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Chapitre 1 Chapitre 01 HAINE

"Certaines personnes sentent la pluie, d'autres sont juste mouillées."

- Bob Dylan

°°°

Il pleut à verse.

Debout devant la baie vitrée, elle regarde l'eau glisser en rigoles contre le verre.

Les lumières de la ville percent difficilement l'obscurité. Leur éclat est comme atténué par l'averse.

Dans quelques minutes, elle se retrouvera trempée jusqu'aux os.

Elle s'autorise quelques minutes supplémentaires, afin de rester au sec plus longtemps. Chose qu'elle ne fait jamais.

Le début de ce mois de juillet a pourtant été parfaitement sec et ensoleillé! Mais depuis ce matin, c'est comme si le ciel avait décidé de se vider entièrement.

Elle a toujours aimé la pluie. Parfois, elle apprécie simplement d'entendre le son de plusieurs milliers de gouttelettes d'eau s'écrasant contre le sol, lorsqu'elle laisse la fenêtre de sa chambre ouverte.

Cette pluie inattendue et diluvienne est énervante, pour le coup. Rien à avoir avec la plénitude qu'elle lui apporte habituellement .

Avec un soupire de résignation, elle se tourne pour inspecter la pièce dans laquelle elle se trouve. Elle n'a pas eu temps de le faire lorsqu'ils sont arrivés. L'endroit a un beau volume. Elle a été décorée avec goût, et ornée de meubles d'inspiration orientales.

De l'opulence. Le luxe.

"Un cadre magnifique pour une séance photo", ne pu-t-elle s'empêcher de penser.

Ses yeux glissent sur les tableaux accrochés aux murs, les vases chinoises, les lampes au design futuriste, et enfin, le lit qui trône au milieu de la chambre. Il est exagérément imposant, et pourrait facilement permettre à six personnes d'y dormir confortablement.

A lui tout seul, il fait presque la taille de sa chambre.

Un homme y est couché, complètement nu.

Elle sait qu'il est marié à une riche héritière, père de trois enfants et qu'il travaille pour l'une des plus grandes banques de l'Etat.

Cet homme a tout pour être qualifié d'homme ayant brillamment réussi sa vie. Ca en fait du chemin, de passer des quartiers pauvres de cette ville, à des hôtels cinq étoiles!

Allongé comme il l'est, on aurait du mal à croire que ce n'est plus qu'un cadavre. Son cœur a cessé de battre il y a très exactement une heure, quatre minutes et trente-huit secondes.

En temps normal, elle se contente de rassembler les informations importantes sur ses... clients. Mais pour celui-ci, elle est allée beaucoup plus loin.

Avec sa femme, l'homme vivait dans les hauteurs de la ville, dans un quartier résidentiel prestigieux. Où ils élevaient leurs trois enfants âgés respectivement de quinze, treize et six ans.

En dehors du travail, il était aussi très actif socialement. Ce qui faisait de lui un homme très respecté à défaut d'être aimé par son entourage. Ceux qu'il fréquentait, ne savaient de lui que ce qu'il a bien voulu leur dire. C'est-à-dire qu'il venait de loin.

Oh, il n'avait pas honte de parler de la pauvreté crasse dans laquelle il avait vu le jour! Et comment à la seule force de sa volonté et de son ambition, il a réussi à intégrer l'élite. C'était même l'image de sa réussite.

Pour le reste, il s'était arrangé pour avoir à nouveau un casier vierge, passant sous silence ses nombreuses démêlées avec la justice dès l'âge de douze ans: du vol à l'étalage jusqu'au meurtre sans préméditation. Un passé qui n'aurait pas manqué de faire scandale, dans le monde bien rangé de la haute bourgeoisie.

Parmi ses faiblesses il y en avait une que malgré son statut social, l'homme n'a pu se débarrasser: payer des prostituées pour ensuite se livrer à des jeux de dominations avec elles.

Sa propre mère en était une et c'est pour cette raison qu'il n'a jamais connu son père. Elle est morte d'une overdose d'héroïne.

