La Nounou du Millionnaire
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Chapitre 3 Chapitre 3

– Joe, c'est le seul ami qu'on a ici. Si tu pouvais éviter de le faire fuir...

– Tu parles, il nous adore, il veut même venir vivre avec nous ! murmure-t-elle en me faisant un clin d'œil.

– Hum, vu le nombre de filles qu'il ramène chez lui, non merci.– Il est mannequin, que veux-tu, c'est dans son A.D.N.

L'intéressé revient, tend le seau à sa collègue et passe derrière le comptoir.

– Alors, ma blonde, cet entretien ? me lance-t-il en essuyant un verre. Ta sœur m'a dit que tu allais bientôt pouvoir nous payer des vacances au soleil !

– Non seulement je ne vais rien vous payer, mais en plus je vais peut-êtredevoir vous demander de me pistonner...

– Tu rêves, on est au complet, ici, répond Joe. Et puis tu vaux mieux queça, toi...

– Si ça t'intéresse, je pourrai parler de toi autour de moi, propose gentiment Jasper. Mon agent m'a fait part d'un casting pour des photos de lingerie. Il y a bien un corps de déesse, sous ce tailleur de mamie, non ?

– Sid, se mettre en soutif devant des inconnus ? Je donnerais cher pour voir ça ! se marre ma peste de sœur.

– Je ne suis pas aussi chiante que tu le penses, Joe !

– Ah, ouais ? Prouve-le, Super Nounou !

– Bon, les clients commencent à arriver, je file, grogné-je en quittantmon tabouret.

Je suis sur le pas de la porte, prête à sortir du bar qui se remplit à toute allure, quand Joe me rattrape.

– Désolée, tu sais que je t'aime... glisse-t-elle à mon oreille.

– Ouais. Tu as parfois de drôles de façons de le montrer, mais je le sais.

Joséphine et Sidonie, depuis toujours, c'est le jour et la nuit. Nos visages sont identiques, mais ça s'arrête là. Notre couleur de cheveux est la première chose qui nous différencie, mais ce n'est rien comparé à nos personnalités. Elle porte à merveille son look grunge – quoique féminin et étudié. J'arbore un look passe-partout, sans grande recherche. Elle est tatouée, je tourne de l'œil à la vue d'une aiguille. Elle est instinctive, fonceuse, imprévisible, je préfère utiliser mon cerveau avant d'agir. Elle aime les garçons, ils le lui rendent bien, mais elle se lasse trop vite pour construire quoi que ce soit. Je me méfie des hommes, mais finis toujours par jeter mon dévolu sur le pire d'entre eux. Elle est grande gueule, rentrededans, casse-cou – voire plus... – je suis la version raisonnable et édulcorée. Trop, selon elle. Ma jumelle passe son temps à me dire que je suis bourrée de qualités, que mon avenir est tout tracé, que je devrais avoir le monde à mes pieds, mais que je ne sais pas saisir les opportunités. Par manque de confiance en moi. À cause des démons du passé. Elle a sans doute raison...

Pas totalement tort, disons...

Notre point commun : un chagrin immense, qui ne nous quitte plus depuis presque quatre mois. Depuis la disparition de notre mère, Hélène. Une fée aux yeux rieurs, au sourire mutin, qui a passé sa vie à prendre soin des autres. Son métier d'infirmière, elle disait que c'était tout ce qu'elle savait faire. Joe et moi n'étions pas dupes, nous savions qu'elle était bien plus que ça. Que, malgré sa petite existence modeste, notre mère était un être exceptionnel. La seule personne au monde qui savait garder le sourire en toute occasion, même dans les pires moments, même – et surtout – à l'article de la mort. Elle qui nous a élevées seule, sans jamais nous faire payer la lâcheté de notre père. Elle dont nous étions le portrait craché et qui n'a jamais cherché à nous formater. Libre, forte, aimante, Hélène Merlin était tout pour moi. Le cancer l'a emportée, elle n'avait pas 50 ans.

Un nouveau départ dans une ville vivante, bruyante, anesthésiante, voilà ce qui a motivé notre arrivée à Londres. C'était ça ou laisser la tristesse nous ronger... jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien.

