Le lendemain, Hugo n'est pas rentré. Mon téléphone est resté silencieux. Les commentaires, eux, étaient en pleine effervescence.
Je me suis forcée à travailler, assise à la table de la cuisine, l'ordinateur portable ouvert. Mais mon esprit était ailleurs. Je repensais à tout ce que j'avais fait pour lui.
Depuis qu'il a quitté son travail après son diplôme de grande école pour devenir "artiste", c'est moi qui payais tout. Le loyer de cet appartement hérité de ma grand-mère, les factures, sa nourriture, son matériel "d'artiste" qui ne servait qu'à prendre la poussière. Je travaillais jour et nuit, acceptant toutes les piges, même les moins bien payées, pour qu'il puisse vivre son rêve.
Lui, il passait ses journées à jouer aux jeux vidéo.
Le soir, en scrollant sur Instagram, je suis tombée sur une photo. Hugo et Amandine, son amie d'enfance des Beaux-Arts, souriaient dans un vernissage branché. Il avait son bras autour de ses épaules. La photo avait été postée il y a une heure.
Les commentaires ont explosé devant mes yeux.
Mon estomac s'est noué. Je savais que c'était faux. Il n'avait pas l'air triste. Il avait l'air heureux.
Plus tard dans la nuit, mon téléphone a enfin sonné. C'était lui.
« Chloé. »
Sa voix était froide, distante.
« J'ai une envie de la tarte au citron de chez "Rêve Sucré". Va m'en chercher une. »
Il était une heure du matin. La pâtisserie était à l'autre bout de Paris.
« Hugo, il est tard... Je suis fatiguée. »
« Tu ne veux pas le faire pour moi ? Après tout ce que tu m'as fait ? C'est le moins que tu puisses faire pour te faire pardonner. »
Les commentaires se sont déchaînés.
J'ai regardé par la fenêtre la pluie qui commençait à tomber. Je me sentais vide.
« Non, Hugo. »
Un long silence. Puis il a raccroché.