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Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

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Mia POV
J'étais devenue un spectre.
Je voyais tout, même si je n'étais plus là. C'était comme si une partie de mon âme était restée incrustée dans les murs de cette ville maudite, témoin silencieux du désastre qui se déroulait au ralenti.
Le lendemain de mon départ, le couperet est tombé. L'annonce officielle.
Pas un avis de recherche pour une femme et un enfant disparus. Non, Leo ne s'abaisserait pas à cela.
C'était une annonce dans la gazette locale, soigneusement dissimulée entre les lignes des pages mondaines, comme un secret que l'on hurle en chuchotant :
"Le Capo Leo Dante et Jasmin, fille du Don, annoncent leurs fiançailles. Une union pour la prospérité de la Famille."
J'ai lu les mots sur l'écran fissuré de mon téléphone jetable, assise sur le lit d'un motel miteux à trois cents kilomètres de là. L'odeur de tabac froid imprégnait les draps.
À côté de moi, Cayden regardait des dessins animés, son rire innocent contrastant violemment avec la réalité : son père venait de nous effacer de l'existence.
Ce n'était pas la trahison amoureuse qui me brûlait le plus. C'était l'effacement. Leo n'avait même pas pris la peine de signaler notre disparition. Pour lui, nous n'étions que des désagréments logistiques qui s'étaient résolus d'eux-mêmes.
Dans mon esprit, la scène au club se jouait avec une clarté insupportable. Je voyais Leo recevoir les félicitations de ses hommes.
"Et Mia ?" demandait peut-être l'un d'eux, un jeune soldat qui m'avait toujours souri.
"Elle a préféré partir," répondait sans doute Leo avec un haussement d'épaules indifférent, un verre de scotch à la main. "Elle ne supportait pas la pression de notre vie. Elle est faible. C'est mieux pour le petit d'être loin de tout ça."
Il réécrivait l'histoire. Il faisait de moi la méchante, la femme fragile qui abandonne le navire.
Mais il y avait une faille dans son arrogance. Une faille géographique de la taille d'un gratte-ciel.
Chicago.
À des milliers de kilomètres au nord, dans un bureau qui sentait le cuir ancien, le pouvoir absolu et le tabac de luxe, un rapport venait d'atterrir sur un bureau en acajou massif.
Don Salvatore Vitiello. Le Capo dei Capi. L'homme que le monde criminel craignait comme la peste, et que j'appelais Papa.
Je savais exactement ce qui se passait à cet instant précis. Mes protocoles de sécurité, ceux que j'avais désactivés il y a sept ans pour fuir ma cage dorée, s'étaient réactivés au moment où j'avais glissé cette vieille carte d'urgence dans un distributeur.
Le signal avait été envoyé. Une fusée de détresse dans la nuit noire.
Je pouvais presque sentir la terre trembler sous les pas de l'armée qui se levait à Chicago.
Leo POV
C'était une semaine bénie des dieux.
Jasmin était ravie, le Don m'avait officiellement remis les clés de l'entrepôt du port, et Patricia avait déjà commencé à redécorer ma maison pour purger les lieux de toute trace de Mia.
"Tu vois ?" m'avait dit ma mère en jetant les vieux livres de cuisine de Mia dans un carton avec un mépris non dissimulé. "Le destin récompense ceux qui sont forts. Elle est partie parce qu'elle savait, au fond d'elle, qu'elle n'était pas à sa place parmi nous."
Je n'avais pas répondu. Une petite partie de moi, une partie agaçante et irrationnelle, se demandait où elle était. Cayden n'avait pas appelé. C'était étrange. Mais j'étais trop ivre de succès pour m'en soucier.
J'étais en pleine réunion stratégique avec mes lieutenants quand mon téléphone a vibré. Un numéro inconnu.
J'ai décroché, agacé d'être interrompu. "Dante."
"Monsieur Dante." Une voix calme, glaciale, avec un accent que je ne reconnaissais pas immédiatement. Un accent du Nord. Tranchant. Chirurgical. "Je suis le Consigliere de la famille Vitiello."
J'ai failli lâcher mon verre. Les Vitiello ? La famille royale de Chicago ?
Pourquoi m'appelleraient-ils ? Nous n'avions aucune affaire avec eux. À leur échelle, nous étions des insectes.
"Que puis-je faire pour vous ?" J'ai redressé le dos par réflexe, faisant signe à mes hommes de se taire instantanément.
"Nous avons reçu un rapport inquiétant concernant une disparition dans votre juridiction. Une femme et un enfant."
J'ai froncé les sourcils, la confusion se mêlant à l'irritation. "Je ne suis pas la police. Appelez les flics si vous avez perdu quelqu'un."
"Cette personne n'est pas quelqu'un que l'on signale à la police, Monsieur Dante. Nous avons des raisons de croire qu'elle résidait sous votre toit."
Mon sang s'est glacé dans mes veines. Mia ? Impossible. Mia était une orpheline de l'Ohio. Elle n'avait aucun lien avec Chicago, et encore moins avec les Vitiello.
"Vous faites erreur," ai-je dit, tentant de retrouver mon assurance habituelle. "La seule femme qui a quitté ma maison récemment est mon ex-compagne. Une civile. Personne d'important. Elle est partie de son plein gré."
Il y a eu un silence au bout du fil. Un silence lourd, menaçant, comme le calme avant une exécution.
"Personne d'important," a répété la voix, plate, dénuée de toute émotion humaine. "Vous feriez mieux d'espérer que c'est vrai, Monsieur Dante. Parce que si vous avez menti, ou si vous avez fait du mal à ce qui nous appartient, Dieu lui-même ne pourra pas vous sauver."
La ligne a coupé.
J'ai regardé mon téléphone, perplexe, le cœur battant un peu trop vite. Une civile. Mia n'était qu'une civile.
C'était forcément une erreur. Une coïncidence bizarre.
J'ai haussé les épaules, chassant le malaise, et je me suis tourné vers mes hommes. "Reprenons. Où en est la cargaison ?"
Je n'avais aucune idée que je venais de raccrocher au nez de la Mort elle-même.