Je venais tout juste de terminer de m'apprêter suand Emiliano arriva pour me chercher. Je portais une robe noire longue, élégante, avec un décolleté subtil mais audacieux, qui épousait mes courbes avec grâce. Elle me donnait une allure à la fois mystérieuse et sophistiquée. Mon maquillage était léger mais sophistiqué, mes cheveux relevés en un chignon chic avec quelques mèches tombant autour de mon visage. J'attachai mes boucles d'oreilles en diamant, celles que Mathis m'avait offertes il y a des années. Une sorte de revanche, les porter ce soir, alors qu'il serait là, me semblait particulièrement approprié.
Lorsque je descendis l'escalier pour rejoindre Emiliano, il s'est figé un instant en me voyant. Ses yeux, normalement si sereins et calculateurs, ont laissé échapper une étincelle d'admiration. Il ne disait pas grand-chose, mais son sourire en disait long.
- Tu es superbe, Lucia, murmura-t-il en me tendant la main.
Je lui adressai un sourire en coin, prenant soin de ne pas trop laisser transparaître ce sentiment de satisfaction qui naissait en moi. J'aimais me sentir belle, puissante, capable de capturer tous les regards dans une pièce, et ce soir ne serait pas une exception.
Je pris sa main et ensemble, nous avons quitté la maison pour monter dans la voiture qui nous attendait. Le trajet jusqu'au gala fut tranquille, mais je sentais l'excitation monter en moi. L'événement promettait d'être grandiose. Ce genre d'événement n'était jamais seulement mondain. C'était un terrain de jeu stratégique, un endroit où les regards en disaient plus que les mots, où chaque geste avait un sens. Et ce soir, je comptais bien jouer la partie.
Les flashs des photographes nous accueillirent dès notre arrivée, et je sentis immédiatement tous les yeux se tourner vers nous alors que nous traversions la foule. Mais le plus intéressant était de voir l'effet que j'avais sur Mathis, mon ex-mari.
Je l'aperçus dès que nous entrâmes dans la salle. Son regard s'était posé sur moi presque instantanément. Il s'est figé, tout comme Emiliano plus tôt. Ses yeux parcoururent ma silhouette avant de remonter lentement jusqu'à mes yeux. Et même s'il tenta de feindre l'indifférence, je connaissais trop bien ses manières pour ne pas remarquer la légère crispation de sa mâchoire. C'était clair qu'il était furieux de me voir ici. Encore plus au bras d'un autre homme. Un sourire imperceptible naquit sur mes lèvres.
- Ne fais pas attention à lui, murmura Emiliano à mon oreille, sa voix grave me ramenant à la réalité.
Emiliano et moi avancions dans la salle, échangeant des politesses et des sourires avec les invités. Je pouvais sentir les regards, certains admiratifs, d'autres envieux. Chaque mouvement que je faisais semblait attirer l'attention, et je jouais de cela, consciente que mon allure, et le fait d'être au bras d'un homme aussi charismatique qu'Emiliano, ne faisait qu'amplifier l'effet.
A un moment, alors qu'Emiliano était distrait par une conversation avec un membre influent du comité, je sentis une présence derrière moi. Je n'avais même pas besoin de me retourner pour savoir qui c'était. Mathis. Il avait ce même regard perçant que j'avais appris à aimer autrefois, mais qui maintenant ne m'inspirait que prudence. Sa jalousie était palpable, même s'il tentait de la dissimuler derrière un sourire poli.
- Lucia, dit-il d'une voix douce mais tendue, tu es ravissante ce soir.
Je haussai légèrement un sourcil, laissant un silence planer avant de répondre.
- Merci, Mathis. Je vois que tu es toujours aussi galant.
Il ne prit pas la peine de répondre, son regard dérivant rapidement vers Emiliano avant de revenir à moi. Il se rapprocha légèrement, et je sentis son souffle contre ma peau.
- Danse avec moi, demanda-t-il soudainement, d'un ton plus assuré.
Je savais que c'était une mauvaise idée. Mais une part de moi, celle qui aimait tester les limites et jouer avec le feu, accepta sans hésiter. Après tout, c'était une occasion en or de voir jusqu'où il était prêt à aller.
Je glissai ma main dans la sienne, et il m'entraîna sur la piste de danse. La musique était douce, une valse élégante, et Mathis m'entraîna avec la même aisance qu'autrefois. Mais cette danse n'avait rien d'innocent. Il se rapprochait trop, ses doigts se resserrant sur ma taille de manière possessive, comme s'il essayait de rappeler ce qui lui avait autrefois appartenu.
- C'est donc comme ça que tu avances ? Reprit-il, son ton plus bas. Avec lui ? C'est pour lui que tu m'as quitté ?
Je levai les yeux vers lui, jouant l'indifférence.
- Emiliano est un partenaire tout à fait... charmant. Et... utile, dis-je avec un sourire énigmatique. Tu devrais savoir que je ne m'entoure jamais de gens inutiles mon cher.
