Les voies sinueuses du cœur
img img Les voies sinueuses du cœur img Chapitre 5 Un parcours chaotique 3
5
Chapitre 6 Un parcours chaotique 4 img
Chapitre 7 Prendre sa revanche img
Chapitre 8 En cavale img
Chapitre 9 Enfin au cœur de la résidence Denao img
Chapitre 10 Une négligence aux conséquences regrettables img
img
  /  1
img

Chapitre 5 Un parcours chaotique 3

Depuis son enfance, les sentiments qu'éprouvait Senin pour sa mère avaient évolués d'une certaine affection vers un degré incommensurable d'hostilité et d'aversion non dissimulé. Outre les sévices corporels et psychologiques lui ayant été infligés alors qu'il n'était encore qu'un enfant, les raisons qui avaient poussé Senin à s'éloigner de celle qu'il ne considérait plus vraiment comme une mère étaient qu'elle lui avait ôté toute possibilité d'une vie familiale épanouissante.

L'éloignant de celui qui avait voulu être son père, elle ne lui permit en aucune manière de connaître les joies d'une véritable vie de famille avec ses deux parents. Elle l'avait aussi éloigné du reste des membres de la petite communauté de Degouholy. Elle s'attelait chaque jour à lui faire vivre un véritable enfer à la maison et s'était évertuée à ce que cet enfer le suive partout où il irait, réduisant son existence à celle du souffre-douleur préféré du village tout entier. Dire que les autres enfants orphelins ou issus de familles monoparentales vivait bien mieux que lui ça en était rageant.

dans un geste de défis, il reprit sa besogne et, ne quittant toujours pas sa mère des yeux, il lui fit de véhémentes reproches quant à son attitude vis-à-vis d'André:

- C'est toi qui n'arrêtais pas de me dire que cet homme ne méritait pas mon respect, qu'il ne valait rien, qu'il ne fallait pas que je l'écoute et surtout pas que je sois proche de lui. Comme je regrette de t'avoir écouté. Il m'avait accepté, il voulait juste être un père pour moi et toi qu'est-ce que tu as fait ?

- Espèce d'ingrat, j'ai tout fait pour toi. Je t'ai donné la vie, je t'ai nourri, et j'ai...

- Et tu as tout fait et du mieux que tu pouvais pour que je sois l'homme que je suis aujourd'hui, n'est-ce pas? Sois donc juste fier de ton œuvre. Couvrir ton fils d'or et d'argent, accéder à toutes ses caprices et empêcher quiconque et même son propre père de le...

- Il n'est pas ton père !!!

- Ça on le sait déjà, tout Degouholy le sait depuis ma tendre enfance. Il faut dire que tu as tout fais pour. (Rétorqua Senin avant de poursuivre sardonique) Mais tu devrais savoir que s'il ne l'est peut-être pas de sang, il l'est sur le papier. Toi qui te pavanais un peu partout pour faire comprendre à qui voulait l'entendre que tu étais féconde et que s'il y avait un problème ça ne venait certainement pas de toi. Tu sais, les gens n'oublient pas vraiment, ils attendent juste le bon moment. Et au fait, au cas où tu ne le saches pas vu que tu vis depuis des lustres comme une recluse, il s'est longtemps dit de la grande et prestigieuse famille Déhazi qu'après avoir endurer les injures, les vexations et les incessantes humiliations de celle qu'il aimait tant, le sieur André Déhazi, ton cher et tendre époux, non, ex-époux a fini dans les bras d'une autre. Il se dit même maintenant qu'il a engrossé en moins de temps qu'il ne t'en a fallu pour tomber enceinte. La fille lui a même donné des triplés...

- Les gens ne savent pas de quoi il parle et, qui sait si...

- Oh la-la, tu ne vas tout de même pas nous faire la mauvaise langue... Tous les gens de ce maudit patelin savent que la" très jeune et douce" Pauline, eh bien, ton cher André, il l'a connu alors qu'elle gardait sa pureté encore intacte pour le futur homme de sa vie. Il a été le seul homme qu'elle ait jamais connu, le seul et l'unique à l'avoir possédé jusqu'à aujourd'hui contrairement à toi, l'espèce de trainée qui est allée faire la prostitué on ne sait où pendant des semaines pour revenir dans son propre foyer souillée et portant la grossesse d'un parfait inconnu...

Excédée par le flot d'injures que lui déversait son fils en pleine face, Alice à cours d'arguments, se précipita vers Senin pour lui arracher ses affaires des mains. Ni ses plaintes et ni ses lamentations n'avaient réussi à adoucir le cœur et le comportement de Senin. Pendant des années durant, elle avait eu à faire face à ses excès de colère et à ses insultes qui, ce jour-là avaient dépassé la limite du supportable. Elle aurait bien voulu lui donner une bonne raclée mais elle s'en abstint consciente qu'elle ne pouvait plus le battre pour le faire plier comme quand il était encore un enfant. Avec l'âge, il était devenu un jeune homme robuste dont la force surpassait largement la sienne et, si elle faisait mine d'essayer de le frapper, il la rouerait de coups sans pitié. En agrippant le sac, elle lui dit sans ménagement:

- Papier ou pas, puisque tu sais que tu n'es pas son fils, tu es alors bien conscient que tout ce qui se trouve ici ne t'appartient absolument pas. Remets moi donc mes affaires.

Senin de son côté agrippa avec plus de force le sac entre ses mains. À ce moment critique, mère et fils s'engagèrent dans une lutte dont le but suprême à atteindre consistait à se rendre propriétaire du précieux sac pour montrer sa détermination à l'adversaire en face. Dans la lutte effrénée qui les opposait, mère et fils se lancèrent à tour de rôle des invectives, rivalisant d'avantage de cynisme et de cruauté. Rien n'avait plus d'importance à ce moment là que l'expression dévastatrice pour l'autre de la rancœur, et du dégout profond qu'ils éprouvaient l'un envers l'autre.

