Emiliano m'avait assuré qu'il était prêt à m'aider à me venger, mais il me restait encore beaucoup de choses à assimiler. Les retrouvailles avec cette ville et les révélations de ces dernières années ne faisaient qu'ajouter à mon tourbillon émotionnel.
Aujourd'hui, Emiliano devait venir me voir pour discuter des derniers développements. J'avais hâte. J'étais assise dans le salon luxueux de mon appartement temporaire, les yeux fixés sur les immenses fenêtres offrant une vue panoramique sur la ville. Les gratte-ciel scintillants semblaient symboliser le chaos que je portais en moi.
La sonnerie de la porte d'entrée me tira de mes pensées. J'allai ouvrir et trouvai Emiliano, toujours aussi élégant, avec ce sourire mystérieux qui dissimulait tant de choses. Il entra sans attendre, comme s'il connaissait déjà le chemin, et se dirigea vers le canapé où il s'assit en me faisant un signe.
- Lucia, dit-il, sa voix grave empreinte d'une chaleur réconfortante. Je suis content de te trouver en meilleure forme. Après notre conversation, j'ai eu peur que tu fasses une bêtise.
Je m'installai en face de lui, essayant de rester calme malgré la tension qui m'habitait.
- La précipitation ne m'aidera pas dans ma lutte. Je suis prête à entendre tout ce que tu as à dire. Raconte moi les choses beaucoup plus en détails. Que s'est-il passé pendant mon absence ?
Emiliano s'appuya en arrière, ses yeux se perdant dans le vide pendant un moment avant de se fixer sur moi.
- Il y a eu tant de choses... des rebondissements inespérés. Je t'ai déjà dit que ton ex-fiancé, Sebastian, était mort en prison. Ce que je ne t'avais pas rapporté c'était comment cela s'est passé. Sa mort fut une tragédie. La rumeur dit qu'il a été impliqué dans une altercation qui a mal tourné, est ce qui avait sorti officiellement. Mais j'ai des contacts. Ils m'ont rapporté une toute autre histoire. Un règlement de compte d'un cartel à qui il devait de l'argent.
Je ressentis un mélange de soulagement et d'indifférence. Sebastian n'avait pas été quelqu'un que je chérissais. Depuis que j'avais appris ce que lui et ma sœur m'ont fait, je l'ai tout bonnement rayé de ma vie. Mais la fin tragique de sa vie semblait presque ironique.
- Et Luciana ?
- Elle purge encore sa peine, oui. La vérité sur sa complicité avec Maëlle m'avait surpris. Pas pour elle. J'ai toujours su qu'elle est la pire des chienne. C'est ta sœur, pardonne moi. Mais c'est ce qu'elle est. Elle reste beaucoup d'années à passer en prison. Bien que...
- Quoi donc ?
- Elle semble prête à coopérer si cela peut alléger sa peine, elle a dit. Il semblerait qu'elle ait des informations sur un cartel que traque le FBI. Ça risque de mal finir pour elle aussi si elle ouvre la bouche.
Emiliano fit une pause, scrutant ma réaction.
- Je suppose qu'on ne parle pas de ton cartel. Tu n'aurais pas été aussi tranquille di tel était le cas.
- Tu penses bien.
- Tu ne m'as jamais raconter comment vous vous êtes rencontrés.
Il sourit, puis se pince les lèvres.
- Tu n'aimerais pas écouter quelques choses de plus important pour ta cause. A propos de ton ex mari par exemple.
Il n'avait nullement envie de discuter. Je l'avais compris. Alors on continua avec la séance de briefing.
- Quant à ton mari, Mathis, il continua posément, il ne sait toujours pas que c'était ta jumelle qui a signé les papiers de votre divorce. Ce qui signifie que vous êtes donc encore légalement mariés.
La révélation me fit frémir. Je n'avais aucune intention de renouer avec lui. Mais l'idée que j'étais encore légalement mariée à lui compliquait les choses.
- Il n'y a aucune raison qu'il le sache, finis-je par dire. Et Maëlle ? Demandai-je finalement, ma voix chargée de colère contenue. Je sais qu'elle est enceinte et que ce n'est même pas le fils de Mat. Tu sais qui pourrait être le père ?
