Chapitre 4 Chapitre 4

FL se tint un moment en silence, les bras croisés, observant ML qui se tenait là, hésitant, presque impuissant. La situation avait un goût amer, un goût de déjà-vu qu'elle ne pouvait ignorer. Elle avait entendu ses mots, perçu la sincérité dans son ton, mais cette demande, bien que légitime, ravivait des blessures anciennes. Le voir revenir dans sa vie après tout ce temps, après ce qu'il lui avait fait, ne pouvait être qu'une ironie du destin. Pourtant, il n'y avait pas de place pour la rancœur dans ce monde.

Elle inspira profondément et hocha lentement la tête, la décision était prise.

- Je vais t'aider, dit-elle enfin, d'une voix ferme mais sans chaleur, mais à une condition. Je veux que tu comprennes qu'il n'y a pas de retour en arrière. Je t'assisterai, je ferai ce qui est nécessaire pour sauver ton homme, mais je maintiens mes distances.

ML ne répondit pas immédiatement. Un léger frisson parcourut son corps à la mention de cette distance qu'elle imposait, mais il savait qu'il n'avait pas le luxe de choisir. Il n'avait d'autre option que d'accepter ses conditions, aussi amères soient-elles.

- D'accord, dit-il après un moment d'hésitation, sa voix marquée par la tension du moment. Je comprends.

Il la suivit à travers la pièce, les bruits de ses pas résonnant sur le plancher de bois. FL s'approcha du malade avec une détermination inébranlable, posant ses mains sur son front fiévreux, écoutant les battements irréguliers de son cœur. Ses gestes étaient méthodiques, contrôlés, chaque mouvement dénotant l'expérience et la maîtrise qu'elle avait acquises au fil des années.

ML, observant de loin, ne pouvait s'empêcher de ressentir un étrange mélange de respect et d'admiration pour cette femme qu'il avait connue jeune et qui, aujourd'hui, se tenait devant lui comme une figure imposante de compétence et de force. Il avait toujours su qu'elle était capable de grandes choses, mais la voir en action, dans ce rôle de sauveuse, dépassait tout ce qu'il aurait pu imaginer.

Elle ne lui jetait pas un seul regard, se concentrant pleinement sur le malade, mais il sentit son regard peser sur lui, comme une présence constante dans l'air. Il aurait voulu détourner les yeux, mais il ne pouvait s'empêcher de la regarder. Il la voyait d'une manière nouvelle, comme une femme forte, indépendante, complètement différente de celle qu'il avait laissée derrière lui. Et chaque regard qu'il lui portait, chaque geste qu'elle accomplissait, réveillait en lui des sentiments qu'il avait tenté d'enfouir.

FL continua d'examiner le malade avec une rigueur intransigeante, mais à chaque instant, elle sentait l'intensité de son regard, ce poids silencieux qui pesait sur elle. La tension entre eux était palpable, presque électrique. Chaque geste de FL était précis, chaque mouvement semblait calculé pour éviter toute interaction inutile avec lui. Mais la proximité les forçait à se croiser du regard, et chaque échange semblait laisser une marque invisible entre eux.

ML, les bras croisés, se tint à distance, une distance qu'il n'avait jamais dû observer auparavant. Elle n'était plus la même. Le lien qu'ils avaient partagé autrefois semblait avoir été effacé, effondré sous le poids des années et des événements. Mais, paradoxalement, c'était cette distance, cette froideur qui l'attirait. FL avait changé, elle n'était plus la jeune fille dépendante, mais une femme forte, une professionnelle qui n'avait besoin de personne pour se définir.

Alors qu'elle administrait un remède à base de plantes qu'elle avait soigneusement préparé, ML la regarda, presque fasciné par la fluidité de ses gestes. Elle ne s'attardait pas sur le passé, elle était présente, là, dans l'instant, maîtrisant la situation avec une facilité déconcertante. Un autre homme aurait été impressionné par la compétence, mais pour ML, c'était bien plus que cela. C'était un rappel de ce qu'il avait perdu, de ce qu'il n'avait jamais su apprécier à sa juste valeur.

