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Rhys s'éloigna de la clairière, ses pas silencieux sur le sol de la forêt. Il ne voulait pas que Kara voie son trouble, mais il ne pouvait ignorer ce qu'il venait de ressentir. Le lien entre eux était palpable, intense, comme une liane invisible qui les attachait. Il n'avait jamais cru à ces histoires d'âmes sœurs, ni aux prophéties des anciens. Les Alphas étaient des leaders, des prédateurs, non des rêveurs attachés à des mythes. Pourtant, chaque fibre de son être avait réagi à la présence de Kara comme si elle avait été inscrite dans ses gènes depuis la naissance.
Il s'arrêta un instant, balayant la forêt de ses yeux sombres. Un frisson parcourut son échine. Ce n'était pas simplement une attirance. Non, c'était bien plus que cela. C'était comme si le destin s'était ligué contre lui, l'obligeant à se confronter à quelque chose qu'il n'avait ni demandé ni désiré. Et ce lien était dangereux. Terriblement dangereux.
Rhys se força à prendre une profonde inspiration. La forêt, calme et implacable, semblait ignorer la tempête qui faisait rage en lui. Son regard se fixa sur l'horizon. Il savait qu'il ne pouvait pas ignorer ce qui venait de se passer, mais il devait le faire. Il n'y avait aucune place pour la faiblesse dans sa meute. L'instinct de survie était plus fort que tout, et se laisser guider par ce lien ne pouvait que les conduire à la ruine.
Il se rappela la promesse faite à sa meute, la promesse de rester loin des terres des autres. Les conflits entre les meutes étaient fréquents, violents, et l'idée de se mêler à celle de Kara, même à travers un lien aussi irrésistible, pouvait détruire tout ce qu'il avait construit. Pourtant, la pensée de ne jamais revoir ses yeux, de ne jamais ressentir cette connexion aussi profonde, lui déchirait l'âme. C'était comme une malédiction et une bénédiction à la fois. Mais, comme tout ce qui le concernait, ce lien devait être brisé. Pour son bien, pour le bien de sa meute, il ne pouvait se permettre de fléchir.
Il se tourna brusquement, se dirigeant vers les profondeurs de la forêt. Les voix de son propre Alpha, l'écho des traditions et des règles établies, résonnaient dans son esprit. Il avait été élevé pour être fort, pour faire ce qui était nécessaire pour la survie. Une part de lui savait que ce qu'il ressentait n'était qu'une illusion. Un piège tendu par son propre désir. Mais cette illusion... cette illusion avait le pouvoir de tout engloutir, de faire basculer le fragile équilibre qui régnait entre les meutes rivales.
Le soir tombait sur la forêt, et l'obscurité s'étendait comme une couverture lourde. Rhys ne se sentait pas rassuré par l'obscurité, mais il savait que la nuit était son domaine. Il était fait pour cela, pour traquer, pour dominer. Mais cette nuit-là, une autre sorte de traque l'assaillait. Un piège invisible qu'il ne pouvait échapper.
Lorsque Rhys revint dans le campement de sa meute, il aperçut les membres rassemblés autour du feu. Ils avaient tous remarqué son absence prolongée, mais personne ne posa de question. La meute savait être discrète, elle connaissait le langage des Alphas, la solitude qui parfois précède une prise de décision importante. Mais une fois qu'il posa son regard sur les visages qui se tournaient vers lui, une lourde certitude s'installa en lui. Il ne pouvait pas laisser cette connexion avec Kara évoluer. Une telle faiblesse ne pourrait jamais être acceptée.
Son second, Toren, s'approcha de lui, scrutant ses traits avec une attention qui ne lui échappait pas. « Tout va bien ? » demanda-t-il d'une voix mesurée.
Rhys hocha lentement la tête, bien que sa tension intérieure ne faiblît pas. « Oui, tout va bien. Prépare les patrouilles pour demain. Je vais dormir. »
Toren le regarda encore un moment, mais, jugeant qu'il n'aurait pas plus de réponses, s'éloigna. Rhys s'installa dans un coin sombre du campement, loin des yeux des autres. Il savait que le temps était compté. Chaque seconde passée loin de Kara augmentait le poids de l'inévitable. Mais il n'avait pas le luxe de céder à ce qu'il ressentait. Le lien était une faiblesse, et il ne pouvait pas se permettre de montrer de la faiblesse.
Il ferma les yeux, se concentrant sur le bruit du vent dans les arbres, sur les murmures des membres de sa meute, mais son esprit, lui, était loin. Il revivait sans cesse la rencontre avec Kara. Ses yeux perçants, son allure fière, sa détermination. Une louve qui, comme lui, n'acceptait aucune contrainte. Une louve qui lui rappelait à chaque instant que l'attirance qu'ils partageaient était plus qu'un simple caprice. C'était un avertissement.
Le lendemain matin, alors que les premières lueurs du jour caressaient les cimes des arbres, Rhys s'éloigna de la meute, fuyant le poids des attentes et des responsabilités. Il devait retrouver la forêt, son territoire, et se recentrer. Kara, pourtant, hantait ses pensées. Il savait que la rencontrer à nouveau serait une erreur, mais il ne pouvait pas la chasser de son esprit.
À peine avait-il fait quelques pas dans les bois qu'il entendit une silhouette se déplacer derrière lui. Il s'arrêta, immédiatement sur le qui-vive. C'était elle. Kara.
