Froid et humide.
Voilà les deux premières sensations que ressent Louisa lorsqu'elle reprend doucement conscience. Assise sur une chaise, les mains bâillonnées dans le dos, son visage n'est plus recouvert.
Elle se trouve dans un hangar aux proportions gigantesques. Faisant face à des grandes verrières dont la plupart des carreaux sont brisés, Louisa remarque que la nuit commence lentement à tomber.
Malgré l'immensité de l'endroit, elle est seule et isolée dans un endroit inconnu. Du moins, c'est ce qu'elle pensait.
Une poignée s'actionne et une porte s'ouvre au loin. Elle tente de se retourner mais les cordes qui l'entourent sont beaucoup trop serrées pour lui permettre de se mouvoir librement. L'individu marche de manière succincte. Ces pas résonnent et deviennent de plus en plus angoissants au fur et à mesure qu'ils se rapprochent d'elle. Néanmoins, Louisa demeure immobile. Elle ne veut pas lui montrer sa peur qui l'envahit petit à petit.
Une fois arrivé derrière elle, la présence s'arrête. Louisa ferme les yeux pensant recevoir un coup.
L'individu la contourne puis lui fait face.
-Vous !! hurle Louisa qui le reconnaît immédiatement. Vous êtes le taré qui me suivait tout à l'heure !!
-Vous êtes observatrice. Ravie de vous rencontrer mademoiselle Conti.
Surprise qu'il connaisse son nom et face à la carrure imposante de ce grand gaillard, Louisa se fige pendant quelques secondes.
-Désolé pour tout cela, mais l'urgence de la situation nous a obligé à employer la manière forte, reprend-il.
-Quoi ? Quelle urgence ?! Comment vous connaissez mon nom ?! Et bordel détachez moi !!
-Si je vous détache vous promettez de ne pas fuir ?
-Je promet surtout de te défoncer ta sale gueule !! crie Louisa en le regardant droit dans les yeux.
L'écho au sein du hangar donne une époustouflante intensité à ses hurlements et ses cheveux bouclés devant ses yeux lui donne un air sauvage, prête à bondir pour lui arracher les yeux. Elle veut lui montrer que quoiqu'il se passe, elle se battra jusqu'au bout.
-Je comprend mieux le choix de monsieur Del-Orti, dit-il en souriant légèrement.
-C'est qui lui ?!
-Pardon. Monsieur Ricci pour vous.
Louisa ne comprend pas. Que venait faire monsieur Ricci dans cette histoire ? Elle admet rapidement que hurler des questions n'avancerait à rien. Elle prend une profonde inspiration pour retrouver son calme et un semblant de sérénité.
-Bon. Je vous promets de ne pas fuir si vous me détachez, dit-elle les dents serrées.
-Très bien. De toute façon je vous rattraperai.
Il contourne de nouveau Louisa et sort un couteau de sa poche afin de lui délier les mains. Instantanément, Louisa se libère et secoue ses poignets engourdis. La corde lui a brulé la peau et un hématome lui recouvre le haut de sa main gauche. De plus, la douleur vive derrière ses genoux ne s'atténue pas.
-Effectivement, vous y êtes allez fort ... dit-elle en se relevant difficilement. Vous m'avez anesthésié ?!
-Oui désolé mais vous étiez beaucoup trop bruyante ...
-Je réagis souvent mal quand on me kidnappe désolé !
-Vous n'avez pas appelé le numéro, alors on a dû agir.
-Mais quel numéro ?!
-Celui dans votre casier au restaurant.
Louisa se revoit chiffonner le papier.
-Ce numéro ?! Désolé mais c'est rare que j'appelle des inconnus qui me laissent des bouts de papier dans mon casier ! C'est pervers !
-Pardon mais vous avez la clé. Il faut faire vite maintenant.
-La clé ?! Mais c'est pas la mienne, c'est celle de monsieur Ricci qu'il a oublié avant de partir ! Enfin avant de mourir...
Louisa revoit son corps se fracasser contre la chaussée, entends les hurlements de la foule fuyant la berline folle.
-Il ne l'a pas oublié. Il vous l'a légué.
-Quoi ? Mais elle sert à quoi cette foutu clé ?!
-À ouvrir un coffre.
-Un coffre ?!
-Oui mais pas que.
-Bordel crachez le morceau !
-Très bien mais alors cessez de m'interrompre, lui répond froidement l'homme.
Son excès de zèle énerve Louisa.
-Cette clé ouvre un coffre à la banque de France. Ce coffre contient des instructions de monsieur Del-Orti à votre égard. Je dois vous y accompagner moi-même pour que vous preniez connaissance de ces informations.
-Des informations à propos de quoi ? l'interrompt encore Louisa.
-À propos de son entreprise. C'est très important que nous soyons rapide.
-Mais attendez ! Vous pouvez pas aller récupérer ce foutu coffre vous-même ?! Pourquoi m'avoir kidnapper pour le faire ?!
-Ça ne marche pas comme ça. Je suis fidèle à monsieur Del-Orti et respecte ses dernières volontés. Il veut que ce soit vous et personne d'autre. Vous avez juste à ouvrir le coffre et vous ferez votre choix.
En observant l'individu, Louisa comprend que l'homme semble éprouvé un certain attachement envers monsieur Ricci. Enfin, monsieur Del-Orti de son vrai nom.
-Vous accepté ? lui demande t-il.
-Mais monsieur .. je vous connais pas. J'ai rien à voir avec tout cela, je veux juste rentrer chez moi... dit Louisa dépitée en massant son poignet douloureux.
-Comme je vous l'ai dit, ça ne marche pas comme ça.
-Vous m'avez dit qu'il m'a légué cette clé. Ça veut dire qu'il savait qu'il allait mourir ?
-Oui, il s'en doutait. Cela explique votre présence ici, et la mienne.
Louisa est effarée. L'homme qu'elle connaissait depuis près d'un an lui a menti sur son nom, son travail et lui confie une sorte de mission post-mortem très étrange.
Que pouvait-elle faire ?
Elle est seule face à cet imposant bonhomme, sans savoir où elle se trouve, sans téléphone et blessée. Le sourire rassurant de monsieur Ricci lui apparaît soudainement dans ses pensées.
-J'accepte... dit-elle doucement.