Chapitre 2

Je me suis approchée lentement.

« Louis ? Mathieu ? »

Ils se sont tournés vers moi. Leurs regards étaient froids, accusateurs.

Ce n'étaient pas les yeux des hommes qui m'avaient aimée pendant soixante ans.

« Chloé », a dit Louis, d'un ton sec. « On doit te parler. »

Nous sommes allés dans une salle de classe vide. Amandine les a suivis, se cachant à moitié derrière le dos de Mathieu.

« On a pris une décision », a commencé Mathieu. « On ne va pas à Paris. »

J'ai fixé Louis. « Quoi ? Mais... Henri IV, c'est ton rêve. »

« Les rêves peuvent changer », a-t-il répondu, sans me regarder. « Il y a des choses plus importantes. »

Il a jeté un regard à Amandine, qui a reniflé plus fort.

« Amandine a raté son bac », a continué Mathieu. « Dans notre vie passée, on l'a laissée tomber. Elle a fini en dépression. On ne peut pas refaire la même erreur. »

Le choc m'a coupé le souffle. Ils se souvenaient aussi.

« On va redoubler », a annoncé Louis. « On va rester ici, à Lyon, et on va l'aider à avoir son bac cette année. »

Mon esprit n'arrivait pas à traiter l'information.

« Mais... et nous ? Notre projet ? »

Louis a finalement tourné son visage vers moi. Un rictus méprisant est apparu sur ses lèvres.

« Notre projet ? Tu ne penses qu'à toi, Chloé. Ton ambition t'aveugle. Certaines personnes ont besoin d'aide. Toi, tu t'en sortiras toujours. »

« Tu es égoïste », a ajouté Mathieu. « On essaie de réparer une injustice, de sauver une vie. Et tout ce qui t'importe, c'est ta foutue prépa parisienne. »

Chaque mot était une pierre.

J'ai regardé Amandine. Elle a baissé les yeux, l'air d'une victime innocente.

J'ai compris. Dans cette vie, je n'étais plus leur amour, leur amie. J'étais l'obstacle.

Je n'ai rien dit. J'ai fait demi-tour et je suis partie.

En rentrant chez moi, les larmes coulaient enfin.

J'ai sorti mon téléphone. J'ai ignoré les messages de félicitations de ma famille.

J'ai cherché un numéro. Celui de ma marraine.

Elle vivait à Londres. C'était une femme d'affaires puissante, qui m'avait toujours dit : « Si un jour Paris te déçoit, la City t'attendra. »

J'ai appuyé sur "appeler".

« Marraine ? C'est Chloé. Votre offre... elle tient toujours ? »