L'Enfer d'une Épouse Abandonnée
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Chapitre 2

POV: Éléanore Baron

Les paroles de Charlyne résonnaient encore dans mes oreilles, froides et tranchantes. « Tu crois encore pouvoir nous manipuler, Éléanore ? » Puis, le choc brutal. Un objet a transpercé la porte, un éclat de bois a volé, et une douleur aiguë a traversé mon bras. Je n'ai même pas remarqué quand Charlyne avait saisi le tisonnier rouillé de la cheminée. Le fer chaud m'a brûlé, la blessure saignant abondamment, mais ce n'était qu'une distraction face à la tempête qui faisait rage dans mon ventre.

Le venin qu'elle avait craché de ses lèvres, bien au-delà des mots, semblait s'être infiltré dans la plaie. Mon bras est devenu lourd, engourdi. Une étrange torpeur a commencé à se répandre, ralentissant mes mouvements déjà faibles. J'ai essayé de bouger mes doigts, de serrer le poing, mais mes muscles refusaient d'obéir. C'était comme si mon corps m'abandonnait, morceau par morceau.

Le sang continuait de couler de ma blessure, se mêlant à celui qui s'écoulait de mon ventre. Chaque battement de mon cœur pompait plus de vie hors de moi. Je n'étais qu'une mare de sang et de larmes, recroquevillée sur le sol froid, ma dignité brisée, mon corps en lambeaux. La force de me lever, de me battre, m'avait quittée. Je n'étais plus qu'une coquille vide, attendant la fin inévitable.

Mes larmes silencieuses roulaient sur mes joues, chaudes et salées, marquant des sillons sur ma peau pâle. La douleur à l'intérieur était une bête sauvage, me déchirant de l'intérieur. Mon ventre se contractait sans pitié, une torture sans fin. Les images de mon bébé, celles que j'avais créées dans mon esprit, me hantaient. Ses petits doigts, son petit nez, ses yeux qui ne s'ouvriraient jamais.

L'obscurité a commencé à m'envelopper, une douce étreinte qui promettait la fin de ma souffrance. J'ai senti mon esprit s'éloigner, les sons et les sensations s'estomper. Une dernière pensée, celle de mon enfant perdu, a traversé mon esprit avant que tout ne devienne noir.

Un bruit métallique. Un cliquetis. La porte. Elle s'est ouverte, mais je n'ai pu que percevoir une silhouette floue. J'ai entendu un hoquet. La silhouette a vacillé, puis a reculé d'horreur. C'était Charlyne. Elle était revenue. La panique dans ses yeux était palpable, une peur primaire qu'elle ne pouvait plus cacher.

« Éléanore ? » murmura-t-elle, sa voix tremblante. Elle a essayé de s'approcher, mais ses pas étaient hésitants. « Par la l'amour de Dieu... qu'est-ce qui t'est arrivé ? » Ses yeux étaient fixés sur le sang qui m'entourait, sur mon bras blessé, sur mon ventre affaissé.

Elle tâtonna avec la serrure, ses doigts visiblement maladroits, puis elle s'est enfin précipitée à mes côtés. Elle s'est penchée, son contact brusque me tirant de ma torpeur. Sa main s'est posée sur mon cou, cherchant mon pouls. « Tu me fais une scène ? » Sa voix était un mélange de peur et de colère. « Tu es incroyable. Tu as toujours une nouvelle astuce pour attirer l'attention, n'est-ce pas ? »

Elle a attrapé mon bras blessé, le tordant sans ménagement. La douleur m'a arraché un gémissement. « Ce n'est rien, juste une égratignure. Tu exagères toujours. » Ses yeux sont tombés sur le tisonnier rouillé qu'elle avait utilisé, une trace de sang séché sur sa pointe. Un rictus a déformé son visage. Elle l'a ramassé, le faisant tourner entre ses doigts avec une fascination morbide. « Intéressant... »

Un frisson m'a parcouru. Le fer, il n'était plus rouillé. Il brillait d'une étrange lumière, comme si le sang qu'il avait bu l'avait purifié, le rendant plus... puissant. J'ai senti une énergie s'en dégager, une énergie sombre et ancienne. C'était une arme, oui, mais pas seulement.

