Chapitre 1 Chapitre 1

Candice Miller s'affala lourdement sur le canapé, incapable de soutenir plus longtemps son propre poids. Sa robe de soirée, arrachée par endroits, laissait voir la finesse de ses jambes qu'elle n'arrivait même plus à croiser. La chaleur qui l'envahissait lui donnait l'impression d'être consumée par des flammes invisibles. Ses muscles étaient mous, son souffle court, et chaque tentative pour se lever se soldait par un vertige brutal.

Face à elle, Monica Clain, sa confidente de toujours, la regardait avec une expression difficile à déchiffrer. Candice parvint à articuler d'une voix tremblante :

- Thérèse... j'ai l'impression que tout tourne autour de moi.

L'autre ne sembla pas étonnée. Son regard froid, presque amusé, contrastait avec le désarroi de Candice. Elle déclara sans détour, comme si elle parlait de la pluie et du beau temps :

- C'est normal. J'ai glissé quelque chose dans ton verre. Tu ne tarderas pas à perdre le contrôle. Dans peu de temps, tu supplieras ce porc de Dowey de coucher avec toi. Et demain, les journaux se jetteront sur toi, les photographes t'attendront à la sortie de ta chambre. Le monde entier saura que la star Candice Miller n'est qu'une traînée. Tiens, je connais déjà le titre : « L'actrice emblématique révélée comme une putain ».

Les mots de Monica frappèrent Candice comme une lame en plein cœur. Son souffle se coupa.

- Comment as-tu pu... Thérèse ? Toi... ma meilleure amie...

- Amie ? Ne me fais pas rire. Si tu l'étais vraiment, tu ne m'aurais jamais volé la vedette. C'est moi qui devrais être sous les projecteurs, pas toi.

Dans ses yeux brillait une jalousie maladive, dévorante. Un rictus cruel déforma sa bouche lorsqu'elle saisit les cheveux de Candice pour lui renverser la tête en arrière.

- Après cette nuit, tu ne seras plus rien. Tout ce qui t'appartient sera à moi. Y compris Andrews Colliins. Tu veux savoir ? Je l'ai déjà eu dans mon lit.

Un sanglot muet monta dans la gorge de Candice. Ses lèvres entrouvertes restèrent stériles, incapables d'émettre le moindre son. Elle se contenta de fixer Monica avec une douleur mêlée d'incrédulité. Son cœur se serrait, comme tailladé par mille coups de couteau.

Elle n'avait jamais imaginé que son petit ami et sa meilleure amie puissent la trahir à ce point.

- Profite bien de ta soirée, ma chère, lança Monica en la relâchant brusquement.

Puis elle ponctua ses paroles d'un violent coup de pied dans le flanc de Candice avant de quitter la pièce, laissant derrière elle un parfum de cruauté.

Au moment où la porte se referma, Candice serra les poings si fort que ses ongles s'enfoncèrent dans sa chair. Ses lèvres saignèrent quand elle mordit sa bouche pour ne pas hurler. Elle devait se lever. Elle devait fuir. Elle ne pouvait pas se laisser détruire ainsi.

Rassemblant ses forces, elle se traîna jusqu'à la porte. Mais alors qu'elle tendait la main vers la poignée, une paume masculine surgit derrière elle et claqua violemment la porte contre son cadre.

- Ah !

Un cri de terreur lui échappa. Elle croyait être seule.

Le corps de l'homme se plaqua contre son dos, solide, brûlant, oppressant. Son souffle chaud effleurait son oreille, une odeur masculine, enivrante, la frappa de plein fouet. Elle trembla de peur, son esprit incapable de comprendre qui se tenait ainsi derrière elle.

La voix grave qui résonna contre sa nuque était glaciale, tranchante :

- Si tu m'aides, je t'offre vingt millions de dollars.

Dans l'ombre, ses yeux étincelaient, fauves, menaçants, comme ceux d'un prédateur prêt à fondre sur sa proie. Candice grelottait, incapable de répondre. L'argent n'avait aucune importance. Elle avait surtout besoin qu'on la sauve de ce piège infernal.

- Je... je me sens si mal... gémit-elle, étouffée par la fièvre qui la consumait.

Son corps la trahissait, sa respiration saccadée n'obéissait plus à sa volonté.

Le lendemain, aux premières lueurs, l'homme remit en place sa veste parfaitement taillée. Sa silhouette élancée respirait l'élégance, ses gestes étaient maîtrisés, froids, sans aucune trace de l'animal farouche de la nuit passée. Son visage aux traits impeccables paraissait aussi impassible que du marbre.