A l'âge de sept ans, il s'est retrouvé balancé d'une famille d'accueil à une autre. Qu'il se défoule sur des prostituées n'étaient pas le raison pour laquelle on avait fait appel à elle.

On avait demandé ses services parce que depuis quelque temps l'homme allait tellement loin, que trois prostituées en étaient mortes. Parmi lesquelles Kana, la fille unique d'un magnat de l'information japonais.

La jeune femme était devenue prostituée, après avoir fugué. Cela faisait un plus de six mois que l'homme payait ses services. Mais il y a deux mois, il n'a pas su maîtriser sa rage et l'a tué.

Le petit-ami de Kana a été immédiatement soupçonné: il est à ce moment-même en prison, attendant d'être jugé pour homicide volontaire. A défaut de la peine de mort, il risque la prison à perpétuité pour un crime qu'il n'a pas commis.

Étant fille unique, le père de Kana a tout fait pour mener l'enquête par ses propres moyens et y a investi une véritable fortune!

Grâce à son acharnement, il a retrouve le vrai coupable de la mort de sa fille. Et il a décidé de rendre justice par ses propres moyens.

Voilà pourquoi elle se trouve dans cette chambre d'hôtel.

Connaître la vie de ses cibles n'a jamais une nécessité. Savoir comment ils ont grandi, quel genre de personne ils étaient... est une entreprise aussi inutile que superflu. Mais pour cet homme, elle a décidé de faire exception.

Parce qu'il est le dernier.

" C'est difficile de comprendre la haine, quand on ne l'a pas connu. Ou lorsque l'on a oublié la brûlure de la violence, la rage, qui lève le bras sur un ennemi..."

- Mathias Enard

°°°

Le rendez-vous a été fixé dans l'un de ces nouveaux bars du centre ville, qui cherchaient à se démarquer en surfant sur la vague de l'écologique et du commerce équitable.

Un bar, comme la ville en compte par centaines. Mais qui a assez bonne réputation pour ne jamais désemplir.

Elikia l'avait repairé au bout d'une poignée de secondes: à l'écart des autres clients, l'air ailleurs. D'un pas décidé elle s'est avancée vers son rendez-vous, tout en veillant à garder un visage le plus neutre possible.

De son avis, rencontrer un client était prendre des risques inutiles. En aucun cas, elle n'appréciait de rencontrer des personnes qui la payaient pour tuer en leur nom.

Alice n'a pas eu à insister: c'était un ordre. Un ordre que la jeune femme ne pouvait discuter.

Bien évidemment, Alice y avait mis les formes:

" Je comprends tout à fait que tu ne veuilles pas te rendre à ce rendez-vous. Nos clients ne demandent jamais à rencontrer un exécutant, mais Monsieur Fujimi a beaucoup insisté. Il a même triplé la somme qui était convenue! La qualité de notre service est aussi importante que notre clientèle. Nous nous devons donc de satisfaire la moindre de leurs demandes. Pourvu qu'ils y mettent le prix".

Alice avait usé de ce ton pincé qui énervait tant Elikia, mais signifiant qu'elle ne tolérerait aucune protestation.

Voilà comment Elikia se retrouvait embarquée dans cette histoire: à devoir passer une heure en compagnie de Satô Fujimi, le père de Kana.

L'homme n'avait levé les yeux que lorsqu'elle s'est arrêtée à quelques pas de son siège.

- Monsieur Fujimi?

- Vous devez être Eli, dit-il en se levant pour lui serrer la main.

Il était un homme d'assez petite taille, portant un costume sombre de facture.

Ses cheveux peignés à l'arrière exposaient un visage aux traits durs, dont l'éclat froid de ses yeux rendaient difficile à regarder. C'était un homme implacable. Cependant en regardant plus attentivement ses yeux, Elikia qui était rôdé à l'exercice, su déceler la tristesse qui rongeait l'homme.

Une tristesse où se mêlait une haine féroce.

- C'est exact.

- Vous avez l'air bien plus jeune, que l'idée que je m'étais faite après vous avoir parler au téléphone, dit-il après une courte pause.

