- Bien. Sania comment ça va ?
- Très bien. Ce n'est qu'une égratignure. Je n'ai pas été assez prudente, ça ne se reproduira pas.
- Parfait. Nous devons donc faire un point sur ce qu'il s'est passé.
- Pour être honnête, je n'ai rien compris. Quand vous nous avez dit de nous tenir prêt, je ne pensais pas à ça.
- Nous non plus. Il s'agissait d'une simple mission de contrôle de routine. Mais il semble que c'était en fait un piège. Cependant, il y a un point qui nous préoccupe plus...
Le silence s'impose tandis que tous se jettent des regards gênés. Ian se décide enfin à parler.
- Malec, que s'est-il passé ?
- Comment ça ?
- Tu as utilisé un pouvoir, Malec. Que tu t'en soit rendu compte ou pas, c'est un fait.
Les deux jeunes restent figés sur place. C'est impossible...
- Tu dois te tromper Bromir. Je n'ai pas fait ça. Tu sais bien que les pouvoirs se sont éteints il y a des siècles.
- Je le sais très bien... Les enfants, savez-vous pourquoi nous existons ?
- Eh bien oui, pour détruire les démons.
- Tout à fait Sania, mais sais-tu pourquoi tout ça ?
Ils restent muets, attendant de voir ce qu'ils entendent par là.
- Bon, je vais vous expliquer. Comme vous le savez, au fil du temps les croyances ont évolué.
Les gens ont délaissé les dieux multiples pour embrasser une religion monothéiste. Cependant, les dieux prirent cela comme une trahison de notre part et décidèrent alors d'arrêter de nous protéger contre les armées démoniaques qui voulaient nous envahir et ont laissé les portes ouvertes entre les mondes. Le nouveau Dieu adulé donna des pouvoirs aux humains pour qu'ils puissent se défendre. Cependant, au fur et à mesure des générations, ces pouvoirs se perdirent, et avec eux la capacité de voir les monstres. Il créa également des passages allant d'une partie à une autre de notre planète. Cela nous permettrait de nous déplacer plus rapidement sur les lieux d'attaques et donc de prendre le dessus sur les démons. Ainsi nous pouvons voyager grâce au Nebulosus. Il y en a plusieurs disséminés un peu partout sur notre terre. Mais les choses se calmant au fil des années, seule notre Organisation lutte maintenant contre tout ça. Bien que nous soyons connus de nom, nous agissons dans l'ombre.
- Nous savons déjà tout ça. C'est ce qu'on apprend avec les contes pour enfants...
- Mais ce que vous ne savez pas, c'est qu'un oracle a prédit une chose au moment de la disparition des anciens dieux. Une sorte de dernière mise en garde de leur part avant de nous abandonner définitivement. Il y est dit ceci : "Lorsque le Gardien des pouvoirs viendra, le héro mourra et le monde sombrera".
Tous attendent alors que l'un d'entre eux rebondisse là-dessus. Malec n'y tenant plus, il parle en premier.
- Et en quoi ça a à voir avec moi ?
- Le gardien des pouvoirs est celui qui, après qu'ils se soient éteints, bénéficie de l'ensemble des pouvoirs que portent cette terre. Il est le seul qui peut les utiliser. Et a priori, ce gardien, c'est toi, Malec.
- C'est impossible. Vous avez dû rêver. Je n'ai pas de pouvoir.
- J'aimerai me tromper, mais ce n'est pas le cas.
- Et du coup, qu'est-ce qu'il va se passer ? Malec ne détruira pas le monde, c'est évident...
- Nous ne savons pas ce qu'il va arriver. Mais vous devez garder ça secret le temps que nous enquêtions là-dessus.
Ils baissent les yeux, abattus par cette nouvelle, et sortent de la pièce sans un mot de plus.
Une fois dehors, ils se dirigent vers les jardins. Ils aimeraient être seuls mais puisqu'ils sont de retour de leur première mission, ils sont entourés de tous les autres élèves et croulent alors sous les questions. Ils prétextent une grosse fatigue suite au voyage pour s'éclipser sans offusquer personne. Ils se retrouvent alors dans leur cachette, petite pièce inconnue de tous. Sauf de Lénia bien sur.
Ils s'installent sur les couvertures et coussins placés ici pour que ça soit plus confortable et restent ainsi un moment, sans oser briser le silence qui s'est installé. Les deux cogitent à cent à l'heure. Que veut dire cette prédiction ? Est-ce que ce fameux gardien existe vraiment ? Si oui, est-ce Malec ? Et est-ce qu'il va détruire le monde ? Cela leur semble bien trop irréaliste.
- Est-ce que tu les crois ?
Sa voix est faible. Elle transmet sa crainte d'être le fameux Gardien.
