Quelques jours plus tard, elle est apparue devant mon nouvel appartement.
J'avais trouvé un petit deux-pièces dans le Marais, avec des poutres apparentes et une vue sur une cour pavée. C'était mon sanctuaire, le premier endroit qui n'appartenait qu'à moi depuis des années.
Elle a sonné. Je n'ai pas répondu. Elle a sonné encore et encore, le son strident brisant la paix de ma soirée. Finalement, elle a commencé à frapper à la porte.
« Julien, ouvre cette porte ! Je sais que tu es là ! »
J'ai soupiré et j'ai ouvert.
Elle était là, impeccable comme toujours, tenant un petit paquet rectangulaire. Elle est entrée sans y être invitée, inspectant mon appartement avec un air de dédain.
« C'est petit. »
« C'est chez moi. »
Elle a posé le paquet sur ma table basse. C'était une boîte de chez Cartier.
« Tiens. Pour te calmer. »
Je n'ai pas touché la boîte.
« Je ne veux pas de tes cadeaux, Éléonore. »
« Ne sois pas stupide. Ouvre-la. »
Sa voix avait ce ton autoritaire qu'elle utilisait quand elle pensait pouvoir tout acheter.
Elle a ignoré mon silence et a continué, se dirigeant vers ma petite cuisine.
« Antoine et moi sortons dîner ce soir, mais j'aimerais que tu nous prépares quelque chose pour quand nous rentrerons. Juste une salade, quelque chose de léger. Tu sais comment il aime ta vinaigrette. »
Je suis resté immobile. Le choc a laissé place à une froide colère.
Elle venait de recevoir une demande de divorce pour adultère, et elle me demandait de préparer un en-cas pour elle et son amant.
L'absurdité de la situation était totale.
Je l'ai regardée. Vraiment regardée. Et pour la première fois, je n'ai ressenti ni amour, ni douleur. Juste une immense distance.
« Non. »
Elle s'est retournée, surprise.
« Pardon ? »
« J'ai dit non. Je ne suis plus ton mari. Je ne suis pas ton cuisinier. C'est fini, Éléonore. Tu ne comprends pas ? »
J'ai pris la boîte Cartier et je lui ai tendue.
« Reprends ça. Et sors de chez moi. »
Ses yeux se sont plissés. La colère a remplacé la surprise sur son visage.
« Tu vas le regretter, Julien. »
« Le seul regret que j'ai, c'est de ne pas l'avoir fait plus tôt. »
Elle a arraché la boîte de mes mains et est sortie en claquant la porte.
Je me suis assis sur mon canapé. Le silence est revenu. C'était un silence différent, maintenant. Un silence de victoire.