Chapitre 4

Le service de sécurité de l'hôpital n'a pas tardé. Deux agents, deux hommes costauds à l'air blasé, sont entrés dans la chambre, suivis par l'infirmière en chef.

En les voyant, Madame Fournier a changé de visage instantanément. La furie a laissé place à une expression de victime outragée. Des larmes de crocodile ont coulé sur ses joues.

« Au secours ! » a-t-elle gémi en se tournant vers eux. « Cette femme m'a agressée ! Elle m'a jeté sa soupe dessus ! Regardez mon chemisier ! C'est une folle dangereuse ! »

Les agents de sécurité ont échangé un regard. Ils en avaient vu d'autres.

« Madame, calmez-vous, » a dit le plus âgé. « Que s'est-il passé ici ? »

Avant qu'elle ne puisse déblatérer d'autres mensonges, j'ai pris la parole, ma voix calme et posée.

« Messieurs, cette femme est la mère de mon ex-fiancé. Je suis hospitalisée après une opération d'urgence. J'ai explicitement demandé à ne recevoir aucune visite de sa part. Elle a forcé le passage et a tenté de me faire ingérer de force une mixture non identifiée, ce qui est extrêmement dangereux pour une patiente en post-opératoire. »

Je les ai regardés droit dans les yeux.

« Quand j'ai refusé, elle m'a menacée et insultée. Le liquide s'est renversé accidentellement quand j'ai essayé d'éviter qu'elle ne me le verse dans la bouche. Elle est entrée ici sans autorisation et me harcèle. Je souhaite qu'elle soit escortée hors de l'établissement. Immédiatement. »

J'ai sorti mon téléphone et j'ai montré la capture d'écran du post de son fils.

« Pour le contexte, voici le genre de 'soutien' que sa famille m'apporte pendant mon hospitalisation. »

L'agent a jeté un œil à l'écran, puis a regardé Madame Fournier, dont le visage était passé de la fureur à la panique. Mes preuves étaient accablantes.

« Et pour ce qui est de la 'fiançailles', » ai-je ajouté, chaque mot pesé, « il n'y a jamais eu de fiançailles officielles. Pas de publication des bans, pas de date de mariage fixée. Juridiquement, cette bague est un simple cadeau. Et vu son comportement et celui de son fils, je vous préviens, Madame Fournier, que toute tentative de la récupérer par la force ou le harcèlement fera l'objet d'une plainte pour extorsion. »

Le mot "extorsion" a eu l'effet d'une douche froide. Elle me regardait comme si je venais de lui lancer un sort. Elle, qui se croyait au-dessus des lois, venait de se heurter à quelqu'un qui les connaissait par cœur.

L'agent de sécurité s'est tourné vers elle.

« Madame, vous allez nous suivre. Maintenant. »

Elle a tenté de protester, mais le ton de l'agent ne laissait place à aucune discussion. Alors qu'ils la raccompagnaient vers la sortie, elle s'est retournée une dernière fois, son regard plein de haine.

« Tu le paieras, » a-t-elle sifflé.

Je l'ai regardée partir, le cœur battant, mais déterminée.

À peine était-elle partie que mon téléphone a vibré. Notification d'un groupe WhatsApp.

« Famille Fournier - Projet Mariage ».

Mon cœur s'est serré. J'avais oublié ce groupe. Marc m'y avait ajoutée il y a des mois.

Un message de sa tante, Élisabeth, la sœur de sa mère :

« Jeanne, ta future belle-mère vient de m'appeler en pleurs. Comment oses-tu la traiter de la sorte ? La chasser de l'hôpital ? Après tout ce qu'elle a fait pour toi ! »

Un autre message, de son oncle Bernard :

« C'est inadmissible. Une femme doit respecter sa belle-famille. On m'a dit que tu avais eu un problème 'féminin'. Ce n'est pas une excuse pour te comporter comme une sauvage. Une femme qui ne contrôle pas ses humeurs ne fera jamais une bonne épouse. »

L'hypocrisie de leurs propos m'a suffoquée. Ils me donnaient des leçons de morale, eux ?

J'ai tapé une réponse, mes doigts volant sur le clavier.

Je me suis adressée directement à l'oncle Bernard, un homme connu dans la famille pour ses infidélités notoires.

« Tonton Bernard, merci pour tes précieux conseils sur la 'bonne épouse'. Peut-être que tu pourrais donner des cours ? Le premier chapitre pourrait s'intituler : 'Comment tromper sa femme pendant 20 ans sans se faire prendre'. Ah non, pardon, tu t'es fait prendre. Plusieurs fois. »

Le silence dans le groupe a été immédiat.