Nathan Simps était une énigme. Certes, il était admiré pour ses talents d'homme d'affaires et son charisme en société, mais des zones d'ombre subsistaient dans son passé. L'un des articles les plus troublants remontait à trois ans : une photo granuleuse d'une femme nommée Camille Doucet, prétendument sa fiancée à l'époque. D'après les sources, Camille avait brusquement disparu, laissant derrière elle un simple message d'adieu. Aucun mot de Nathan dans les médias. Pas de déclaration publique. Rien.
Clara se mordit la lèvre. Était-ce une coïncidence ou quelque chose de plus inquiétant ? Elle recula sa chaise, étirant ses bras endoloris. Les questions se bousculaient dans sa tête. Nathan lui semblait désormais bien plus qu'un homme arrogant à la tête d'un empire.
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Le matin suivant, Julien était déjà chez les Moreau, attablé dans le salon, un café à la main et son téléphone greffé à l'oreille. Clara entra, les yeux encore lourds de fatigue, et s'assit en face de lui. Julien posa son téléphone, un sourire pincé au coin des lèvres.
« Tu es prête pour aujourd'hui ? » demanda-t-il en haussant les sourcils.
« Je n'ai pas l'impression d'avoir vraiment le choix, » répliqua Clara d'un ton sec.
Julien haussa les épaules, imperturbable. « Tu fais ce qu'il faut pour ta famille. Il y a des sacrifices à faire, Clara. Tout le monde doit en faire. »
Elle le fusilla du regard mais s'abstint de répondre. Sa mère, Élise, entra alors dans la pièce, l'air visiblement préoccupé.
« Clara, tu as réfléchi ? » demanda-t-elle doucement, sa voix teintée de culpabilité.
Clara serra les poings. « J'ai réfléchi. Je vais signer. »
Un soupir de soulagement collectif sembla remplir la pièce, mais Clara n'en ressentit aucun répit.
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Lorsque Nathan arriva dans l'après-midi pour la signature officielle, il était accompagné d'un petit groupe : Mathilde Rivière, bien sûr, toujours impeccable et froide, mais aussi Amélia, une consultante en affaires légales. Amélia était une femme d'apparence calme, son visage masquant toute émotion.
Antoine, qui était resté en retrait depuis plusieurs jours, fit une apparition inattendue. Il s'assit au fond de la pièce, silencieux, observant les interactions avec une intensité troublante. Clara remarqua que son regard s'attardait un peu trop longtemps sur Amélia.
Nathan posa un épais contrat sur la table du salon, ses doigts tapotant légèrement la couverture.
« Voilà, Clara, tout est là. Prenez le temps de lire si vous voulez, » dit-il, mais son ton ne laissait aucun doute : il s'attendait à ce qu'elle signe.
Elle prit le contrat en main, parcourant les pages rapidement. Tout y était. Les clauses sur leurs apparitions publiques, les restrictions sur leurs vies privées, et, bien sûr, les bénéfices financiers pour la famille Moreau. Mais quelque chose lui manquait encore.
« Avant de signer, » dit Clara, relevant la tête, « j'ai une condition. »
Nathan haussa un sourcil, son expression amusée. « Oh ? Et quelle est-elle ? »
Elle inspira profondément. « Je veux que tu sois honnête avec moi. Totalement honnête. Pas de secrets, pas de demi-vérités. Si nous faisons cela, je veux au moins savoir à quoi m'attendre. »
Un sourire en coin étira les lèvres de Nathan. « D'accord. Je te promets d'être honnête. Mais tu devrais savoir que certaines vérités ne sont pas faciles à entendre. »
Clara soutint son regard, refusant de céder à sa provocation. Elle prit le stylo et signa.
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Alors que les documents étaient signés et contresignés par tous les partis, une tension inexplicable s'installa dans la pièce. Clara surprit Antoine en train d'échanger un regard avec Amélia. Rien dans l'attitude d'Amélia ne trahissait une quelconque émotion, mais le comportement d'Antoine était étrange. Il semblait hésiter, comme s'il pesait le pour et le contre d'une conversation qu'il n'osait pas entamer.
« Tout va bien, Antoine ? » demanda Clara, fronçant les sourcils.
Son frère sursauta légèrement, visiblement pris au dépourvu. « Oui, oui, tout va bien. Pourquoi ? »
Elle haussa les épaules, mais quelque chose en elle n'était pas convaincu.
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Lorsque tout le monde quitta la maison, Clara resta dans le salon, seule avec ses pensées. Elle savait que signer ce contrat signifiait tourner une page de sa vie, mais elle ignorait encore où cette nouvelle histoire allait la mener.
Elle revit le regard d'Antoine, si étrange, presque inquiet. Pourquoi réagissait-il ainsi face à Amélia ? Et qu'est-ce que cela signifiait pour tout ce qui allait suivre ?
