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Chapitre 3
Les pages du contrat étaient épaisses entre ses doigts, lourdes d'une promesse qui n'avait rien de romantique. Lina parcourut les lignes avec un mélange de méfiance et d'incrédulité, cherchant à comprendre l'ampleur de ce qu'elle s'apprêtait à accepter.
- Tu as des questions ? demanda Gabriel, calme, installé face à elle comme si tout ceci n'était qu'une simple formalité administrative.
Des dizaines. Des centaines. Mais aucune qui puisse le faire changer d'avis. Elle pinça les lèvres et se força à rester concentrée sur les mots froids et impersonnels du document.
**Article 3 – Engagement public** : *Les parties s'engagent à apparaître comme un couple uni en toute circonstance, lors des événements professionnels et mondains. Tout comportement susceptible de nuire à cette image sera considéré comme une violation du contrat.*
Son cœur se serra. C'était bien réel. Il attendait d'elle qu'elle joue un rôle, qu'elle devienne une femme qu'elle n'avait jamais voulu être. Une épouse de façade, souriante, docile, parfaite.
- Je suis censée... t'accompagner partout ?
- Quand ce sera nécessaire, oui. J'ai une image à préserver, et tu en feras partie.
Sa voix était posée, presque détachée, comme s'il lui demandait simplement d'être une employée modèle. Rien d'étonnant de la part d'un homme qui gérait sa vie comme une entreprise.
- Et si je refuse d'assister à un de ces événements ?
- Ce serait une rupture de contrat, répondit-il sans ciller.
Lina inspira profondément et continua sa lecture, s'attardant sur chaque ligne, cherchant une faille, une échappatoire. Puis, un passage la fit tiquer.
**Article 5 – Résidence commune** : *Les parties doivent vivre sous le même toit pour assurer la crédibilité de leur union. Toute absence prolongée et injustifiée pourra entraîner des sanctions définies en annexe.*
Elle releva brusquement la tête.
- Je dois emménager chez toi ?
Gabriel haussa un sourcil, visiblement surpris de son ton.
- Évidemment. Tu crois que quelqu'un croirait à notre mariage si on vivait séparément ?
Elle se redressa, posant le contrat sur la table, les doigts crispés autour des feuilles.
- C'est une mauvaise idée.
- C'est une nécessité.
Son regard sombre la fixait, perçant ses défenses avec une assurance qui la mettait mal à l'aise.
- Je peux très bien jouer le rôle d'une épouse aimante sans habiter chez toi.
- Non. Il y aura des soupçons dès le départ. On parlera de nous, on fouillera. Ce contrat doit être crédible.
Lina croisa les bras, cherchant à reprendre le contrôle d'une situation qui lui échappait.
- Et qu'est-ce qui se passe si quelqu'un découvre qu'on joue la comédie ?
Un léger sourire effleura les lèvres de Gabriel.
- Alors, on aura un problème bien plus grand que ce contrat.
Elle secoua la tête, exaspérée par son flegme.
- Tu as tout prévu, n'est-ce pas ?
- Je n'aime pas laisser de place au hasard.
Bien sûr. Gabriel n'était pas du genre à se lancer dans quelque chose sans avoir calculé chaque détail. Ce qui expliquait probablement pourquoi il ne semblait pas du tout inquiet alors qu'elle, elle luttait contre une panique sourde.
- Et la durée ? demanda-t-elle, tentant de garder une voix stable.
- Un an.
Un an. Douze mois à jouer à la femme parfaite, à vivre sous le même toit que lui, à prétendre qu'ils étaient amoureux devant le monde entier. Une éternité.
- Si tu respectes ta part du contrat, ajouta Gabriel, tu auras tout ce dont tu as besoin pour assurer l'avenir de ta famille.
Le poids de ses mots s'abattit sur elle. Il lui rappelait, sans même hausser le ton, pourquoi elle était là. Pourquoi elle n'avait pas le choix.
Elle ferma les yeux une seconde. L'argent. La maison. La survie de sa famille.
Lina rouvrit les paupières et attrapa un stylo.
- Très bien.
Elle signa, chaque trait de plume scellant un destin qu'elle n'aurait jamais imaginé pour elle-même.
Lorsqu'elle releva les yeux, Gabriel la regardait toujours, son expression indéchiffrable.
- Bienvenue dans notre mariage, Lina.