Elikia garda son air impassible:

- Cela vous dérange?

- Non. Cela me fait penser que vous devez avoir à peu près le même âge que ma Kana.

Que répondre à cela? Elle savait que la distance émotionnelle, était de mise. Ne jamais se montrer touché par les événements. Ne jamais faire de transferts.

Jamais!

Elle se contenta d'hocher la tête.

- Vous voulez boire quelque chose? lui a demandé Satô Fujimi en l'invitant à prendre place en face de lui.

Elikia ne voulait rien boire. Mais une fois de plus, Alice s'était assurée que sa protégée n'allait pas faire faux bon au client.

Elle lui avait dit de "se détendre et laisser les choses se passer sans encombre".

De toute manière, Elikia savait que plusieurs agents avaient "sécurisé" l'endroit au préalable. Voir même tout l'immeuble! Alice n'était pas le genre de femme à laisser quoi que ce soit au hasard. Surtout pas la sécurité de sa fille.

- Un thé glacé, je vous prie, décida-t-elle en promenant son regard dans la salle.

- Très bien, dit Satô Fujimi tout en faisant signe au serveur de prendre les commandes.

La salle était baignée de lumière.

Lumière qui pénétrait par les grandes vitres donnant sur la rue, mais aussi le plafond qui était constitué de miroirs.

De telle sorte que la pièce paraissait plus grande qu'elle ne l'était.

La décorations était assez hétéroclite, tout en réussissant à mêler les vases et lampes en chrome, aux tables basses en verre et les fauteuils en cuir.

Un morceau de Jazz diffusait par des hauts parleurs disséminés dans la salle. Le tout, dans un brouhaha de conversations et de rires. Une ambiance qu'Elikia aurait pu apprécier, si elle avait voulu être là.

La jeune femme savait qu'en sortant de l'immeuble, puis en bifurquant vers la gauche, la voiture d'Alice l'attendrait là. Impossible de tenter la fuite.

- Si j'ai demandé à vous rencontrer, entama l'homme d'affaires une fois qu'ils eurent leurs boissons, c'est parce que je voulais voir. Voir la personne qui se chargera de tuer l'homme qui m'a prit ma fille.

Sa voix était dure.

Alourdie par sa haine et sa douleur. Ce qui faisait ressortir son accent. Lorsqu'il avait pris son verre de whisky, Elikia eu le temps de remarquer que sa main tremblait.

Il avait du mal à maîtriser la violence qui l'envahissait en parlant de la mort de son enfant.

Elikia savait que la haine conduisait certains à commettre des actes odieux. D'ailleurs, n'est ce pas parce qu'il arrivait pas à maîtriser sa haine des femmes, que cet homme avait tué Kana? En retour, il allait se faire tuer par un père que la douleur a rendu dangereux.

Une histoire de douleur et de haine.

Une histoire dont Elikia connaissait la trame et les variations, car elle contribuait à la tisser.

- Quel âge avez-vous?

- Trente ans, a-t-elle menti.

- Je vous pensais plus jeune! Kana aurait fêté ses vingt-cinq ans en novembre... je n'ai jamais été un père présent pour elle. Mon épouse est morte quand elle n'avait que quatre ans. J'ai dû l'élever seul.

Chaque jour qui passait, elle ressemblait un peu plus à sa mère. Je ne pouvais pas regarder le visage de Kana sans penser à Shizune, ma femme. Je n'arrivais pas à dépasser le chagrin d'avoir perdu mon épouse bien-aimée. Alors je me suis mise à travailler de plus en plus, la confiant aux bons soins de précepteurs et de nourrisses que je n'hésitais pas à faire venir de très loin.

J'ai essayé de combler mon absence en lui donnant tout ce qu'elle voulait: j'essayais d'acheter son amour et son pardon à coup de cadeaux coûteux. Apparemment, ce n'était pas la bonne solution, dit-il avec un sourire triste.