Les portes massives en fer forgé s'ouvrirent lentement, dévoilant la longue allée bordée de cyprès menant à la demeure de Nathan. Clara, assise à l'arrière de la berline, sentit son estomac se nouer davantage à mesure que la voiture avançait. Le manoir était imposant, presque théâtral, avec ses grandes fenêtres et sa façade en pierre claire. Chaque détail semblait avoir été conçu pour intimider, pour rappeler que le propriétaire des lieux n'était pas un homme ordinaire.
Lorsque le véhicule s'immobilisa, Nathan ouvrit la portière de son côté et sortit sans attendre. Clara prit une profonde inspiration avant de faire de même, ses talons claquant sur le gravier parfaitement lissé.
« Bienvenue dans ce qui sera désormais ta maison, » dit Nathan, un sourire presque moqueur sur les lèvres.
Clara regarda l'entrée principale, les immenses portes en bois sculpté et les colonnes qui soutenaient un balcon. Ce n'était pas une maison, c'était un palais. Elle se sentait minuscule face à tant de grandeur, mais elle n'allait pas laisser Nathan le voir.
« Impressionnant, » dit-elle avec une pointe d'ironie.
Nathan leva un sourcil, mais ne répondit pas. Il se contenta de marcher devant elle, ses chaussures vernies résonnant sur le sol en marbre une fois à l'intérieur.
La première chose qui frappa Clara en entrant, ce fut le silence. Le genre de silence pesant qui règne dans les lieux où la vie quotidienne semble absente. Pas de bruits de pas, pas de conversations à voix basse, juste l'écho de leurs mouvements dans le vaste hall.
« Ta chambre est à l'étage, » dit Nathan en montant les escaliers avec une assurance nonchalante.
Clara le suivit, essayant de ne pas paraître trop impressionnée par les lustres en cristal, les tableaux de maîtres accrochés aux murs, ou les tapis persans qui semblaient plus précieux que sa voiture. Nathan s'arrêta devant une porte au fond du couloir.
« Voilà. C'est ici. »
Il ouvrit la porte, dévoilant une chambre somptueuse avec un lit à baldaquin, des draps en soie et une vue imprenable sur le jardin à la française. Tout respirait le luxe, mais Clara ne put s'empêcher de ressentir une froideur dans cet espace.
« Et toi, tu dors où ? » demanda-t-elle, cherchant à briser le malaise.
Nathan lui lança un regard amusé. « À l'autre bout de la maison. Le contrat stipule clairement que nous n'avons aucune obligation conjugale. »
Clara serra les poings. « Évidemment. »
Nathan haussa les épaules avant de se tourner vers la porte. « Fais comme chez toi. Mais souviens-toi des règles. Pas d'imprévus, pas d'écarts, et surtout... pas de surprises. »
Sans attendre sa réponse, il quitta la pièce, laissant Clara seule.
Après avoir défait ses valises, ou plutôt regardé les domestiques les défaire pour elle, Clara descendit explorer la maison. C'est alors qu'elle tomba sur Mathilde Rivière, assise dans la bibliothèque, un verre de vin à la main.
« Alors, la princesse est déjà perdue dans son château ? » lança Mathilde, sans même lever les yeux de son livre.
Clara, déjà irritée, se redressa. « Non, je prends simplement mes repères. »
Mathilde la regarda enfin, un sourire narquois sur le visage. « Tu devrais en profiter. Ce n'est pas tous les jours qu'une fille comme toi a l'occasion de vivre dans un endroit pareil. »
Clara sentit le rouge lui monter aux joues, mais elle refusa de mordre à l'hameçon. « Une fille comme moi ? » demanda-t-elle calmement.
« Oui, une fille ordinaire. Je veux dire, ce n'est pas comme si tu faisais vraiment partie de ce monde. Mais ne t'inquiète pas, tu apprendras vite. »
Clara planta ses yeux dans ceux de Mathilde, décidée à ne pas se laisser marcher dessus. « Ce monde n'a rien d'impressionnant. Ce sont les gens qui le rendent insupportable. »
Mathilde haussa un sourcil, visiblement surprise par la répartie de Clara. « Intéressant. On verra combien de temps tu tiens. »
Dans la soirée, alors que Clara tentait de lire un livre dans sa chambre, elle entendit des éclats de voix dans le couloir. Curieuse, elle sortit discrètement et aperçut Nathan au téléphone, visiblement agité.
« Non, Julien, ce n'est pas le moment. Ce dossier est trop risqué, tu le sais bien. »
Clara plissa les yeux, essayant de comprendre. Nathan parlait à son frère, Julien, mais de quel dossier s'agissait-il ? Elle fit un pas de plus, mais une latte grinça sous son pied, attirant l'attention de Nathan.
Il tourna brusquement la tête vers elle, ses yeux sombres la fixant avec intensité.
« Tu fais quoi là ? » demanda-t-il, sa voix froide.
Clara se força à sourire. « Rien. Je passais juste. »
Nathan la toisa quelques instants avant de retourner dans son bureau, fermant la porte derrière lui. Clara resta immobile dans le couloir, son esprit tournant à toute vitesse.
Quel était ce dossier ? Et pourquoi semblait-il autant le perturber ?