Charlyne a jeté un regard à l'arme. Ses yeux, d'abord curieux, se sont remplis de fureur. « Qu'est-ce que tu as fait à ça, Éléanore ?! » Elle m'a secouée, ses doigts s'enfonçant dans ma chair. « Ce n'est pas censé être comme ça ! » Elle m'a frappée à la joue, un coup sec qui a fait tourner ma tête. « Tu as tout gâché ! Tout ! »

Ses mots étaient un couteau dans mon cœur déjà brisé. « Tu n'auras pas cet enfant ! » Elle a hurlé, sa voix résonnant l'écho de la folie. « Ce sera celui de Victoire ! Le seul héritier de Damien ! » Elle a craché à mes pieds, ses yeux injectés de sang. « Et toi, tu vas regretter d'être née ! »

Elle m'a repoussée, son pied heurtant ma jambe. La porte s'est refermée avec un claquement violent, le son du verrou résonnant comme une sentence de mort. J'ai entendu le bruit d'un meuble lourd traîné pour bloquer la porte. Elle n'allait pas revenir.

Mon corps tremblait, secoué par des convulsions. Le poison, la douleur, la perte. Tout se mêlait dans un tourbillon infernal. J'ai fermé les yeux, implorant le néant de m'emporter.

Puis, une voix. Une voix d'enfant. Maman ? C'était un murmure, un sanglot à peine audible, mais je l'ai entendu. Mon enfant. Mon bébé. Il n'était pas parti. Il était là, quelque part, dans les profondeurs de mon désespoir.

« Non ! » J'ai hurlé, ma voix pleine d'une nouvelle force, d'une nouvelle rage. « Je ne te laisserai pas partir ! » J'ai agrippé mon ventre, mes doigts s'enfonçant dans ma chair. J'ai senti une chaleur, une pulsation faible mais persistante. Mon enfant.

Les larmes ont coulé sur mes joues, mais cette fois, ce n'étaient pas des larmes de chagrin, mais des larmes de fureur. J'ai rampé sur le sol, mes ongles déchirant le bois, mes dents serrées. J'ai hurlé, un cri primal, un cri de douleur, de perte, de rage. Un cri qui n'était plus humain.

C'est fini, mon amour. Je n'ai pas pu te protéger. La pensée m'a transpercé, plus douloureuse que toutes les blessures de mon corps. Je suis désolée. Je suis si désolée. Les images de mon avenir brisé, de ma maternité volée, ont défilé devant mes yeux. Damien, Victoire, Charlyne. Ils avaient tout pris. Tout.

Mon souffle s'est fait plus court, plus saccadé. Mon cœur battait la chamade, puis s'est ralenti, douloureusement. Le froid m'a envahie, me glaçant jusqu'à l'os. La lumière a commencé à s'estomper. J'ai vu des formes floues, des ombres dansantes.

Soudain, la porte s'est ouverte en grand. Pas Charlyne. Un homme. Grand, imposant, son visage déformé par l'horreur. Il portait l'uniforme des gardes, mais il n'était pas un simple garde. Ses yeux, effarés, ont balayé la pièce, s'arrêtant sur moi.

« Mon Dieu ! » Son souffle s'est coupé. Il a reculé d'un pas, ses mains couvrant sa bouche.

