompier préféré. »

Puis, sans lui laisser le temps de réagir, j'ai ajouté d'un ton qui se voulait léger mais qui portait tout le poids de ma détermination :

« J'ai l'intention de vous couvrir de cadeaux. Pas seulement vous, toute la caserne. Considérez ça comme un investissement. Un investissement pour attirer votre attention. Je suis très douée pour les investissements. »

Je l'ai planté là, stupéfait, au milieu de ses collègues hilares. En quittant la caserne, je me suis sentie vivante pour la première fois depuis longtemps. Le jeu ne faisait que commencer.

            
            

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