Reine Déchue, Revanche Servie Froid
img img Reine Déchue, Revanche Servie Froid img Chapitre 1
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Chapitre 1

Je me souviens de chaque détail de ma mort, ou plutôt, de la mort qu'ils m'ont imposée dans ma vie précédente.

Le froid du sol en pierre sous mes genoux, les insultes de ma belle-mère qui pleuvaient sur moi comme une grêle glaciale, et le visage de mon mari, Jean-Luc, qui me regardait avec un mépris total pendant que les gardes me traînaient hors de la maison.

Ils m'ont accusée de folie, d'infidélité.

Ils m'ont tout pris, ma maison, ma dignité, et ma fille, Marie.

Le pire, c'est que le monde entier a cru à leur mensonge. Jean-Luc, mon mari, le célèbre explorateur, était "mort" lors de sa dernière expédition. C'est ce qu'il a prétendu. En réalité, il était bien vivant. Il avait simplement décidé qu'il ne voulait plus de moi. Il voulait épouser ma belle-sœur, Isabelle, la veuve de son propre frère.

Pour cela, il a orchestré sa fausse mort, a usurpé l'identité de son frère décédé et a commencé une nouvelle vie avec elle. Et moi, j'étais l'obstacle à éliminer.

Dans cette vie-là, j'ai lutté. J'ai crié la vérité, mais personne ne m'a écoutée. J'ai fini seule, brisée, et ma fille a grandi en subissant les mauvais traitements de sa grand-mère et de sa "nouvelle mère".

Mais aujourd'hui, j'ai ouvert les yeux.

Je n'étais pas dans un cachot froid. J'étais dans mon lit, dans la chambre que je partageais avec Jean-Luc. La lumière du matin filtrait à travers les rideaux de velours.

J'ai entendu des bruits de pas précipités dans le couloir, des voix basses et agitées.

Mon cœur s'est mis à battre violemment.

Je connaissais ce jour.

C'est le jour où l'on est venu m'annoncer la "mort" de Jean-Luc.

Je me suis redressée, le souffle court. Ce n'était pas un rêve. C'était une seconde chance. Une chance de tout changer.

La porte de ma chambre s'est ouverte brusquement. C'était un des serviteurs de la maison, le visage pâle et décomposé.

"Madame Dubois... une terrible nouvelle."

Je n'ai pas attendu qu'il finisse. J'ai repoussé les couvertures et je me suis levée. J'ai arrangé mes cheveux à la hâte, j'ai enfilé une robe de chambre et je me suis dirigée vers le grand salon.

Mon cœur n'était plus rempli de panique et de chagrin, mais d'une rage froide et calculatrice.

Cette fois, je ne serai pas la victime.

En bas, ma belle-mère était déjà en pleine performance. Elle se tenait au milieu du salon, un mouchoir pressé contre ses yeux secs, se lamentant à qui voulait l'entendre.

"Mon pauvre fils ! Mon Jean-Luc ! Disparu en mer ! Quelle tragédie !"

Isabelle, ma belle-sœur, se tenait à ses côtés, lui tapotant doucement le dos. Son visage affichait une tristesse convenue, mais ses yeux brillaient d'une lueur triomphante que je connaissais trop bien.

Puis, un homme est entré. Il était vêtu modestement, le chapeau à la main, le visage baissé. Il a prétendu être un survivant de l'expédition, le seul à avoir pu regagner la côte.

Il a levé la tête.

C'était Jean-Luc.

Il avait laissé pousser une barbe de quelques jours, ses cheveux étaient en désordre et il avait mis de la saleté sur son visage pour paraître épuisé. Mais c'était lui. Je reconnaîtrais ces yeux froids et calculateurs n'importe où. Et surtout, ce petit grain de beauté juste à côté de son oreille gauche, celui que son frère n'avait pas.

Dans ma vie précédente, à cet instant précis, je m'étais évanouie de choc et de chagrin.

Mais pas cette fois.

J'ai regardé mon mari, l'imposteur, et j'ai senti une vague de souvenirs amers déferler sur moi. Je me suis souvenue de ma petite Marie, pleurant de faim parce que sa grand-mère refusait de la nourrir correctement. Je me suis souvenue des bleus sur mes bras, cachés sous mes manches longues. Je me suis souvenue d'avoir été traînée dans la boue, traitée de folle devant toute la ville.

Alors, j'ai fait ce qu'une veuve éplorée était censée faire.

Mes jambes ont fléchi.

J'ai poussé un cri déchirant.

"Jean-Luc !"

Et je me suis effondrée sur le sol, en sanglots.

Mais à l'intérieur, je souriais.

Le spectacle ne faisait que commencer. Et cette fois, c'est moi qui tenais les rênes.

            
            

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