De mon côté, je suis restée aux côtés du Chef Lambert, l'aidant à descendre de l'avion et à récupérer ses bagages.
« Laissez-moi vous raccompagner à votre hôtel, Chef, » ai-je insisté. « Vous ne devriez pas rester seul. »
Il a accepté avec un sourire reconnaissant.
« Tu es une bonne personne, Camille. Bien plus que ce que ce... ce critique arrogant mérite. »
Dans le taxi qui nous menait à l'hôtel, il a sorti son chéquier.
« Je ne sais pas comment vous remercier. Permettez-moi au moins de vous dédommager pour... »
Je l'ai arrêté d'un geste de la main.
« Non, Chef. C'est normal. Un chef ne laisse pas tomber un autre chef. C'est vous qui m'avez appris ça. »
Il m'a regardé, ému. Il a rangé son chéquier, mais je savais que ma dette venait d'être transformée en quelque chose de bien plus précieux : sa loyauté.
Une fois le Chef installé dans sa chambre, je suis retournée dans le hall pour prendre la clé de la mienne. Mon téléphone a vibré. C'était un message d'Antoine.
`Où es-tu passée ? Reviens tout de suite à l'hôtel. J'ai besoin de toi pour préparer les affaires de Sophie pour demain.`
Le ton était impérieux, comme s'il s'adressait à sa bonne. Il n'avait toujours rien compris. Il pensait encore que je rampais à ses pieds.
J'ai ouvert sa fiche de contact. J'ai regardé son nom et sa photo pendant une longue seconde. Puis, sans hésiter, j'ai appuyé sur l'option : `Bloquer ce contact`.
Un sentiment de libération m'a envahie. C'était un petit geste, mais il était lourd de sens. Le lien était coupé. Définitivement.
J'ai relevé la tête, et je les ai vus. Ils descendaient vers le hall. Antoine avait l'air furieux, le téléphone à l'oreille, comprenant sans doute pourquoi ses appels n'aboutissaient pas. Sophie se plaignait à ses côtés.
« Elle ne répond pas ! Cette garce le fait exprès ! Tu aurais dû la laisser à l'aéroport ! »
Ils m'ont aperçue. La fureur d'Antoine a redoublé.
« Te voilà ! » a-t-il hurlé en traversant le hall.
Les quelques clients présents se sont retournés, surpris par son éclat de voix.
« Comment oses-tu m'ignorer ? Tu te prends pour qui ? »
Sophie s'est approchée, le visage tordu par la jalousie.
« C'est ça, tu fais ta sainte maintenant que tu as joué les infirmières avec le vieux Lambert ? Tu crois que ça va t'aider pour le concours ? »
« Laissez-moi tranquille, » ai-je dit d'une voix blanche.
La provocation de Sophie a eu l'effet escompté. Elle s'est jetée sur moi, essayant de me griffer le visage.
« Espèce de salope ! »
J'ai reculé, mais Antoine m'a barré la route. Il m'a attrapée par le bras, sa poigne de fer me faisant mal.
« Tu vas t'excuser auprès de Sophie. Et tu vas monter faire ce que je t'ai dit. »
« Jamais, » ai-je répondu en le regardant droit dans les yeux.
C'est à ce moment que j'ai sorti le document de mon sac. Ce n'était pas un simple bout de papier. C'était une plainte officielle que mon avocat avait préparée avant mon départ. Une plainte pour harcèlement moral et tentative de sabotage professionnel, destinée au comité d'organisation du Macaron d'Or.
Je l'ai tendue devant son visage.
« Qu'est-ce que c'est que ça ? » a-t-il demandé, méfiant.
« Lis. C'est une copie de la plainte que je vais déposer demain matin. Elle détaille toutes les menaces, toutes les manipulations que tu m'as fait subir depuis notre rupture. Y compris tes tentatives pour ruiner ma carrière. »
Son visage est devenu blême. Sophie a arraché le papier de mes mains. En lisant, son expression est passée de la colère à la panique.
« Elle est folle ! C'est n'importe quoi ! »
« Dans ce cas, » ai-je dit calmement, « le comité d'éthique du concours se fera un plaisir de trancher. Ils pourront interroger nos anciens employés, vérifier tes critiques... et peut-être même se demander pourquoi un critique aussi influent pousse aussi agressivement une débutante comme Sophie. »
J'ai regardé Antoine. Pour la première fois, j'ai vu de la peur dans ses yeux.
« Tu n'oserais pas. »
« Regarde-moi bien, Antoine, » ai-je dit en me dégageant de sa prise. « Et dis-moi si j'ai l'air de plaisanter. Cette vie ne sera pas une répétition de la précédente. Cette fois, c'est toi qui vas tomber. »
Je l'ai prévenu des conséquences, mais il était encore piégé dans son arrogance. Il ne pouvait pas imaginer un monde où il ne gagnait pas. C'était son plus grand point faible.