Chapitre 4

Quelques jours plus tard, elle m'a rappelé. Sa voix était cassée.

« Alan, s'il te plaît. Viens à Monaco. Il y a une fête pour le Grand Prix. Brandon y sera. Je veux que tu sois là. Pour... pour qu'on puisse parler. »

J'ai ri. Un rire sans joie.

« Parler de quoi, Juliette ? Des arrangements floraux pour leurs tombes ? »

« Non ! Pour... pour que tout le monde voie. Que nous sommes ensemble. Que je te choisis. »

Elle était pathétique. Elle pensait encore que tout pouvait s'arranger avec une démonstration publique.

J'ai accepté.

La fête se tenait sur un yacht immense, amarré dans le port de Monaco. La musique, le champagne, les rires... tout me paraissait obscène. Brandon était là, paradant avec Juliette à son bras, la présentant comme son trophée.

Il m'a vu arriver, boitant avec ma canne. Il a souri.

« Ah, le petit brasseur de Lille ! Tu as décidé de venir chercher tes miettes ? »

Juliette s'est crispée. « Brandon, arrête. »

Il l'a ignorée et s'est tourné vers un groupe d'invités. « Mesdames et messieurs, laissez-moi vous présenter Alan. Le... petit protégé de Juliette. Il a été très dévoué pendant sa... convalescence. »

Les gens ont ricané.

Juliette m'a regardé, suppliante.

Je me suis avancé au centre du pont. J'ai tapé sur une coupe de champagne avec ma canne pour attirer l'attention.

Le silence s'est fait.

« Je ne suis le protégé de personne. »

Ma voix était calme, mais elle portait sur l'eau.

« Mademoiselle Juliette Gordon et moi n'avons aucune relation. »

Un murmure a parcouru l'assemblée.

« Nous ne nous sommes jamais mariés. Il n'y a jamais eu de certificat de la Mairie. Notre histoire était une mascarade. Un jeu pour elle. Un jeu qui a coûté la vie à ma mère et à mon père, et les jambes de mon frère. »

J'ai regardé Juliette droit dans les yeux.

« J'ai payé ma dette. Ma famille a payé. Nous ne te devons plus rien. »

Je me suis retourné, et j'ai commencé à descendre la passerelle, sous le regard stupéfait de tous.

« Alan, attends ! » a crié Juliette.

Je ne me suis pas arrêté. J'ai continué à marcher, laissant derrière moi le yacht, Monaco, et le monde pourri de Juliette Gordon.