Le lendemain matin, Julien est rentré. Il avait l'air fatigué mais pas coupable. Il tenait à la main un bouquet de pivoines blanches et une boîte de macarons de chez Ladurée. Son kit d'excuses habituel.
« Tu es rentrée tard hier soir », a-t-il dit, comme si de rien n'était.
Je l'ai regardé, sans prendre les fleurs. « J'ai marché. »
« J'ai dû rester avec Camille. Elle était vraiment mal. Tu comprends, n'est-ce pas ? »
Je n'ai rien répondu. Je suis allée dans la cuisine me faire un café. Il m'a suivie, posant les fleurs et les macarons sur le comptoir.
« Chloé, ne fais pas la tête. Ce n'est qu'un petit incident. »
« Un petit incident ? » J'ai ri, un rire sans joie. « Julien, j'ai cru que j'allais devoir dormir dans la rue. »
« N'exagère pas. Tu es une grande fille. »
C'était sa phrase fétiche. "Tu es forte, Chloé." "Tu es indépendante, Chloé." C'était juste une façon polie de dire : "Débrouille-toi toute seule."
Il a soupiré, voyant que ses cadeaux ne fonctionnaient pas. « Écoute, pour me faire pardonner, et pour que tu voies qu'il n'y a rien entre Camille et moi, je vous invite toutes les deux à dîner ce soir. Dans ce nouveau bistro branché que tu aimes bien. On va clarifier les choses. »
Une invitation forcée. Une confrontation à trois. L'idée me donnait la nausée. Mais une partie de moi, une partie masochiste, voulait y aller. Je voulais voir. Je voulais avoir la confirmation de ce que je savais déjà.
« D'accord », j'ai dit.
Il a eu l'air soulagé. « Super. Tu verras, tout va s'arranger. »
Non, Julien. Rien ne va s'arranger. J'y vais pour te dire adieu.