Emiliano hocha la tête.
- Non, ce n'est pas lui le père. Cela a été confirmé par plusieurs de mes sources. C'est probablement la cause de leur mariage précipité, je te l'avais dit. Concernant le père, je n'en ai aucune idée.
- Il a bien un père ce bébé. Maëlle n'est pas tombé enceinte par parthénogenèse.
Je laissai échapper un rire amer.
- Et lui, il ne se doute de rien. Il est tellement naïf. J'ai envie de dire bien fait pour lui et sa mère.
Emiliano se pencha en avant, les mains jointes sur ses genoux.
- C'est exactement pourquoi nous devons agir avec prudence. Tu n'ignores pas que Maëlle est entourée de gardes du corps et a des alliés puissants qui couvrent ses arrières. Nous ne pouvons pas simplement foncer tête baissée sans un plan solide.
Je me levai brusquement, ne pouvant contenir ma frustration.
- Je veux voir Maëlle payer pour tout ce qu'elle m'a fait. Je veux la voir se rendre compte que je suis de retour et que je ne reculerai devant rien pour obtenir justice. Quand j'en aurai fini avec elle, je veux que la seule chose qu'elle retienne, c'est qu'elle aurait dû s'abstenir de s'attaquer à moi. Ses bêtises ont mis mon enfant en danger.
Emiliano se leva également, s'approchant de moi avec une intensité dans ses yeux qui me fit hésiter.
- Calma petite lionne. Je comprends ta colère, vraiment. Mais je veux que tu te souviennes d'une chose. La vérité est de ton côté. Ce qui fait que tu es en position de force. Nous avons le pouvoir d'agir de manière stratégique et efficace. Car, un simple geste mal calculé et l'avantage peut te filer des doigts.
Je me tournai vers lui, le regard déterminé.
- Je n'ai pas l'intention de me lancer dans une guerre à l'aveugle. De faire marche arrière non plus. Néanmoins, j'ai besoin de savoir tout ce que tu sais sur Maëlle. Ses alliés, ses points faibles, tout.
Emiliano me regarda avec une expression de respect mêlé de préoccupation.
- D'accord. Je vais te fournir toutes les informations dont nous disposons. Nous devons élaborer un plan pour la surveiller, comprendre ses mouvements et ses routines. Ensuite, nous pourrons planifier notre prochaine étape.
Le jour suivant, Emiliano et moi, on se retrouve dans son bureau, un espace discret mais raffiné, où nous pourrions discuter en toute sécurité. Il ouvrit son ordinateur portable et commença à me montrer des documents et des photos de Maëlle et de ses activités récentes.
- Voici ce que nous avons jusqu'à présent, expliqua-t-il en faisant défiler les informations. Maëlle et Mathis ont été un bon moment hors du pays. Ils se sont installés en Italie il y a un an. Son mariage s'est déroulé là-bas. Mes gars ont également appris que ses alliés sont des personnages influents dans le monde des affaires, de la politique et du monde obscur.
- Du monde obscur ? Du genre ?
- Trafiquants de... Toi même tu sais. Voilà pourquoi, tu dois prendre le temps de t'armer avant de frapper ton premier coup.
Je scrutai les documents, absorbant chaque détail avec une concentration féroce.
- Quelle devrait être la prochaine étape selon toi ?
Emiliano se frotta le menton en réfléchissant.
- Nous devons d'abord établir une surveillance discrète. Nous allons recruter des personnes de confiance pour nous aider à suivre ses déplacements et infiltrer son quotidien. Ensuite, nous chercherons des opportunités pour la confronter.
Je hochai la tête, les yeux rivés sur les informations.
- Et que fais-je pendant ce temps ?
- Tu restes en sécurité pour ton fils... Pour moi, il ajoute le regard perçant. Et prépares-toi pour les prochaines étapes, finit-il comme si de rien n'était. Nous ne pouvons pas nous permettre de te mettre en danger. Nous devons nous assurer que chaque mouvement est calculé et que nous avons toutes les cartes en main avant d'agir. Tu sais à quel point tu comptes à mes yeux
Je me redressai, le regard déterminé.