Je sentis la tension monter en lui, et je sus que je l'avais touché là où ça faisait mal. Mais avant qu'il ne puisse répondre, une main se posa doucement sur le bas de mon dos. Je savais immédiatement qui c'était, avant même de lever les yeux. Emiliano.
Je sentis son corps chaud se rapprocher du mien, son bras fermement ancré autour de ma taille. Il regarda Mathis droit dans les yeux, avec une intensité tranquille mais menaçante. Aucun mot n'était nécessaire pour comprendre le message. Il marquait son territoire, et il n'allait pas reculer.
- Tu permets ? Demanda-t-il poliment, même si sa voix laissait peu de place au refus.
Mathis hésita un instant, mais il finit par lâcher ma main à contrecœur. Je pouvais presque sentir la colère bouillonner en lui. Mais il ne montra rien.
- Profite bien de ta soirée, Lucia, dit-il.
Il recula lentement, avant de tourner les talons, ses épaules raides de frustration. Emiliano se tourna vers moi, un sourire narquois au coin des lèvres.
- Je crois qu'il n'a pas aimé que je te vole à lui, murmura-t-il.
- Peut-être bien, répondis-je, amusée. Mais c'était inévitable.
- Tu t'en es bien sortie, dit Emiliano en me rapprochant un peu plus. Mais fais attention à ne pas oublier tes objectifs.
Nos corps collés l'un à l'autre, nous nous fondîmes dans une danse, plus complices que jamais. Ce soir, Emiliano et moi avions bien plus à accomplir que de simples danses. Nos pions étaient en place et Mathis venait de faire son premier faux pas. Ce jeu ne faisait que commencer.
Mathis Johnson
Je suis arrivé au gala. Ma femme a préféré rester à la maison. Elle était presque à terme, et je savais combien ces événements pouvaient être éprouvants pour elle. Ce gala était censé être une soirée agréable. J'avais toujours aimé ces événements, ce mélange subtil de mondanité et de connexions professionnelles. Et ce soir, tout était parfait. Le décor somptueux, les invités élégants, l'ambiance feutrée... tout était à sa place. Sauf peut-être elle.
Ce soir, tout avait changé dès l'instant où Lucia est entrée. Mon ex-femme, éblouissante comme toujours, était au bras d'Emiliano. Elle n'avait pas changé. Elle portait cette robe noir qui attirait tous les regards, y compris le mien, malgré moi. Une boule de frustration s'est formée dans ma poitrine. Je me sentais à la fois attiré par elle et furieux qu'elle soit là avec cet homme. Il se pavanait à ses côtés, comme s'il avait gagné un trophée... comme si Lucia était sienne.
Je savais que je ne devrais pas, mais je n'ai pas pu m'empêcher d'aller vers elle. L'inviter à danser me semblait être une manière de reprendre le contrôle, de prouver que je n'étais pas affecté par leur histoire. Elle a accepté, naturellement, et pour quelques minutes, c'était comme avant. Nous dansions comme si rien ne s'était passé, comme si elle n'avait jamais quitté ma vie.
Alors que nous valsions, Emiliano est intervenu comme un conquérant, récupérant Lucia d'une manière presque possessive. Comme si elle lui appartenait. Mon cœur s'est serré lorsqu'il m'a regardé avec ce sourire suffisant. Le genre d'un homme qui croit avoir gagné une guerre invisible.
J'ai ressenti un mélange amer de nostalgie et de colère. Lucia... elle ne disait rien, se laissant entraîner comme si tout était normal. Comme si elle était vraiment sienne. Je suis resté là, immobile, à les regarder partir. Cette danse, aussi courte soit-elle, avait ravivé quelque chose en moi que je pensais mort.
Comme si la situation n'était pas déjà assez humiliante, l'un des hommes du gala s'est approché de moi juste après qu'Emiliano ait récupéré Lucia. Un sourire narquois étirait ses lèvres. Je savais avant même qu'il ouvre la bouche que rien de bon n'allait sortir de là.
- Alors, Mathis, dit-il d'un ton faussement amical, presque trop décontracté pour être honnête, je suppose que c'est difficile de voir ce qu'on a perdu.
ses yeux se posèrent ostensiblement sur Lucia qui riait avec Emiliano à l'autre bout de la salle. Puis il ajouta, venimeux :
- Elle t'allait plutôt bien, non ? Dommage qu'elle ait trouvé mieux depuis. Il faut dire que tu avais une perle, Mathis. Dommage que tu n'aies pas su la garder.
Les mots s'enfonçaient comme des lames. Chaque mot ravivait des souvenirs que je m'efforçais d'enterrer. J'ai senti ma gorge se serrer. Mais j'ai maintenu mon calme. J'étais trop fier pour lui donner le spectacle qu'il cherchait. Je voulais répliquer... l'écraser par une réplique cinglante, mais tout ce que j'ai réussi à faire, c'est serrer les poings. Il avait touché un point sensible, et il le savait. J'étais obligé de le regarder s'éloigner, satisfait de son coup.