Laisser Mathias sur le carreau, je dois avouer que ça ne m'a pas déplu. J'avais besoin d'un déclic, je l'ai eu en achetant un billet aller, sans retour. Le grand, le réputé, le décrié Mathias Prévost. L'homme charismatique, manipulateur et ô combien toxique qui a tenté par tous les moyens de me retenir, mais à qui j'ai finalement échappé. Après six ans de relation avec un égoïste de première, pour qui seuls la notoriété et l'argent comptent, il était temps. Un écrivain qui gagne des fortunes en étalant, ridiculisant, brisant la vie des gens ? Ça aurait dû me mettre la puce à l'oreille. J'étais faible, naïve, un peu perdue et je me suis laissé éblouir par cette vie privilégiée parmi les gens « de la haute ». Aujourd'hui, j'ai repris ma liberté et l'ai abandonné à ses livres-scandales, à son public de voyeurs, à ses interviews télévisées, à ses articles fielleux dans la presse. De lui, je ne veux rien garder.

***

Six heures cinquante-huit. Mon téléphone vibre sur la chaise qui me sert de table de nuit, me sortant brusquement de mes songes – dans lesquels une sorcière, au visage étrangement similaire à celui d'Imogen Price, me traînait par les cheveux le long d'un interminable couloir. Numéro masqué. Je déglutis difficilement en me redressant dans mon lit.

Mathias ? Non, il ne connaît pas mon nouveau numéro. Impossible.

Quelques secondes plus tard, je suis au bord de la crise de panique lorsque mon smartphone cabossé vibre à nouveau. J'appuie sur le téléphone rouge pour envoyer l'importun sur répondeur. Nouvelle vibration : un message vocal m'attend. Je retiens ma respiration en plaçant l'engin contre mon oreille...

– Miss Merlin, Imogen Price à l'appareil. Mr Rochester souhaite vous rencontrer sur-le-champ. Huit heures. Soyez ponctuelle ou ne prenez pas la peine de vous déplacer. À huit heures une, nous contacterons le candidat suivant.

Quelle idiote... Évidemment que ce n'était pas Mathias... Huit heures pétantes ? Challenge accepté, Miss Marple !

Je me rue jusqu'à la salle de bains, me prends les pieds dans le cordon du sèche-cheveux – laissé branché toute la nuit par ma chère sœur – et lâche un nom d'oiseau suffisamment fort pour la réveiller. Ou, du moins, pour réveiller une personne lambda. Ce qui veut dire que Joe n'est pas concernée. Madame la Marmotte roupille toujours lorsque je franchis le pas de la porte, vingt-deux minutes plus tard. Pantalon de tailleur noir et chemisier rose pâle, maquillage léger, queue-de-cheval lissée : pas d'effort superflu, juste le strict minimum pour faire bonne impression.

Sept heures vingt-neuf. Le temps était orageux hier soir et vu les flaques qui jonchent la rue, je devine que le ciel s'est défoulé pendant la nuit. Je m'éloigne de Cleveland Way – cette rue où je commence à me sentir chez moi – pour rejoindre une plus grosse artère. Mon timing est serré, je vais devoir me payer le luxe d'un taxi. Jusqu'à Mayfair, en prévoyant la circulation, le trajet devrait prendre une bonne vingtaine de minutes. Ce qui m'en laisse cinq pour arrêter un véhicule.

Le quartier est déjà en ébullition, le grand marché s'installe, les visages sont fatigués, mais les corps s'activent. Ce coin de Londres n'a pas très bonne réputation, mais il nous a tout de suite plu, à Joe et moi. Nous ne sommes qu'à une dizaine de minutes de Whitechapel, le quartier de prédilection de Jack l'Éventreur. C'est ça qui a séduit ma jumelle, plus que tout le reste – allez savoir pourquoi... Moi, c'est le loyer qui m'a convaincue. Presque abordable : un miracle dans cette ville. J'ai tout de suite apprécié le côté cosmopolite de ce borough, toutes ces langues chantantes qu'on entend à chaque croisement de rues, tous ces artistes qu'on croise, ces restaurants exotiques qui font voyager les papilles – sans creuser un trou dans le porte-monnaie.

            
            

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