- Très bien. Je suis prête. Maëlle paiera pour ce qu'elle a fait, et je ne laisserai rien ni personne m'arrêter.
Emiliano me regarda avec une admiration visible.
- Ta détermination est admirable, Lucia. Je te promets que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour obtenir justice. Mais il est crucial de rester prudent. La vengeance peut être un chemin dangereux. J'en connais un rayon là dessus.
Je lui offris un sourire maigre.
- Je le sais. Mais je suis prête à prendre tous les risques nécessaires pour atteindre mon objectif. Maëlle et ceux qui l'ont aidée devront payer pour leurs actes. Et je serai la main de la justice.
- Ta sœur aussi.
- Ma sœur aussi Emi.
- Et ton mari ?
- Ex mari. Oui, lui aussi.
Je quitte le bureau d'Emiliano, une partie de moi étant encore absorbée par les détails de notre plan de vengeance. Pourtant, en rentrant chez moi, un autre sentiment prit le dessus : l'amour que je ressentais pour mon fils, Juan Camillo. La vie de mère avait été un havre de paix et de réconfort, un refuge précieux au milieu du chaos.
Lorsque je franchis la porte de mon appartement, le bruit du petit Juan Camillo jouant dans le salon m'accueillit. Il avait 2 ans maintenant. Chaque jour passé avec lui était un pur bonheur. Sa voix claire et son rire contagieux avaient toujours été des sources d'énergie et de motivation pour moi.
Je le trouvai en train de jouer avec ses jouets préférés sur le tapis du salon sous la surveillance de sa nounou. En me voyant entrer, ses yeux brillèrent d'excitation et il se précipita vers moi, les bras grands ouverts.
- Ma-man ! S'exclama-t-il en riant.
Je me baissai pour l'attraper et le prendre dans mes bras avant d'autoriser sa nounou à repartir. Il se blottit contre moi avec une confiance totale, ses petits bras entourant mon cou. Ce simple geste m'apportait un réconfort profond et une paix intérieure que rien d'autre ne pouvait égaler.
- Bonsoir, mon amour ! Murmurai-je en lui faisant un câlin. Tu as passé une bonne journée ?
Juan Camillo hocha la tête vigoureusement, ses cheveux bruns ébouriffés se déplaçant avec le mouvement.
- Oui, ma-man ! J'ai joué. Avec blocs !
Il leva une petite main pour me montrer ses jouets éparpillés autour de lui. Je souris en voyant le désordre joyeux qu'il avait créé. Les blocs colorés étaient éparpillés un peu partout, et il était évident qu'il s'était amusé comme un fou.
- On dirait que tu as eu beaucoup de bons moments aujourd'hui.
Je posai Juan Camillo par terre et m'assis à ses côtés, le rejoignant dans son jeu. Il se mit à construire une tour avec les blocs, et je l'aidais, amusée par sa concentration intense.
- Regarde, maman ! S'exclama-t-il en montrant la tour qu'il avait construite. C'est très grand.
- C'est magnifique, dis-je avec enthousiasme. Tu es vraiment doué pour construire des tours mon cœur.
Il éclata de rire, les yeux pétillants de joie. Ses petits doigts s'activèrent pour ajouter un dernier bloc au sommet de la tour, et il se redressa pour admirer son œuvre.
- La plus grande, se vante t-il.
Je ris avec lui, heureuse de partager ces moments simples et précieux.
- Oui, c'est la plus grande tour du monde. Je suis si fière de toi mon bébé.
Nous passâmes un bon moment à jouer ensemble. Comme toujours, Juan Camillo remplissant l'appartement de sa joie et de son énergie. Les soucis de la journée semblaient s'évanouir dans l'air, remplacés par le bonheur pur de passer du temps avec mon fils.
Le soir venu, je préparai le dîner pour nous deux, tout en gardant un œil sur Juan Camillo qui jouait dans le salon. Je préparai ses plats préférés : des purées de légumes et du poulet tendre, tout en chantant doucement une chanson que nous avions l'habitude de chanter ensemble.