Chapitre 2 Un deuil difficile

Il ne pleuvait pas ce jour-là , qu'aurais-je aimé qu'il pleuve , je ne pouvais supporter d'entendre le bruit que mon âme faisait , il tapait contre les parois de mon corps , s'entrechoquait aux mots que ma bouche retenait , à mes larmes j'ai su ...

Fugitive Des souvenirs fatals-Pour un deuil

Je n'avais revu ma mère que quelques années plus tard. Elle vivait à la capitale où elle s'était fait un nom avec son mari, Arnold Palmer , un politicien et ses deux enfants Ginette et Bany .

J'étais le secret qui ne pouvait être caché plus longtemps .

Bien que je ne sois jamais aller vivre chez eux , elle avait dû être mise au courant de la trépidante vie de sa fille car Monsieur Marcel , alors qu'il sortait d'un séminaire un soir de mai, trouva la mort quand sa voiture fit un dérapage et fini en bas de la falaise sur la route menant à Jérémie .

Quand l'hôpital avait appelé chez nous ce soir-là , assise devant la télé regardant une comédie romantique , souriante j'étais loin de me douter que la vie me prendrait la première personne qui comptait pour moi et était mon repère . Il n'y avait pas moyen que j'oublie le visage de mon père , comme certaine personne le craignait quand il perdait un proche . Avec mon hypermnésie monsieur Marcel était bien gardé dans ma mémoire , de sa voix grave qui lorsqu'il fumait trop devenait sensible et résonnait comme des cordes fragiles de guitare, à son visage aux joues très rondes , à son nez retroussé et à sa tendresse dès qu'il me disait des mots doux pour me rassurer , Monsieur Marcel était un homme grand et mince avec une chevelure noire épaisse ni trop court ni trop long sur la tête , toujours habillé avec classe , même un jour de repos . Mon père ce héros , mon héros , n'aurait pu s'écailler de ma mémoire.

Les semaines qui suivirent sa mort, devenue l'ombre de la fille pétillante et pleine d'entrain que j'étais , je ne pouvais plus rien faire à part rester roulée en boule dans mon lit et pleurer. J'ai tant pleuré que je n'avais plus de larmes , plus d'eau , pourtant mon âme ne se retenait pas , tourmentée même dans mon sommeil .

Je rêvais de cette période paisible où nous passions nos journées dans les champs de notre ville , à courir après notre bonheur , à se cacher . Et si j'aurais voulu que mes larmes puissent continuer à parler pour moi , il ne me restait plus rien si ce n'était qu'un sentiment de vide , que rien ne combla.

Le jour de l'enterrement , bon nombre de ses amis venus de loin me témoignèrent leur soutien , j'aurais aimé être loin , remonter le temps , l'empêcher de partir en voyage , pourtant la tête droite , les yeux secs , je n'avais pas dit un mot , coupé du monde , je me répétais que ce n'était qu'un rêve , un de ces mauvais rêves qui laisse pantois au réveil . J'aurais tant aimé que ce soit le cas. Il ne pleuvait pas ce jour-là , qu'aurais-je aimé qu'il pleuve , je ne pouvais supporter d'entendre le bruit que mon âme faisait .Il tapait contre les parois de mon corps , s'entrechoquait aux mots que ma bouche retenait , aux cris des autres , à la voix de ma tante et au regard attristé de ma meilleure amie , j'ai su ...

Que la vie pour moi serait un long fleuve !

Ayant perdu mon père , la sœur de mon père Moreta me pris sous son aile.

Ce n'était pas mon chez moi mais elle faisait du mieux qu'elle pouvait pour me donner le peu d'affection dont elle disposait. Je suis rentrée dans un bon collège à la capitale , et pour tuer mon chagrin et tout ce qui ne pouvait plus être dit , je me tuais à être parmi les meilleures de ma classe .

C'est à cette période de ma vie que j'ai rencontré Mana , une fille un peu perdue sur les bords , qui était très gentille . Mana , de son vrai nom Nahama Leroux , était une élève moyenne , qui vivait avec sa mère malade , son père étant mort à la guerre . Elle avait ce regard pétillant de vitalité , d'espoir et d'un grain de folie. Pour elle tout était un signe de mystère qu'on ne savait tout simplement pas comprendre .

Sa vision de la vie un peu bizarre , m'a pourtant aidé à ne pas tomber toutes les fois où je tanguais sur le fil de la vie. Et si on me demande qu'elle a été ma plus belle réussite , je dirais le fait que j'ai pu vivre avec mon père non pas à mes côtés , mais dans mon cœur .

–Agent Picard , réveillez vous !

Une main me secoua violemment, me tirant de mes souvenirs .Michel , un de mes collègues m'observait , alors que je penais à suivre ce qu'il me disait à cause du bourdonnement qui teintait mes oreilles. Ils étaient là , et c'était tout ce que je retenais , leur indiquant où j'avais placé les micros , je m'écroulais sous la fatigue causée par la remontée de mes souvenirs.

–Je ne peux même plus te laisser cinq petites minutes toute seule , me lança Fatima en entrant dans la pièce .

Assise face au bureau de mon supérieur , l'agent Harvey Nicolson, je faisais mon rapport sur notre intervention .

–Fatima London Nicolson , que nous vaut cet honneur ?

– Mon cher Harvey , je passais tout près et je me suis dit pourquoi ne pas venir faire un petit coucou à mon Harvey , et puis me voilà , trouvant ainsi notre belle cigale encore un fois amoché . Faudrait vraiment que tu penses à lui donner un travail de bureau .

–C'est une des meilleures agents de mon service , qui plus est avec une licence en psychologie . Alors là non merci .

Elle me fait un clin d'œil , et s'empresse d'aller embrasser son mari . Fatima mon amie , était de la même promotion de police de Jacmel , et une agente de terrain exceptionnel mais aussi la femme de mon bosse .

–Sérieusement Maëch , tu dois faire attention à toi, tu prends tellement de mauvais coups ces temps-ci que je me demande si tout va bien .

Je lui fais un sourire et la rassure en lui disant que mes tests avec la psychologue du service attestait du fait que je pouvais aller sur le terrain et que je n'étais pas un danger pour mes coéquipiers.

De ce fait , j'avais raison , autant que je pouvais jouer avec le mental des autres, autant je testais mes propres limites .

Ayant fini mon rapport , je me fais mettre à la porte par mon bosse , sa femme étant présente, je pense que des choses se passeront dans ce bureau. Je claque mes joues et lâche un petit rire .

–On se retrouve ce soir pour un chocolat chaud, leur dis-je avant de fermer la porte .

                         

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