Il jeta un dernier regard à la femme profondément endormie dans les draps froissés. Ses longs cheveux masquaient ses traits, mais il se souvenait de sa beauté et de sa fragilité. Avec un geste inhabituel chez lui, il déposa une montre de poche précieuse dans sa main.

Brandon Edwards n'avait jamais touché aucune femme auparavant.

« Elle est exquise », pensa-t-il, avant d'ouvrir la porte.

Il fut aussitôt aveuglé par les flashs des photographes. Les journalistes s'étaient massés devant la chambre, mais tous se figèrent en reconnaissant celui qui sortait.

Brandon Edwards. Le nom suffisait à imposer le silence. Le plus riche, le plus respecté de toute Glebey City. Aucun média n'avait jamais osé salir son image. Les rares qui avaient tenté l'expérience n'existaient plus.

Son regard glacé parcourut la foule.

- Vous osez prendre des photos de moi ?

Les journalistes tremblèrent, se confondant en excuses.

- Pardon, Monsieur Edwards... nous ne savions pas...

Sous ses yeux sévères, ils jetèrent leurs appareils au sol et brisèrent eux-mêmes leurs cartes mémoire, trop effrayés pour espérer sauver quoi que ce soit.

- Dégagez, ordonna-t-il.

Ils obéirent, disparurent comme une volée d'oiseaux dispersés par un prédateur.

Quand Candice reprit connaissance, un malaise profond l'écrasa. Les souvenirs de la nuit l'assaillirent et la colère monta. Tout était de la faute de Monica. C'était elle qui l'avait poussée dans les bras d'un inconnu.

Un vide amer lui serra la poitrine quand elle réalisa qu'elle avait perdu sa virginité avec un homme dont elle ignorait tout. Ses doigts se refermèrent sur l'objet froid qu'elle tenait : une montre de poche. Le seul indice laissé par ce mystérieux inconnu.

Elle se mordit la lèvre et murmura :

- Tant pis. Coucher avec un inconnu vaut mieux que d'avoir été livrée à Dowey.

Après avoir dissimulé son visage sous un masque, elle quitta l'hôtel. Étrangement, aucun journaliste ne l'attendait. Elle prit aussitôt la direction du siège d'Icehive Entertainment. Elle devait obtenir des réponses d'Andrews.

Arrivée devant le bureau du président, elle entendit des rires étouffés.

- Andrews, tu es vraiment un vilain garçon. Qui choisis-tu, moi ou Candice ?

- Toi, bien sûr ! Elle ne m'a jamais intéressé. Je me suis servi d'elle pour sa notoriété et son argent. On l'a roulée comme une idiote.

Ces paroles lui brisèrent le souffle. Elle ouvrit violemment la porte et hurla, les yeux rouges :

- Andrews ! Tu t'es servi de moi tout ce temps ? Vous deux méritez de brûler en enfer !

Monica, assise sur les genoux d'Andrews, sursauta.

- Candice ? Tu ne devrais pas être à l'hôtel ?

Mais Candice s'avança d'un pas furieux et gifla Monica de toutes ses forces.

- Tu voulais ma chute, mais je suis encore debout. Tu m'as trahie comme personne, et je regrette d'avoir cru en toi. Dès aujourd'hui, notre amitié est morte.

Puis son regard se posa sur Andrews. Tout ce qu'il avait pu lui dire, toutes ses promesses, n'étaient que du vent.

- Espèce de lâche. Tu l'aimes plus que moi ? Alors reste avec elle. Je me tire.

Ses larmes brûlaient ses joues, mais sa voix resta ferme. Elle claqua la porte et sortit, le cœur en morceaux.

Quelques jours plus tard, la sentence tomba. Candice fut effacée du paysage médiatique du jour au lendemain. Icehive Entertainment offrit à Monica toutes ses opportunités, remplaça ses affiches, annula ses contrats. En un mois, elle passa de star adulée à pestiférée. On l'accusait de tout, on l'insultait partout.

Même son père la renia.

Seule sur une plage, face à la mer, Candice laissa éclater ses sanglots.

- Maman... si tu étais là, rien de tout ça ne m'arriverait... J'aimerais te rejoindre au ciel. Mais je ne peux pas... le médecin m'a dit que j'étais enceinte.

Ses mains tremblantes se posèrent sur son ventre.

Elle ne savait pas qui était l'homme de cette nuit, mais l'enfant n'y était pour rien.

Essuyant ses larmes, Candice releva la tête. Dans ses yeux brillait une flamme nouvelle.

- Assez pleuré. À partir d'aujourd'hui, je vais me battre. Je récupérerai tout ce qui m'appartient.