Elle ne T'aime Plus
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Chapitre 3

Amélie se réfugia dans les toilettes des dames.

Elle tremblait de rage et d'humiliation.

Son chemisier était ruiné, sa joue commençait à enfler.

Elle nettoya son visage du mieux qu'elle put avec des serviettes en papier, essayant de contenir les larmes qui menaçaient de couler.

Quelques collègues entrèrent, lui offrant des mots de sympathie chuchotés, des mouchoirs, mais personne n'osait critiquer ouvertement Camille ou Antoine. La peur de perdre son emploi était palpable.

Une secrétaire plus âgée, Madame Pernet, lui tendit une blouse de rechange qu'elle gardait dans son casier.

"Ma pauvre petite," dit-elle doucement. "Cette Camille est une vraie peste. Et Monsieur de Valois est aveugle."

Amélie la remercia d'un faible sourire. Au moins, elle n'était pas totalement seule à voir la vérité. Mais cela ne changeait rien à sa situation.

Elle se souvint d'une fois, il y a deux ans, où elle s'était accidentellement brûlée la main avec du thé brûlant en préparant la boisson matinale d'Antoine.

Il avait été immédiatement concerné, l'avait emmenée lui-même à l'infirmerie, s'assurant qu'elle reçoive les soins appropriés. Il avait même insisté pour qu'elle prenne le reste de la journée.

C'était avant Camille. Avant que son indifférence ne se transforme en cruauté passive.

La comparaison entre son attitude passée et sa réaction d'aujourd'hui était un nouveau coup de poignard.

Elle réalisait avec une amertume croissante à quel point elle était devenue insignifiante pour lui, à quel point l'emprise de Camille était totale et destructrice.

Son dévouement, sa loyauté, son amour secret, tout cela ne pesait rien face aux caprices de sa rivale.

Plus tard dans l'après-midi, alors qu'Amélie tentait de se concentrer sur son travail malgré la douleur et l'humiliation, son téléphone de bureau sonna. C'était Antoine.

Sa voix était neutre, comme si rien ne s'était passé.

"Amélie, Camille ne se sent pas très bien. Elle a des crampes. Pourriez-vous aller lui acheter des protections hygiéniques et une bouillotte ? Apportez-les ensuite à l'appartement. J'y serai avec elle."

Amélie ferma les yeux, écrasée. Non seulement il l'avait humiliée et punie injustement, mais maintenant il l'utilisait comme une courseuse personnelle pour sa fiancée.

Elle voulait crier, refuser. Mais elle savait que cela ne ferait qu'empirer les choses. Elle avait besoin de tenir encore quelques jours, le temps que sa démission soit effective.

"Bien, Monsieur," répondit-elle d'une voix monocorde.

En arrivant à l'appartement d'Antoine, elle fut frappée par les changements.

L'endroit, autrefois d'un minimalisme élégant et masculin, était en pleine transformation.

Des touches de rose poudré, de doré clinquant, des coussins en fausse fourrure et des bibelots féminins envahissaient l'espace. Le style opulent et un peu vulgaire de Camille était partout.

Cela ressemblait à une parodie de ce qu'avait été leur cocon secret.

Antoine l'accueillit à la porte, l'air préoccupé. Camille était allongée sur le canapé, gémissant doucement.

"Merci, Amélie," dit Antoine en prenant le sac qu'elle lui tendait. "C'est rapide."

Il remarqua la marque rouge sur sa joue, qui avait viré au bleu violacé.

"Votre joue... ça va ?" demanda-t-il, une once de préoccupation dans la voix.

Amélie eut un rire amer intérieur. Il remarquait enfin.

"Ce n'est rien, Monsieur. Un petit accident."

"Camille était très contrariée tout à l'heure," continua-t-il, comme pour justifier le comportement de sa fiancée. "Elle est très sensible en ce moment."

Il sortit une carte de crédit de son portefeuille. "Tenez. Pour vos frais médicaux, si besoin. Et pour le pressing de votre chemisier."

Une compensation dérisoire pour l'humiliation subie.

Amélie la refusa d'un geste de la main. "Ce ne sera pas nécessaire."

Il n'insista pas.

"Ah, une dernière chose," ajouta-t-il alors qu'elle s'apprêtait à partir. "Camille voudrait organiser une petite fête pour célébrer son retour à Paris et nos... fiançailles officieuses. J'aimerais que vous vous en occupiez. Réservez le salon de l'Hôtel Plaza Athénée, envoyez les invitations, coordonnez tout. Vous savez faire ça."

Amélie le regarda, incrédule. Organiser la fête de sa rivale, la célébration de sa propre défaite. C'était le comble de la cruauté.

Elle tenta de parler, de lui rappeler sa démission imminente.

"Monsieur de Valois, concernant ma..."

Il l'interrompit, déjà distrait par Camille qui l'appelait d'une voix plaintive depuis le salon.

"Oui, mon amour, j'arrive !" cria-t-il par-dessus son épaule. Puis, se retournant vers Amélie : "Faites au mieux, comme d'habitude. Camille a des goûts très précis, assurez-vous de la consulter pour les détails."

Il disparut dans le salon, la laissant seule dans l'entrée, avec cette nouvelle tâche absurde et douloureuse.

L'incapacité d'Amélie à se faire entendre, la persistance de son rôle de subordonnée dévouée même dans ces circonstances, la remplissaient d'un sentiment d'impuissance totale.

Elle voyait Antoine s'occuper de Camille avec une tendresse qu'il ne lui avait jamais manifestée. Il lui ajustait un coussin, lui parlait à voix basse, son regard empli d'une adoration aveugle.

Amélie se souvint des rares fois où elle avait été malade pendant ces quatre années. Il s'était contenté de lui dire de prendre un jour de congé, sans plus d'attention.

La différence de traitement était flagrante, douloureuse.

Elle n'était qu'un meuble utile, remplaçable. Camille était sa reine.

La semaine suivante, Amélie se retrouva donc à superviser les derniers préparatifs de la fête de "bienvenue et de fiançailles" de Camille de Rohan.

La soirée se déroulait dans l'un des plus somptueux palaces parisiens, comme l'avait exigé Camille.

Les invités, membres de la haute société parisienne, du monde des affaires et de la mode, affluaient, rivalisant d'élégance et de flatteries envers le couple vedette.

Antoine rayonnait aux côtés de Camille, qui portait une robe de haute couture extravagante, scintillante de diamants.

Amélie, en retrait, s'assurait que tout se déroulait sans accroc, le cœur lourd.

Plusieurs invités, connaissant la réputation d'Antoine, louaient sa constance et sa dévotion envers Camille, son amour de jeunesse enfin retrouvé.

"Antoine a toujours été un homme d'une grande fidélité," entendit-elle dire une vieille comtesse. "Il a attendu Camille pendant toutes ces années. C'est si romantique !"

Amélie eut envie de rire, ou de pleurer. Si seulement ils savaient.

Elle n'était qu'un fantôme dans cette mascarade, l'organisatrice invisible de son propre enterrement sentimental.

            
            

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