La fête de fin d'année du lycée a eu lieu une semaine plus tard.
Je ne voulais pas y aller. Ma mère m'a forcée.
« Tu dois leur montrer que tu es forte, ma chérie. »
J'y suis allée. J'ai porté une robe simple. J'ai souri poliment.
J'ai vu le trio de loin. Louis, Mathieu et Amandine.
Ils riaient, buvaient du punch. Amandine portait une robe bien plus chère que les miennes. Elle semblait s'être parfaitement adaptée à son nouveau rôle de princesse à sauver.
Les gens venaient me parler. « Alors, la future star de la finance à Paris ? »
Je répondais vaguement. « On verra. Je pars peut-être à l'étranger. »
Personne ne me prenait au sérieux.
Puis, le moment du livre d'or est arrivé. Une tradition du lycée. Un grand cahier où chacun laissait un mot pour les autres.
J'ai vu des amis écrire des vœux de réussite. J'ai écrit quelques mots gentils pour des gens que j'appréciais.
Quand mon tour est venu de recevoir mon livre, je l'ai ouvert.
Les premières pages étaient remplies de messages amicaux.
Puis, je suis tombée sur une double page.
L'écriture de Louis sur la page de gauche.
L'écriture de Mathieu sur la page de droite.
Au centre, en grosses lettres, ils avaient écrit ensemble :
« Celle qu'on aime : Amandine. »
« Celle qu'on déteste : Chloé. »
Le silence s'est fait autour de moi. Tout le monde avait vu.
Je n'ai pas pleuré. Je n'ai pas crié.
J'ai senti les regards, certains pleins de pitié, d'autres de moquerie.
Amandine, derrière eux, affichait un petit sourire triomphant.
J'ai fermé le livre doucement.
Je l'ai serré contre moi.
J'ai traversé la salle, sous les yeux de tous.
Je suis sortie dans la cour.
La grande poubelle verte était près du portail.
J'ai soulevé le couvercle.
J'ai laissé tomber le livre à l'intérieur. Il a atterri sur un tas de gobelets en plastique et de restes de gâteaux.
J'ai entendu des pas derrière moi. C'était mon professeur principal.
« Chloé, je... »
« C'est décidé, Monsieur », je l'ai coupé. « J'ai confirmé mon inscription à Londres. Je pars la semaine prochaine. S'il vous plaît, ne le dites à personne. »
Il a hoché la tête, l'air triste. « Je comprends. Bonne chance, Chloé. »
Je suis partie sans un regard en arrière. C'était la libération.