Elikia ne s'attendait pas à ce qu'il lui parle de sa vie de la sorte. Encore moins de l'état de sa relation avec sa fille. Elle pensait que Fujimi Satô demanderait à savoir comment elle comptait s'y prendre. Et même lui faire des suggestions.

Jamais elle s'était encore livrée à ce genre d'exercice. Ecouter cet homme acculé par la souffrance, lui parler des souvenirs qu'il gardait de l'enfance de sa fille, était un moindre mal.

Car Elikia ne voulait pas parler, de la manière dont elle exécuterait sa cible: Fujimi Satô aurait été étonné d'apprendre à quel point était facile de tuer une personne. Surtout quand on sait comment s'y prendre. Et ce, sans laisser aucune trace.

Il s'écoule des années, de la conception d'un individu jusqu'à l'âge adulte. Alors que la mort elle, peut survenir en un instant.

Satô Fujimi la scruta alors un long moment. Cela aurait pu gêner Elikia, mais elle lui rendit son regard sans ciller. L'homme s'attendait sûrement à lire dans son regard de la compassion, ou quelque chose qui s'y rapprochait. Mais cela n'arriva pas.

Jamais Elikia ne laissait ses sentiments remonter à la surface: des années d'entraînement lui permettent de les garder sous contrôle.

Le voile de tristesse assombrit le regard de l'homme, lorsqu'il parla à nouveau:

- Il y a sept ans, nos échanges sont devenus mouvementés. Kana venait d'obtenir son diplôme de fin d'études secondaires. Elle devait choisir ce qu'elle fera pour le reste de sa vie.

Machinalement, il avait sortit un paquet de cigarette de sa poche, ainsi qu'un briquet qu'il posa sur la table. Le bar n'interdisait pas de fumer. Cependant, il lui demanda l'autorisation:

- Je peux?

- Bien sûr.

- J'ai arrêté à la naissance de Kana. J'avais promis à sa mère de me sevrer: ainsi je vivrais plus longtemps pour notre fille, dit-il avec un petit rire. Mais comme je le retrouve seul à nouveau... en voulez-vous?

- Je ne fume pas.

Satô Fujimi voulu allumer sa cigarette. Or ses mains tremblaient tant, qu'il n'arrivait même pas à tenir le briquet. Sans un mot, Elikia lui prit le briquet des mains et l'alluma pour lui.

Le briquet en or, était décoré d'une cape Koï et d'un dragon japonais. Symboles d'amour et de virilité pour le premier, de puissance pour le second.

- C'est un cadeau de Kana, dit-il en reprenant le briquet. Le dernier qu'elle m'ait fait. Elle avait dix-sept ans à l'époque, et c'était juste après notre retour d'un voyage au Tibet. Elle a choisi ce cadeau, parce qu'elle savait qu'il m'arrivait de fumer une ou deux cigarettes en cachette.

- C'est un beau cadeau.

- Merci. Voyez-vous, à chaque fois que j'utilise ce briquet, je revois le visage de Kana. Et je ne veux pas que le temps se charge à me le faire oublier. Je veux pouvoir me souvenir de chaque détail de son visage jusqu'à la fin de mes jours. De chacune de ses expressions. Du son de son rire lorsque enfant, elle regardait son dessin animé préféré... Elle avait un tempérament de feu, tout comme sa mère! Et je ne l'ai jamais accepté. Je voulais qu'elle fasse des études, qui lui permettraient de prendre ma place à la tête de l'entreprise que j'ai bâti. Kana ne voulait pas en entendre parler: elle voulait devenir journaliste. Après une énième dispute, elle est partie. Je n'ai pas su la retenir, trop fier, trop sûr d'être celui qui avait raison. Comme je me trompais!

Il bu le reste de son verre à son moment là, et fit signe au serveur de lui en apporter un autre.

- La dernière fois que j'ai revu ma petite fille, c'était lorsque l'on m'a demandé d'identifier à la morgue. J'ai eu un mal fou à le faire: elle était méconnaissable! Complètement défigurée! Jamais un parent ne devrait avoir à vivre ça! Jamais un parent ne devrait avoir à enterrer son enfant... car la douleur que l'on éprouve alors est indescriptible!