- Je n'en sais rien.
- Est-ce que tu as peur de moi ?
- Non.
Ce simple mot réchauffe le cœur du jeune homme. Il peut toujours compter sur elle, c'est indéniable.
Sania pose sa tête sur son épaule. Elle veut le réconforter comme elle le peut. Même s'il est le Gardien, il ne détruira pas cette terre, il en est incapable. Et elle ferait tout pour que ça n'arrive pas.
- De toute manière, si tu essais de détruire notre planète, je te frappe. C'est d'accord ?
Malec ricane.
- C'est d'accord. Mais tu ne parviendras pas à me toucher. Je suis bien trop fort pour toi.
- Mais bien sûr.
Ils rient de bon cœur. Ils se sentent soulager de savoir que quoi qu'il arrive, ils seront toujours ensemble.
- Eh...
- Quoi ?
- Tu sais, comme c'est bientôt la fin du monde apparemment, ça ne te dit toujours pas de sortir avec moi ?
Sania redresse la tête et le scrute avec un sourcil relevé.
- T'es sérieux là ?
- Bien sur. Pourquoi je ne le serait pas ?
- Tsss. Tu ne perds pas le nord toi.
- Jamais !
Il lui sourit et lui vole un baiser sans qu'elle n'ai le temps de réagir. Mais tandis qu'ils ont leurs lèvres scellées, elle ne le repousse pas et le lui rend. Malec se met à sourire en ressentant ça. Il savait bien qu'il avait raison d'insister. Lorsqu'elle recule, Sania détourne le visage.
- Qu'est-ce qui te fait sourire ?
- Toi.
- Quoi ? Pourquoi ?
- Tu fais celle qui n'est pas intéressée mais en fait je te plaît.
- Ne prend pas tes désirs pour la réalité !
- Bien sur, bien sur.
Il lui sourit et elle ne peut que lui répondre de la même manière. Il l'énerve tellement quand il a raison, mais elle est bien obligé de le reconnaître pour le coup.
- J'ai vraiment eu peur tout à l'heure.
- Quand ça ?
- Quand tu as été blessée et que l'autre allait t'attaquer. J'ai cru que j'allais te perdre...
Les derniers mots se serrent dans sa gorge. Sa peur est réelle et profonde. La voir blessée et sur le point de mourir, c'est quelque chose qu'il ne veut plus jamais vivre. Sania prend sa main et la serre.
- Je vais bien, ne t'en fait pas. J'ai déjà eu pire en entraînement alors bon. C'est pas une petite coupure qui va me faire peur !
Malec souffle. Décidément, elle est intenable. Ils restent ainsi un moment, à discuter, jusqu'à ce que le sommeil les rattrape.
Le lendemain matin, ils sont réveillés par Lénia qui vient les chercher. Même si la veille était bien remplie, il leur faut aujourd'hui se rendre de nouveau en cours et reprendre les entraînements. Lorsqu'ils arrivent devant la salle qui accueille les cours, tout le monde se dirige vers eux. N'ayant pas eu de réponse la dernière fois, ils comptent bien en avoir cette fois-ci. Les deux jeunes restent vagues dans leurs explications, ne voulant pas faire de gaffe. Après tout, Bromir leur a demandé de garder secret certaines parties de l'histoire. Et pour éviter d'en dire trop, autant ne pas dire grand chose.
Une fois satisfaits, le groupe qui les encercle fini par se disperser afin que chacun regagne sa place et reprenne sa discussion initiale où elle s'était arrêtée. Les deux héros du jour s'installent et écoutent rapidement ce qu'il se passe autour d'eux.
- Alors tu en sais plus ?
- Non toujours pas... Ils sont restés enfermés dans la salle de transfert toute la nuit avec tous les hauts rangs... Je ne sais pas pourquoi mais je me demande si ça a à voir avec la mission de Sania et Malec.
En entendant leurs noms, les deux intéressés tendent d'autant plus l'oreille.
- Ils n'étaient pas très clairs dans leur récit... Peut-être qu'ils nous cachent quelque chose.
- Je ne sais pas. Ce n'est pas vraiment leur genre.
- Qui sait, peut-être que ça leur est monté à la tête.
- Arrête. Tu sais bien que c'est faux. S'ils n'ont pas tout dit, c'est qu'il y a une raison.
Les bavardages cessent lorsque leur précepteur entre dans la pièce. Malec et Sania se lancent un regard entendu. Ils n'aiment pas ce qu'il est en train de se passer. Il va falloir qu'ils se renseignent auprès de leurs parents. Ils veulent savoir pourquoi tous les hauts rangs se sont enfermés depuis si longtemps. Ils décident alors qu'après le cours, ils iront voir Lénia. Elle au moins était disponible, malgré sa position parmi eux.