- Qu'ai-je fais pour mettre au monde un tel monstre ???

- Parce que tu penses que moi j'aurais souhaité naître dans cette famille avoir une telle femme pour mère ???

- Je maudis le jour où j'ai voulu avoir un enfant coûte que coûte, je maudis le jour tu as été conçu en mon sein, le jour où je t'ai donné la vie. Je me serai épargné autant de misère si tu étais mort-né.

- il est trop tard pour regretter ma chère mère !!! De quoi tu te plains d'ailleurs? Un montre comme toi ne pouvait produire qu'un tel fils n'est-ce pas ?

- Enfant de malheur !!!

- Conçu à la juste mesure de la femme perfide et sans vergogne que tu es!!!

- Qu'ai-je fais pour mériter tout ça ??? Oh Seigneur je n'en peux plus, je n'en veux plus. Viens donc le reprendre!!!

- Tu peux prier, supplier autant que tu veux mais tu mourras bien avant moi vieille sorcière.

Ballottée de droite à gauche dans la lutte avec son fils, Alice s'épuisa rapidement, l'emprise qu'elle avait sur le sac faiblissant de seconde en seconde. Senin en profita pour le lui arracha des mains et, dans une rage folle, s'en servit pour lui asséner un grand coup à la tête. Il le fit de toutes ses forces souhaitant au plus profond de son cœur être débarrassée pour de bon de cette maudite femme. Alice ne put malheureusement pas éviter le coup porté par son fils. La force de celui-ci l'envoya valser dans le coin de la chambre où elle se cogna violemment la tête contre la coiffeuse qui s'y trouvait. Elle s'effondra dans un gémissement sourd sur le sol. Senin pensa avoir réussi son coup, qu'il avait envoyé la femme qui gisait alors sur le sol tout droit en enfer, là où était sa place. Cependant, contre toute attente, elle respirait toujours, la damnée arrivait encore même à bouger au grand mécontentement de Senin qui, gardant toujours ce rictus de dégout depuis le début de la lutte avec sa mère, crachât dans sa direction avant de sortir de la chambre à grandes enjambées sans se retourner.

Alice essaya de se relever, sans succès, hurlant du peu force qui lui restait le prénom de son fils et une multitude de malédiction à son encontre. Sa voix s'estompait alors qu'elle perdait peu à peu connaissance. En proie à la solitude et au désespoir auxquels sa vie avait été réduite depuis le départ de son mari de leur domicile conjugal, elle se mit à éprouver un certain regret pour les décisions qu'elle avait prise les années précédentes. Elle en arriva à penser que Senin aurait peut-être pu être leur fils à elle et André si elle l'avait permis dès le départ, que, si elle avait accepté qu'André joue ce rôle, peut-être que les choses aurait pu être différentes. Mais, fidèle à elle même, elle se dit par la suite qu'il n'était pas nécessaire de se voiler la face. Ce garçon était un être foncièrement mauvais, quel que soit ce qu'elle aurait pu faire pour lui, d'une manière ou d'une autre, il aurait trouvé une raison de ruiner sa vie entière comme il avait réussi à le faire. Et André, ce n'était pas un homme sur lequel elle pouvait véritablement compter. Elle avait eu à essuyer tellement d'affronts, tellement d'injures, tellement d'humiliations. Et lui, qu'avait-il fait tout ce temps ?, il restait juste impassible. Ça l'arrangeait bien de garder son calme, de lui répéter sans cesse que tout viendrait au moment opportun, qu'il fallait juste faire preuve de patience. Il était un homme et ne souffrait pas autant qu'elle de tous les surnoms possibles qu'on affublait, les uns plus affreux que les autres pour lui faire garder en mémoire son incapacité de concevoir. Que pouvait-elle faire d'autre face à l'inaction de celui qui partageait sa vie. Comment pouvait-elle savoir que tous deux n'avaient aucun problème de fertilité ? Si seulement elle avait été plus forte face à la pression, si elle avait été patiente, elle aurait été la véritable mère des enfants de son mari. Face aux railleries, elle avait fini par perdre patience et fait ce qu'elle pensait être nécessaire pour concevoir. Et en faisant ça, elle avait réussi à atteindre ses objectifs mais le mauvais œil avait fait son œuvre et détruit tout ce pour quoi elle s'était battu sa vie entière. Lorsqu'elle découvrit que son époux s'était construit une autre famille où il passait le plus claire de son temps, qu'il avait même mis enceinte une femme plus jeune qu'elle qui lui avait même donné des enfants, elle voulait tout arranger mais il était trop tard. Toutes ses excuses laissaient André de marbre, et son insistance auprès de ce dernier de concevoir leur propre enfant n'y changea rien.

Alors que ses forces l'abandonnaient, sombrant des ses réflexions, Alice en vint à imaginer ce qu'aurait pu être sa vie si elle n'avait pas mis Senin au monde. L'espoir de revoir son foyer aussi uni et heureux qu'il l'était avant cette obsession grotesque d'avoir un enfant s'était envolé avec l'existence cet être infernal.

- Ce démon... il aura tout gâché... ma vie... mon foyer... mes espoirs... Il m'aura tout pris... Tout... Oooh André... comme je regrette....(Hoqueta Alice avant de s'enfoncer définitivement dans un coma profond, seule, étendue sur le sol dans la trainée de sang continuait de se rependre autour d'elle)

                         

COPYRIGHT(©) 2022