La tension dans la pièce se faisait de plus en plus vive, presque insupportable. La situation, d'un côté tendue par le malade qui se battait contre une maladie qui semblait presque surnaturelle, et de l'autre par la chaleur de la proximité entre lui et FL, qui ne cessait de le troubler, de le mettre dans un état de nervosité qu'il n'avait pas connu depuis longtemps.

Il se souvint de la dernière fois qu'ils avaient été proches, de cette nuit où tout avait basculé, de l'intensité de leur connexion, de cette sensation d'être entier lorsqu'il était avec elle. Et bien que la situation actuelle n'ait rien de romantique, il ne pouvait s'empêcher de ressentir un léger pincement dans son cœur chaque fois que leurs yeux se croisaient.

Elle se tourna enfin vers lui, une lueur de fatigue dans les yeux, mais une détermination inébranlable sur le visage.

- Le remède que j'ai préparé peut prendre un certain temps avant de montrer des résultats. Il faut attendre.

Elle se détourna rapidement pour aller chercher des instruments, mais avant de s'éloigner, ML la suivit du regard, ses pensées confuses et désordonnées. Il aurait voulu lui parler, briser cette glace entre eux, mais il savait que ce n'était ni le lieu ni le moment. De plus, il n'était pas certain d'avoir les mots justes, d'être prêt à la rencontrer là où elle se trouvait maintenant.

FL s'approcha de nouveau du malade, ses mains, pourtant expertes, tremblant légèrement. Elle ne voulait pas montrer de faiblesse, mais il était impossible de ne pas ressentir le poids de l'instant. Alors qu'elle préparait une nouvelle dose de remède, elle sentit à nouveau la chaleur de son regard sur elle, et une partie d'elle se demanda, pour la millième fois, pourquoi elle n'arrivait toujours pas à le fuir. Pourquoi, malgré sa colère et sa douleur, il était toujours là, en elle, dans ses pensées, dans son cœur.

Le silence se fit lourd, et bien que tout semblait parfaitement sous contrôle, les deux anciens amants étaient séparés par un abîme invisible qu'ils ne pouvaient franchir, une brèche qu'aucune parole ne semblait pouvoir combler. Mais dans cette pièce silencieuse, au-delà de la maladie qui frappait l'un des leurs, c'était le malaise entre eux qui semblait le plus difficile à guérir.

ML ne pouvait nier la sensation étrange qui grandissait en lui, comme une pression silencieuse mais insistante dans sa poitrine. Chaque fois que ses yeux se posaient sur FL, une sensation familière mais inédite de connexion se faisait jour. Cela n'avait aucun sens, et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de se sentir attiré par elle, comme s'il était incapable de détourner son regard, de fuir ce lien invisible qui semblait les unir à chaque instant. Il le rejetait violemment, le refusait au fond de son esprit. Après tout, il n'avait plus de place pour cela. Il n'avait jamais cru à ces sortes de coïncidences ou de mystères liés au destin. Son destin, il l'avait forgé dans la douleur, la trahison et la solitude, et il ne croyait plus en De telles chimères.

Il secoua la tête, chassant les pensées qui tentaient de s'installer en lui, se concentrant sur les tâches à accomplir. La situation de la meute était encore précaire, il ne pouvait se permettre de se laisser distraire par des sentiments qui ne menaient nulle part. Mais dans le fond, une petite voix persistait, un murmure silencieux qui lui disait que, peut-être, il était en train de se tromper. Il n'avait pas le droit d'ignorer cette sensation... mais il le faisait. Par orgueil, par peur, ou simplement parce que le poids de son rôle d'alpha exigeait qu'il se détourne de toute distraction inutile.

Mais son esprit était déjà ailleurs.

