L'odeur âcre du moût de raisin et de la terre humide emplissait mes poumons. Une douleur sourde martelait mon crâne. J'ai ouvert les yeux sur le blanc clinique d'une chambre d'hôpital, une vision bien éloignée de mon chai à Bordeaux.
Mon petit ami, Louis, était penché sur moi, son visage d'habitude si parfait marqué par une inquiétude qui sonnait faux.
« Élodie, mon amour, tu m'as fait si peur. »
Sa voix était douce, mais ses yeux fuyaient les miens. Il était arrivé en retard, comme toujours. À côté de lui se tenait Arthur, son meilleur ami et notre plus grand concurrent. Arthur, lui, me regardait fixement, son expression indéchiffrable, presque austère.
Une idée folle m'a traversé l'esprit, une petite blague pour le punir de son retard.
« Qui... qui êtes-vous ? » ai-je murmuré, feignant la confusion.
Louis a figé. Une fraction de seconde, j'ai vu un éclair de panique dans ses yeux, puis quelque chose d'autre, un calcul rapide. Son regard a glissé vers Arthur.
Puis, avec un aplomb qui m'a glacé le sang, il a pointé Arthur du doigt.
« Je suis l'ami de ton fiancé. Lui, c'est Arthur, ton fiancé. »
J'ai retenu mon souffle, attendant qu'Arthur démente. Mais il n'a rien fait. Son visage est resté de marbre, et il a simplement hoché la tête, confirmant le mensonge.
La farce venait de prendre une tournure que je n'avais pas anticipée. Mon cœur a commencé à battre la chamade, non plus à cause de la douleur, mais d'un pressentiment terrible.
Plus tard, Arthur m'a raccompagnée. Pas chez moi, à Bordeaux, mais dans un élégant appartement parisien, immense et impersonnel.
« C'est notre nid d'amour, » a-t-il dit, sa voix dénuée de toute chaleur.
J'ai regardé autour de moi. Murs blancs, meubles design, pas une seule de mes affaires, pas une photo, rien. C'était un mensonge aussi vide que cet appartement.