Elle apparut dans la lumière tamisée du matin, aussi sauvage et déterminée qu'il l'avait vue la première fois. Elle le regardait sans peur, mais il y avait une lueur de curiosité dans ses yeux. Rhys resta immobile, son cœur battant un peu plus fort malgré lui. Il savait qu'ils ne pouvaient pas se permettre une nouvelle rencontre. Ce n'était pas une question de volonté, c'était une question de survie. Mais elle, elle ne semblait pas en être consciente.
« Je savais que tu reviendrais », dit-elle enfin, d'une voix calme, presque provocante.
Rhys prit une profonde inspiration, son esprit tourmenté par la tension de l'instant. « Tu ne comprends pas, Kara. Ce lien... il ne nous mènera nulle part. Nous sommes d'ennemis jurés. Et le seul chemin qui s'ouvre à nous est celui de la guerre. »
Elle ne recula pas. "Tu penses vraiment que nous ne pouvons pas choisir autre chose ? »
Il la fixa, tentant de lire dans ses yeux l'intensité de ses convictions. Il savait qu'elle n'accepterait pas de se retirer. Mais il devait la faire comprendre, d'une manière ou d'une autre, que leur lien n'était pas un cadeau. C'était une malédiction qui, s'ils la laissaient se développer, les engloutirait tous.
Le silence s'étira entre eux, lourd et palpable, comme une corde tendue prête à se briser. Rhys et Kara se faisaient face, chacun des deux marqués par l'intensité de ce moment. Leurs regards s'étaient croisés à plusieurs reprises, mais à chaque instant, la tension montait, un défi silencieux s'installant entre eux, irréductible et dangereux.
Kara, les poings serrés, sentait le poids de ses émotions se déverser en elle, mais elle ne voulait pas céder à l'impulsion. Chaque mot qu'elle prononçait, chaque mouvement qu'elle faisait, semblait nourrir cette tension croissante. Il y avait quelque chose de primitif dans l'air, un défi entre deux prédateurs qui se reconnaissaient et se repoussaient en même temps. Elle sentait le lien entre eux, une attraction aussi forte qu'une force naturelle, mais c'était un lien qu'elle ne pouvait accepter, un lien qu'elle refusait d'admettre. Elle n'était pas une créature qui se pliait à la destinée ou aux règles des autres. Son esprit était trop libre, trop indomptable.
« Tu n'as pas idée de ce que tu proposes, » murmura Rhys, la voix basse, presque menaçante, mais emplie de quelque chose qu'elle ne pouvait définir. « Notre rencontre, ce lien... c'est un piège, Kara. Pour nous deux. Si tu continues, tu détruiras tout. »
Kara le regarda, sa poitrine se soulevant sous la tension, son esprit en ébullition. Les paroles de Rhys résonnaient dans sa tête, mais elle refusait d'accepter cette vérité. Elle n'était pas une prisonnière du destin. Elle se détourna, décidée à ne pas céder à cette emprise invisible. « Je ne suis pas une faiblesse. Et je ne suis pas prête à fuir un lien que je ne comprends pas. »
Rhys fit un pas en avant, mais elle l'arrêta d'un regard froid, se maintenant à distance. « Je ne suis pas là pour te convaincre, Rhys. Si tu crois que ce lien nous enferme, alors c'est à toi de choisir d'y échapper. »
Avec un dernier regard, Kara tourna les talons et s'éloigna, ses pas résonnant dans la forêt comme un écho des paroles qu'ils venaient d'échanger. Elle sentait son cœur battre plus fort, mais sa décision était prise. Elle devait partir, s'éloigner de cette force, de cette attraction qui menaçait de la déstabiliser. Elle n'était pas faite pour la soumission. Ni pour les promesses qu'on lui imposait.
Tandis qu'elle se dirigeait vers sa meute, chaque pas semblait plus lourd, comme si la forêt elle-même refusait de la laisser partir. Kara se retrouva plongée dans ses pensées, l'image de Rhys ancrée dans son esprit. Il y avait cette intensité qu'elle ne pouvait ignorer. Mais il y avait aussi quelque chose de profondément inquiétant dans ce lien. Il avait raison sur un point : tout cela pourrait la détruire. La question était de savoir si elle en avait le pouvoir.
En rejoignant sa meute, Kara sentit les regards se poser sur elle. Son père, son Alpha, l'attendait, son expression grave. Il n'avait pas besoin de poser de question pour voir que quelque chose avait changé. Il la scrutait, cherchant une explication dans ses yeux. Kara détourna le regard, son esprit encore embrumé par la rencontre. Elle n'avait pas de réponses à lui donner. Pas encore.
Elle se tint droite, son attitude sans faille, mais au fond d'elle, un tourbillon se formait. Elle ne pouvait pas oublier Rhys, ni ce qu'elle avait ressenti en sa présence. Un mélange de défi et d'attirance, de danger et de désir. Quelque chose qui la dépassait. Quelque chose qu'elle ne pouvait pas ignorer, mais qu'elle ne voulait pas accepter.
Dans l'ombre de la meute, Kara se renferma sur elle-même, plongée dans un tourment intérieur. La forêt semblait plus silencieuse que jamais, et même l'air qu'elle respirait lui paraissait lourd, comme si le monde entier attendait qu'elle fasse un choix. Mais il n'y avait pas de choix simple. La seule certitude qu'elle possédait désormais était que rien ne serait plus pareil.