« À l'aide... » J'ai murmuré, ma voix à peine audible. « Le bébé... »

Il s'est précipité vers moi, son visage pâle. Il a posé une main tremblante sur mon front. « Madame Beaumont ? » Son ton était incrédule, comme s'il ne pouvait pas croire que la femme devant lui était la même personne qu'il avait vu si élégante et souriante. « C'est... c'est impossible. »

J'ai tendu ma main, ma bague de mariage glissant de mon doigt enflé. « Je... je suis Éléanore Baron. » J'ai chuchoté, mon nom sonnant étrangement dans mes propres oreilles. « S'il vous plaît... mon père... Antoine Baron. »

Il a ramassé la bague, ses yeux s'écarquillant. Le nom de mon père. Il était synonyme de pouvoir, même dans ce manoir isolé. Le garde, un homme nommé Jacques, a sorti son téléphone, ses doigts tremblants. « Monsieur Baron... C'est Jacques. Il y a un problème... C'est Madame Éléanore... »

Une voix forte et autoritaire a retenti du téléphone, coupant Jacques. « Qu'est-ce que c'est que ce cirque, Jacques ? Les Baron n'ont rien à faire ici ! » C'était Damien. Il était juste de l'autre côté du téléphone. « Éléanore est morte ! »

Jacques a blanchi. Il a regardé le téléphone, puis moi, l'horreur dans ses yeux. « Monsieur Beaumont, je... je le jure. C'est elle. Elle est... »

« Je vous interdis de la toucher ! » La voix de Damien a hurlé. « Elle n'est rien d'autre qu'une manipulatrice ! Laissez-la se débattre. »

Jacques a serré les dents. Il a raccroché, son visage devenant une expression de fureur et de détermination. Il a sorti une clé et a commencé à déverrouiller la porte de la pièce. « Je ne peux pas la laisser mourir. » Il a marmonné, plus à lui-même qu'à moi. « Ce n'est pas humain. »

Il m'a soulevée, doucement, mais la douleur était insupportable. Mon corps était une masse de nerfs à vif. Il a traversé le couloir, me portant comme une plume. Mais en arrivant à la porte principale, il a rencontré un obstacle. Les autres gardes.

« Jacques ! » L'un d'eux a crié, bloquant notre passage. « Qu'est-ce que tu fais ? Monsieur Beaumont a ordonné de la laisser là ! »

« Elle va mourir si je la laisse ici ! » a répliqué Jacques, sa voix pleine de colère. « Elle a besoin d'un médecin ! »

Les gardes ont hésité, leurs yeux balayant mon corps ensanglanté. Puis, un rire. Un rire familier. Charlyne. Elle était là, avec Victoire, toutes deux souriantes, leurs regards se posant sur moi comme sur un insecte piégé.

« Elle est juste une actrice, mes chers amis. » La voix de Charlyne était douce et mielleuse. « Elle fait ça pour attirer l'attention. Laissez-la là où elle est. C'est ce qu'elle mérite. »

Les autres gardes ont baissé les yeux, hésitants, mais loyaux à la famille Beaumont. Jacques a serré les dents. Il n'allait pas céder. Il m'a portée jusqu'à sa voiture de service, une vieille berline qui sentait le tabac froid. Il a démarré en trombe, laissant derrière nous le manoir et ses habitants cruels.

L'espoir a de nouveau vacillé en moi. Mais en arrivant à l'hôpital local, le désespoir m'a de nouveau envahie. Le couloir était sombre, à peine éclairé. Les infirmières semblaient fatiguées, les médecins absents. Le panneau à l'entrée annonçait : « Pénurie critique de personnel et de ressources. »

« Qu'est-ce que c'est que ça ? » a demandé Jacques, son visage décomposé. « Où sont les médecins ? »

Une infirmière s'est approchée, son visage fermé. « Tous les médecins, tous les lits d'urgence, tous le matériel de pointe... tout a été transféré à l'hôpital Beaumont. » Elle a jeté un regard à mon corps ensanglanté, puis à Jacques. « Pour la naissance de l'héritier Beaumont. »

J'ai senti mon âme se briser en mille morceaux. Damien. Il avait tout orchestré. Tout. Mon enfant n'avait aucune chance.

            
            

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