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KEYSSI
Mon cœur bat à tout rompre, presque à 200 à l'heure, et je sens mes mains moites, le souffle court. Une vague d'angoisse m'envahit alors que je réalise l'ampleur de la situation. Rien de bon ne sortira de cette soirée. Mon père, ce putain de lâche, me vend à la mafia Conti. Quelle ironie ! Je sais que nous ne nous connaissons que depuis quelques mois, mais je pensais que l'appel de la famille serait un facteur important pour lui, quelque chose qu'il respecterait. J'ai eu tort, profondément tort.
Damon revient vers nous dès qu'il termine sa conversation téléphonique. Il se fige un instant pour me regarder, avant de se tourner vers mon père, scrutant son visage avec une intensité glaciale. Un frisson d'angoisse me parcourt l'échine alors que je devine la menace qui se cache derrière son regard.
- Emmenez-le dehors, ordonne-t-il d'une voix calme, mais tranchante.
À ces mots, je vois mon père sombrer dans la panique. Il commence à supplier Damon, sa voix tremblante trahissant son désespoir.
- Pitié, Monsieur Conti ! Acceptez mon offre, s'il vous plaît, ne me tuez pas !
Damon lui lance un regard suffisant, ses yeux pétillants de dédain, comme s'il se délectait de la souffrance de mon père.
- Oh, mais Marco, j'accepte ton offre. Nous prendrons la fille. Mais tu dois bien comprendre que je ne peux pas laisser ton attitude impunie.
Il se penche vers lui, se mettant à sa hauteur, et je peux voir le dédain se transformer en une menace palpable.
- Qu'est-ce que les autres penseraient si je laissais un misérable rat s'en sortir sans égratignure alors qu'il a tenté de baiser la famiglia Conti ?
Il secoue la tête, comme si la simple idée le révulsait.
- Non, je ne peux pas laisser cela arriver.
Damon se redresse, réajuste son costume impeccable de sa main, une image de contrôle et de puissance.
- Alors, tu vas te comporter comme un homme pour une fois et endurer ta punition.
D'un coup de menton, il donne un ordre silencieux à ses hommes, qui se mettent en mouvement pour emmener mon père dehors. Le colosse qui le tenait le lâche à d'autres membres de l'équipe de Damon, tandis qu'il s'apprête à s'approcher de lui.
- Faites-lui comprendre qu'on ne tente pas de nous baiser sans conséquences. Mais... ne le tuez pas, ajoute Damon, sa voix feutrée, mais ferme.
Le colosse hoche la tête, comprenant l'implicite de la consigne, et sort rejoindre les autres, laissant mon père aux mains de ses acolytes. Je me retrouve seule avec Damon, l'air lourd d'une tension palpable.
Les battements de mon cœur résonnent encore dans mes oreilles alors que je réalise l'ampleur de ce qui vient de se passer. Je suis coincée dans un jeu de pouvoir, une marionnette dans un drame dont je ne maîtrise pas les ficelles.
Je fixe le sol, n'osant pas lever la tête. La tension dans l'air est palpable et je sens le regard de Damon sur moi, un regard qui pèse lourdement et me terrifie.
- Lève-toi !
L'ordre résonne dans la pièce, et je sursaute, mais je m'exécute immédiatement. Mes jambes flageolent, engourdies d'être restées en position agenouillée pendant si longtemps. Ce n'est qu'à ce moment-là que je prends pleinement conscience de la tenue dans laquelle je me trouve. Je porte un tee-shirt large qui laisse apparaître mon épaule gauche dénudée et m'arrive jusqu'à mi-cuisse. Autrement dit, je suis quasiment nue, et une vague de honte me submerge.
Damon s'approche de moi, glissant son index sous mon menton pour me relever la tête, forçant notre regard à se croiser.
- Quel est ton prénom ? me demande-t-il, sa voix dénuée de toute émotion.
Je déglutis, une boule se formant dans ma gorge. Je m'éclaircis la voix, tentant de la rendre aussi assurée que possible.
- Keyssi.
Il plisse les yeux, penchant légèrement la tête, comme s'il tentait de déchiffrer un mystère enfoui dans mes mots.
- Ça ne sonne pas vraiment italien.
Je me retiens de lever les yeux au ciel, l'agacement montant en moi. On dirait mon grand-père, toujours prêt à juger ce qui est « authentique » ou non. Il reste silencieux, continuant de m'observer avec une intensité dérangeante. Soudain, je me sens obligée de me justifier.
- La meilleure amie de ma mère s'appelait Keyssi Williams, c'était une Américaine. Elle est décédée avant ma naissance d'une longue lutte contre le cancer. Ma mère m'a appelée comme elle pour lui rendre hommage. Mon grand-père était fou de rage à cause de cela, alors pour le calmer un peu, elle m'a donné en deuxième prénom Lucia. C'est comme cela que mon grand-père m'appelle. Mais il est bien le seul.
- Intéressant, sourit-il en coin, un rictus qui ne fait que renforcer mon inquiétude.
À ce moment-là, je réalise l'énorme bourde que je viens de commettre. En lui donnant cette information, j'ai ouvert une porte sur ma vie que je n'aurais jamais dû laisser entrebâillée. Personne, en dehors de mon grand-père, de ma mère et de mon père, n'était au courant de mon existence avant ce soir. Avec cette information sur mon deuxième prénom, Damon n'aura aucun mal à dire à mon grand-père qu'il me détient.
Quelle idiote je fais ! Une vague de panique s'empare de moi alors que je réalise que j'ai potentiellement mis ma vie en danger. Les conséquences de mes mots pourraient être plus dangereuses que je ne l'avais imaginé. Je suis piégée, et je ne sais pas comment me sortir de cette situation.
Il commence à tourner autour de moi tel un prédateur, scrutant chaque détail de ma personne avec une intensité qui me met mal à l'aise. Je sens mon cœur battre plus vite alors qu'il s'approche, son regard perçant évaluant tout, de ma posture à ma tenue.
De retour face à moi, il attrape une mèche de mes cheveux et la porte à son nez. Il inspire profondément en fermant les yeux, comme s'il s'imprégnait de mon odeur. Sa proximité me coupe le souffle. Son visage n'est qu'à quelques centimètres du mien, et je suis submergée par un mélange de fascination et de peur.
C'est un bel homme, sans aucun doute. Grand, brun, avec des cheveux courts sur les côtés et un peu plus longs sur le dessus, il dégage une aura de puissance. Ses pommettes saillantes, son nez droit et élégant, un grain de beauté sous l'œil gauche et une fossette adorable à la joue droite lui donnent un charme indéniable.
Il aurait pu être tout à fait mon style de mec, s'il n'était pas un putain de mafieux. Non, c'est faux, même en étant un mafieux, il correspond à mes goûts. Mais soyons honnêtes : ces hommes ne connaissent pas l'amour. Ils ne connaissent que la force. Dans leur monde, il faut obéir au doigt et à l'œil. Ils attendent que l'on se plie à leurs exigences, et il est impératif de rentrer dans le moule sous peine d'en subir les conséquences.
Et quelque chose, dans l'air lourd de cette pièce, me dit que je vais subir ces conséquences. La crainte se mêle à une inexplicable attraction, un paradoxe qui me laisse désorientée. Je suis prise au piège, à la merci d'un homme qui semble incarner tout ce que je redoute et ce que je désire en même temps. Chaque seconde qui passe intensifie cette sensation de danger imminent, et je sais que je dois rester sur mes gardes.