Ses yeux brillaient de larmes.

- Je veux que ce chien paie pour ce qu'il a fait à ma fille, dit-il d'une voix glaciale. Je veux le savoir mort! Il ne peut pas continuer à arpenter ce monde, alors que mon bébé est sous terre.

Elikia n'avait rien dit. Elle ne pouvait pas lui promettre de torturer l'assassin de sa fille pour venger la mort de cette dernière. Cela ne redonnerait pas vie à Kana Fujimi. Cela ne soulagerait pas non plus la peine du père.

Et le plus important: Elikia n'était pas là pour s'ériger en juge ou en bourreau de torture. Elle était simplement une exécutante. Désignée pour abattre une cible.

- Je sais que ce que je m'apprête à faire par votre billet ne me rendra pas ma fille. Ma seule consolation est que cet homme ne recommencera pas avec d'autres. Alors merci pour ce que vous vous apprêtez à faire, dit-il en se levant.

Satô Fujimi s'inclina respectueusement devant Elikia, qui eut du mal à cacher son étonnement devant le profond respect que lui témoignait cet homme.

Sans pour autant parler, il lui a en quelque sorte demandé de rétablir l'ordre des choses. Une vie, pour une autre. Répondre au mal qui a été fait. La réparation: la mise en oeuvre d'une justice faite par soi. Celle qui pousse de traiter le mal par le mal.

Elikia suivit du regard Fujimi Satô, tandis qu'il gagnait la sortie escorté par ses gardes du corps.

La jeune femme resta exactement dix minutes dans le bar, avant de sortir à son tour. Laissant sur la table sa boisson qu'elle avait pris soin de ne pas toucher.

***

Elikia se sort de ses pensées. Il lui arrivait de plus en plus de penser à Satô Fujimi et à leur rencontre. Comment réagirait-il lorsqu'elle l'appellerait pour lui dire que le travail avait été fait? Serait-il soulagé? Éclaterait-il de rire ou de sanglots?

Il est 22h30.

Elikia est dans la chambre d'hôtel depuis deux heures et demi. Il est temps de partir.

De ses mains gantées, elle vérifie une dernière fois que la chambre est "propre". La mort de cet homme devra ressembler à un accident: une crise cardiaque. Le temps que le corps ne soit découvert le poison qu'elle lui a injecté, aura changer sa conformation ce qui le rendra indétectable.

Satisfaite du résultat, elle prend son sac et quitte la suite.

Parce que la clientèle de l'hôtel compte des hommes politiques, des stars de cinéma et même des parrains de la pègre locale, les couloirs qui mènent aux différents chambres ne sont pas équipés de caméras. Cela permettent une très grande discrétion: ce qui est très appréciée par ces personnes. De plus, il existe une sortie de service pour ceux qui ne souhaitent pas être vus. Elikia laisse tomber son sac juste au moment où elle croise une femme de ménage.

- Oh, je suis désolée, dit-elle en s'agenouillant pour ramasser le martinet ainsi que les menottes qui sont sortis du sac.

Elle lance un regard désolé à la femme. Cette dernière ne se donne même pas la peine de cacher son dédains.

- J'ai eu une soirée un peu chargée, dit-elle avec un sourire embarrassé. Pouvez-vous me conduire à la porte empruntée, s'il vous plaît?

La porte empruntée, désignait cette autre sortie qui donnait sur l'arrière de l'immeuble. Tous le personnel de l'hôtel connaissait la conduite à tenir lorsqu'un client la sollicitait: n'avoir rien vu, n'avoir rien entendu. N'importe quoi pourrait se passer entre ces murs, qu'ils devaient rester muets comme des tombes.

- Suivez-moi mademoiselle.

Sans plus se formaliser du ton de la femme, Elikia lui emboîte le pas. Elle sait que concentrée à la mépriser en la prenant pour une prostituée, la femme de ménage ne risquerait pas de faire attention aux détails.

            
            

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