Je suis sorti de ma torpeur. La colère, froide et tranchante, a balayé le choc et l'humiliation. J'ai fait un pas en avant, mes yeux fixés sur le couple sur l'estrade.
« Comment osez-vous ? » ma voix était basse, mais elle a porté dans le silence.
Chloé a relevé la tête du dos de Marc, arborant une expression d'innocence outragée.
« Oser quoi, Louis ? Oser être honnête ? Oser suivre mon cœur ? C'est toi qui devrais te poser des questions. Tu allais m'épouser sans amour. »
Le culot de sa réponse m'a coupé le souffle.
« Sans amour ? » ai-je répété, un rire sans joie m'échappant. « Nous avions un accord, Chloé. Un accord entre nos familles. Tu le savais depuis le début. Mais tu as choisi de le détruire de la manière la plus cruelle et la plus publique qui soit. Et avec qui ? Ton chauffeur ? »
Mon regard s'est tourné vers Marc Lefevre.
« Et toi. Tu travailles pour sa famille. Tu manges grâce à leur argent. C'est ta façon de les remercier ? En séduisant la fille de ton patron ? En humiliant son fiancé le jour de l'anniversaire de sa grand-mère ? Où est votre honneur ? Où est votre décence ? »
Marc a redressé les épaules, tentant de se donner une contenance. Il a pris un air grave, comme s'il allait prononcer un discours philosophique.
« L'amour ne connaît pas les barrières sociales, Louis. Chloé et moi, nous ne voulions blesser personne. Mais nos sentiments sont plus forts que tout. Nous ne pouvions plus vivre dans le mensonge. »
« Le mensonge ? » ai-je rétorqué, m'approchant de l'estrade. « Le mensonge, c'est de me sourire et de planifier notre mariage pendant que tu la rejoignais en secret. Le mensonge, c'est de venir à cette fête, de trinquer avec ma famille, en sachant pertinemment que vous alliez faire exploser cette bombe. »
Chloé est intervenue, sa voix devenant stridente.
« Arrête de nous faire la morale, Louis ! Tu es le symbole de tout ce que je déteste ! Cette richesse, ce statut, tout est superficiel ! Tu ne comprendras jamais la pureté de nos sentiments. Tu devrais avoir assez de classe pour nous souhaiter bonne chance et te retirer avec dignité. »
« De la classe ? » ai-je lâché, incrédule.
C'est cette phrase qui a de nouveau fait exploser mon grand-père.
« ASSEZ ! » a-t-il hurlé, se dégageant violemment de l'emprise de mon père.
Il a réussi à faire deux pas en avant avant que mes oncles ne l'attrapent à nouveau, luttant pour le maîtriser. Sa fureur était terrifiante. Il tremblait de rage, le visage congestionné.
« Laissez-moi ! Laissez-moi leur apprendre ce qu'est l'honneur de la famille Dubois ! »
Mon père a réussi à lui parler à l'oreille, tentant de le calmer.
« Père, pas ici. Pas maintenant. Ne leur donnez pas cette satisfaction. Nous réglerons ça. Mais pas comme ça. »
Lentement, la tension dans les épaules de mon grand-père a semblé diminuer. Il a cessé de se débattre, mais son regard n'a pas quitté Chloé et Marc. C'était un regard de haine pure. La fête était terminée. Le scandale, lui, ne faisait que commencer.