Un autre problème surgit en même temps que ses doutes : un de ses propres loups, un jeune alpha ambitieux, osait défier son autorité. Ce n'était pas la première fois que ce loup, connu pour son esprit rebelle et ses idées radicales, mettait en question la direction de la meute. Mais aujourd'hui, il avait franchi la ligne. Il remettait ouvertement en cause les décisions de ML devant le reste de la meute. Le jeune alpha, fougueux et empli d'idéaux de renouveau, prétendait que la meute méritait un leader plus fort, plus audacieux, quelqu'un qui incarnerait l'avenir, pas un alpha « affaibli par les épreuves passées ».

Les paroles du loup résonnaient comme des éclats de verre dans l'air. Il était difficile de ne pas entendre la menace sous-jacente de ses mots. La tension monta instantanément dans l'assemblée. Un alpha contesté n'est qu'un alpha qui commence à faiblir, et cet affrontement public ne faisait qu'aggraver les doutes que la meute nourrissait à son égard. ML sentit la brûlure de ces attaques, et sa réponse fut immédiate, son instinct de leader se réaffirmant dans un éclat de puissance.

Il s'avança, sa posture droite et imposante, ses yeux lançant un avertissement silencieux. Le jeune alpha baissa brièvement les yeux, comme s'il sentait la tempête arriver, mais son orgueil le poussait à aller plus loin.

- Tu crois vraiment que tu es à la hauteur, n'est-ce pas ? lui lança ML, sa voix profonde et pleine de défi. Il n'y a pas d'avenir sans passé, et tu es loin de comprendre ce que ça signifie. La force ne réside pas seulement dans la brutalité de la jeunesse, mais dans la sagesse des expériences vécues.

Un silence tendu suivit ses paroles, chacun des membres de la meute observant les deux mâles qui se faisaient face. Les murs semblaient se refermer autour d'eux, et l'air lourd était marqué par l'imminence d'un conflit.

FL, qui était restée en retrait jusqu'alors, sentit la montée de la tension. Bien que son cœur battait pour d'autres raisons, un frisson de prémonition la traversa. Elle savait que cet affrontement était bien plus qu'une simple querelle entre loups. C'était le reflet du chaos qui menaçait d'envahir la meute, un chaos dont elle aurait bien du mal à se détacher. La fragile alliance qu'elle avait acceptée avec ML risquait de se briser sous les coups de l'ambition démesurée de certains.

Le jeune alpha ne céda pas, mais son regard se fit plus insistant, cherchant une brèche dans la façade de ML. Il savait que l'alpha affaibli par ses déceptions était vulnérable. Pourtant, malgré ses provocations, ML ne fit qu'un pas en avant. Ses yeux brillaient d'une lueur froide, et sans un mot, il montra qu'il ne tolérerait pas de remise en question publique de son autorité.

Le jeune loup, sentant le poids de l'échec, se recula finalement, le regard baissé. Un dernier souffle de défi passa, mais il était clair que l'alpha avait repris le contrôle. Cependant, ce simple affrontement laissait des cicatrices invisibles. Chaque mot prononcé, chaque acte de défi, jetait une ombre supplémentaire sur l'autorité fragile de ML.

De son côté, FL, silencieuse mais attentive, observait tout, ses pensées tournant comme un tourbillon. Elle sentait l'ombre grandissante de l'agonie interne de la meute, les fissures se propageant dans son tissu fragile. Ces événements la touchaient d'autant plus qu'ils la forçaient à confronter des réalités qu'elle aurait préféré ignorer. Elle n'était plus une simple observatrice, mais un acteur, bien malgré elle, dans une bataille plus grande qu'elle.

Dans l'esprit de ML, la situation devenait de plus en plus complexe. L'épreuve d'autorité avait montré qu'il n'avait pas encore totalement perdu sa position, mais il savait qu'il devait encore lutter contre les assauts de son passé, contre la rébellion interne qui s'intensifiait jour après jour. Les menaces étaient bien réelles, et ce n'était pas la fin de ses défis. Les visages des loups qu'il avait jadis dirigés se tournaient lentement contre lui, et la pression de tout cela semblait presque insupportable.

Mais au fond de lui, une question persistait, plus aiguë que jamais : qu'est-ce que cette étrange sensation qu'il ressentait lorsqu'il se trouvait près de FL ?