Chapitre 2 Chapitre 2

En entrant dans la cuisine, je remarque le soleil encore bas dans le ciel. Je m'appuie contre le plan de travail alors que ma première tasse d'expresso coule dans la machine dernier cri. Quand la sonnette retentit, je suppose que c'est l'équipe de ménage. Ils savent que j'aime que ma suite soit remise en ordre très tôt. Je suis toujours levé à l'aube, et je préfère retrouver ma tranquillité aussi vite que possible.

Je ne passe pas toujours mes journées dans les bureaux exécutifs, situés au troisième étage. Il m'arrive de préférer travailler depuis mon bureau privé.

Traversant le salon à pas feutrés, j'atteins la porte juste au moment où Sonya sort de ma chambre d'un pas rageur. J'ouvre, satisfait de voir la nouvelle femme de ménage que nous avons embauchée la semaine précédente.

D'ordinaire, je ne prête guère attention au personnel qui gravite dans mon quotidien. Mais cette fois, impossible de l'ignorer.

La première fois qu'elle a franchi le seuil de ma suite pour faire le ménage, j'ai dû me forcer à détourner le regard... avant d'y revenir aussitôt. Elle portait, comme toutes les autres, l'uniforme réglementaire de l'entretien Blackwood – une robe noire classique, à la coupe droite et au col blanc façon Peter Pan, conçu pour l'élégance discrète. Mais sur elle, rien n'avait l'air ordinaire. Sa beauté naturelle sautait aux yeux. Une chevelure brune sombre, une peau dorée comme miel d'été, et des yeux ambrés, à la forme subtilement inclinée, lui donnaient des traits marqués d'un exotisme saisissant.

Et, pour ne rien gâcher, elle était incroyablement séduisante. Son uniforme épousait ses courbes avec une perfection presque insolente. Elle était menue, oui, mais ses hanches et ses fesses semblaient avoir été sculptées pour qu'on y agrippe les mains.

- Bonjour, monsieur Blackwood, dit-elle avec empressement.

Tête légèrement baissée, elle évitait mon regard.

Je ne répondis pas, me contentant d'un geste ample de la main pour l'inviter à entrer. À ce moment précis, Sonya arriva jusqu'à la porte. Leurs regards se croisèrent brièvement, une simple seconde de tension suspendue dans l'air. La femme de chambre s'effaça sur le côté, laissant le passage libre. Sonya me frôla, le nez en l'air, et lâcha d'un ton acide :

- Connard.

Je ne dis rien. J'étais simplement soulagé qu'elle parte sans faire de scène. J'en ai connu, des départs fracassants, ponctués de cris et d'invectives, quand certaines refusaient de comprendre que je ne cherchais rien d'autre qu'une nuit de sexe, sans lendemain. C'est d'ailleurs pour cette raison que je passe autant de temps au Wicked Horse. Là-bas, tout le monde est sur la même longueur d'onde que moi.

Du sexe, et rien d'autre.

Je reportai mon attention sur la femme de ménage. Elle gardait les yeux baissés, dans une posture réservée qui tranchait curieusement avec l'impression de force tranquille qu'elle dégageait. Sa droiture me fit deviner qu'elle n'était pas du genre à plier face à qui que ce soit.

Mais ici, elle était à mon service. Et je n'étais pas surpris qu'elle se tienne comme une domestique face à son patron.

D'un nouveau geste, je l'invitai à entrer. Elle fit rouler son chariot derrière elle, une élégante pièce en bois de cerisier sculpté, rehaussée de détails dorés. Chez Blackwood, même les outils de ménage sont conçus comme des œuvres d'art. Ce modèle, fin et maniable, contient juste assez de matériel pour nettoyer une seule suite à la fois. Les draps sont à mille dollars pièce, les serviettes tout aussi onéreuses, et les produits utilisés sont garantis naturels, sans cruauté animale – une exigence qui semble essentielle aux riches clients, allez savoir pourquoi. Même le papier toilette, treize dollars le rouleau, est un luxe : une marque japonaise, confectionnée à partir de fibres de bois de haute qualité, purifiées et séchées lentement pour offrir une douceur inégalée au moindre contact.

C'est absurde, ce que les gens sont prêts à payer pour des caprices de luxe. Pourtant, ça ne m'étonne même pas. J'ai grandi avec ce genre de standards. Le papier toilette à treize dollars, pour moi, c'est normal.

Après avoir refermé la porte de la suite, je me dirigeai vers la cuisine pour me servir un café. La femme de chambre, elle, s'aventura dans ma chambre à coucher, où l'odeur de sexe devait encore flotter dans l'air.

Est-ce que j'en éprouvais une quelconque gêne ?

Pas du tout.

Mon sexe était encore satisfait, d'ailleurs. Et honnêtement, je me fichais bien de ce que cette fille pouvait penser.

Je pris mon expresso et le sirotai tout en consultant mes courriels sur mon téléphone. Quelques réponses rapides suffirent à gérer les affaires urgentes. Quand j'eus terminé, je me servis une seconde tasse et attrapai un bol de fruits dans le réfrigérateur. Pas de formalité : je pris une fourchette dans le tiroir et commençai à manger directement dans le bol, tout en lançant les infos sur le petit écran dissimulé dans un meuble près de la cuisinière.

Lorsque la femme de chambre eut fini avec ma chambre, je quittai la cuisine, laissant ma tasse et les restes de mon petit-déjeuner sur le comptoir. Elle s'en chargerait. Elle feignait de m'ignorer alors que je passais près d'elle, mais je ne lui rendis pas cette politesse. Je laissai traîner mon regard sur son corps alors qu'elle se penchait pour essuyer la table basse. Un bref instant, je me demandai comment elle s'appelait.

Mais la pensée disparut aussi vite qu'elle était venue. Je n'avais même jamais pris la peine de lire son badge, ni aujourd'hui, ni aucune des fois où elle était venue ici.

Alors à quoi bon maintenant ?

Avec un haussement d'épaules, je me dirigeai vers la salle de bain pour une douche rapide avant de m'habiller pour la journée.

            
            

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