Mon père m'a attrapé le bras, ses yeux remplis d'inquiétude.
« Julien, ne fais pas ça. C'est tout ce que tu as. »
J'ai doucement retiré mon bras.
« Ne t'inquiète pas, papa. »
Bernard a ri bruyamment, un rire gras qui a fait vibrer la table.
« Le petit a du cran ! Allez, installe-toi. On va voir ce que tu as dans le ventre. »
J'ai sorti une enveloppe de ma poche. Ma prime de fin d'année. 5 000 euros, pile. Je les ai posés sur la table.
La partie a commencé.
Les cartes ont été distribuées. J'ai joué comme un débutant. Exactement comme le débutant qu'ils pensaient tous que j'étais.
Je suivais quand il ne fallait pas. Je me couchais trop vite. Je bluffais de manière évidente.
En moins d'une heure, mes 5 000 euros avaient fondu. Il ne me restait que quelques jetons.
Mon père, assis derrière moi, ne disait rien, mais je sentais sa tension. Chaque jeton que je perdais était comme une gifle pour lui.
Bernard, lui, jubilait.
« Alors, Julien ? C'est plus dur que de déboucher des bouteilles, hein ? »
Il a ramassé un gros pot que je venais de perdre sur une main stupide.
« Et voilà l'apport pour ton futur F2 qui s'envole. Dommage. Tu retourneras vivre chez papa et maman. »
Sylvie gloussait à ses côtés, me regardant avec pitié.
Les autres membres de la famille détournaient le regard, mal à l'aise. Ils ne voulaient pas être témoins de mon humiliation.
Je suis resté silencieux. J'ai encaissé. J'attendais.
J'ai perdu le dernier jeton. La pile de 5 000 euros était maintenant entièrement devant mon oncle.
« Bon, eh bien, c'était rapide. » a dit Bernard en commençant à ranger les jetons. « La banque a gagné. »
Mon père a posé une main sur mon épaule.
« Viens, Julien. On arrête là. »
Je n'ai pas bougé. J'ai regardé mon oncle droit dans les yeux.
« Ce n'est pas fini. »