/0/23855/coverbig.jpg?v=7e842a41be127fb76bb1cc6084f0d4df)
Shelby SABA
Je ne comprends pas comment on peut prétendre aimer quelqu'un tout en le traitant comme notre père nous traite.
Je me souviens du jour où il a chassé notre sœur aînée, Saraï. Elle avait 22 ans. J'étais trop jeune pour comprendre ce qui se passait, mais je me souviens d'elle pleurant pendant qu'un des gardes de mon père la traînait hors de la maison. Mon père menaçait ma mère de la suivre si elle osait intervenir.
Plus tard, il a fait la même chose à Carène. Aujourd'hui, c'est mon tour, et je comprends enfin ce qu'elles ont dû ressentir.
Aux yeux du monde, je suis née avec une cuillère en or dans la bouche. Pourtant, je vis comme une étrangère dans la maison de mon propre père.
Mes cousins, cousines, neveux et nièces reçoivent des voitures en cadeau d'anniversaire de sa part, tandis que je dois me contenter de celles de ma mère. Leurs comptes en banque sont alimentés chaque mois par mon père, alors que je reçois une simple enveloppe chaque 31 du mois. Mes sœurs et moi avons toujours reçu en argent de poche la moitié de ce que les autres percevaient. Cette injustice a fini par entacher nos relations avec nos neveux et nièces.
Pendant notre scolarité, si nous n'étions pas dans les trois premiers de la classe, il nous faisait travailler durant toutes les vacances et s'emparait de notre salaire, prétextant que nous devions lui rembourser les frais de notre scolarité.
Jeffrey SABA
Toutes les décisions que j'ai prises concernant mes enfants, que leur mère juge parfois insensées ou trop dures, ont toujours été motivées par leur bien-être. J'aime mes filles plus que tout. Dieu m'a comblé de filles dont je suis fier à bien des égards, mais elles n'ont jamais entendu ces mots sortir de ma bouche, et je n'ai jamais laissé paraître cette fierté.
Aujourd'hui, les gens ne voient que ma réussite et ma richesse, mais ils ignorent les sacrifices et les efforts acharnés qui m'ont permis d'imposer mon nom. La vie ne fait de cadeau à personne, et il faut savoir lutter pour se faire une place.
Je veux préparer mes enfants à affronter le manque avant de profiter de l'abondance. Elles doivent apprendre à se battre seules. Oui, je reconnais que je suis sévère avec elles. Avant qu'elles ne quittent la maison, je leur interdis de se présenter comme mes filles. Elles doivent trouver un emploi par leurs propres moyens, comprendre la dureté de la vie et toucher du doigt les réalités que j'ai vécues, afin de gérer plus tard l'héritage que je leur laisserai.
Je répète souvent à leurs neveux et nièces, même en présence de leurs parents, que je ne lèguerai mon héritage à personne d'autre qu'à mes filles. Chacun profite de mes avantages de mon vivant, mais le jour où je pousserai mon dernier souffle, ils devront tous quitter ma maison. Je le rappelle sans cesse. Le fait que je les traite mieux que mes propres enfants les aveugle parfois, mais je ne manque jamais une occasion de leur rappeler que personne ne disputera l'héritage de mes filles. Mais avant de le mériter, elles devront construire leur propre richesse.
Je garde toujours un œil sur elles lorsqu'elles quittent la maison. J'ai été plus sévère avec Saraï qu'avec les deux dernières. La raison principale, c'est que la cadette est restée pratiquement deux ans sous mon toit, avec la complicité de sa mère, me laissant croire qu'elle était partie. Je le savais pourtant. Il est temps qu'elle affronte la dureté de ce monde et apprenne à survivre dans cette jungle qu'est la vie. Shelby n'est pas paresseuse, mais elle manque de la force de ses sœurs aînées. C'est pour cela que je l'ai gardée à la maison plus longtemps. Je veux qu'elle devienne forte, une véritable amazone, comme ses sœurs. Que je suis fier d'elles !